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Ce que l'on sait du massacre en Casamance


Photo prise lors des funérailles de l'une des victimes de l'attaque de la forêt de Bayotte, Casamance, Sénégal, le 7 janvier 2018
Photo prise lors des funérailles de l'une des victimes de l'attaque de la forêt de Bayotte, Casamance, Sénégal, le 7 janvier 2018

Le massacre de 14 personnes le 6 janvier dans une forêt classée de Casamance a rompu l'accalmie régnant depuis plusieurs années dans cette région du sud du Sénégal, en proie à une rébellion armée depuis 1982.

Près d'une semaine plus tard, de nombreuses interrogations subsistent sur les protagonistes, le mobile et les conséquences de cette tuerie, qui serait liée à l'exploitation illicite du bois, sur les négociations de paix en cours entre les rebelles et les autorités sénégalaises.

>> Lire aussi : La rébellion condamne le massacre et prône la poursuite du dialogue à Casamance

- Que s'est-il passé le 6 janvier ?

Selon les récits de rescapés, 15 à 20 hommes armés font prisonniers, dès les premières heures du jour, une vingtaine d'hommes venus chercher du bois dans la forêt classée de Bayotte, proche de Ziguinchor, principale ville de cette région agricole et touristique bordée au nord par la Gambie et au sud par la Guinée-Bissau.

En tenues militaires, ils les rassemblent dans la forêt, confisquent leurs vélos et téléphones et, à la mi-journée, les obligent à se coucher puis ouvrent le feu sur eux. Jeudi, le corps d'un homme de 52 ans a été retrouvé, portant le bilan à 14 morts, dont trois ressortissants de Guinée-Bissau, et une demi-douzaine de blessés.

Le jour même, l'armée lance des opérations de ratissage qui n'ont toujours pas permis de procéder à des arrestations.

Les familles pleurent leurs morts de l'attaque en Casamance (vidéo)
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- Qui sont les victimes ?

Les hommes tombés dans ce guet-apens cherchaient du "bois de chauffe", ont affirmé des rescapés et proches des victimes.

Vivant près de Ziguinchor, ils pourraient en fait s'être livrés à la coupe illicite de bois précieux, selon plusieurs observateurs ayant requis l'anonymat pour des raisons de sécurité.

>> Lire aussi : "Ils nous ont dit de nous coucher et ont tiré": des rescapés de Casamance racontent

- Qui sont les meurtriers ?

C'est la question que se posent tous les Sénégalais, alors que l'armée refuse de se prononcer tant que les auteurs "n'ont pas été appréhendés".

Cette tuerie "ne peut être que l'oeuvre d'une force organisée", estime un membre de la société civile locale ayant requis l'anonymat pour des raisons de sécurité.

Rapidement mise en cause, la rébellion du Mouvement des forces démocratiques de Casamance (MFDC, indépendantiste) a condamné un "acte odieux" et pointé du doigt des responsables administratifs et militaires locaux "à la tête d'un vaste réseau de coupe clandestine et de vente illicite de bois de teck".

Des membres de "comités villageois" de défense de la forêt ont été condamnés récemment pour avoir molesté des trafiquants.

"Il n'est pas exclu que des membres de ces comités, excédés par l'ampleur de la coupe, aient demandé au MFDC de venir régler leur problème", a affirmé à l'AFP une source proche de la médiation.

- Pourquoi ce regain de violence?

La tuerie "est liée à la défense de la forêt", estime Yaya Mané, un responsable du Groupe de réflexion pour la paix en Casamance (GRPC).

Depuis que le président gambien Yahya Jammeh a quitté le pouvoir en janvier en Gambie, longtemps plaque tournante de la contrebande de bois de Casamance --à destination en particulier de la Chine--, ce trafic s'est déplacé dans le sud de la région, moins surveillé que les zones frontalières de la Gambie, selon Nouha Cissé, personnalité écoutée de la société civile de Casamance.

Dorénavant, près de Ziguinchor, "de nombreuses scieries traditionnelles clandestines opèrent dans la forêt", a déclaré à l'AFP le député-maire de la ville, Abdoulaye Baldé. Les trafiquants opèrent généralement de nuit et font convoyer vers Ziguinchor des charrettes remplies de teck ou de bois de vène, selon des habitants et des responsables locaux.

- Quelles conséquences sur le processus de paix ?

De nombreux analystes ont affirmé à l'AFP que cette tuerie, malgré le bilan très lourd, ne remettait pas en cause le processus de paix engagé par Dakar et le MFDC.

Des négociations ont repris en octobre à Rome sous l'égide de la communauté catholique de Sant'Egidio, médiatrice dans ce conflit qui a fait en 35 ans des milliers de victimes civiles et militaires, ravagé l'économie de la région et poussé de nombreux habitants à fuir.

Dans son message de fin d'année, le président Macky Sall avait lancé un appel à la rébellion pour faire "le pas décisif vers la paix définitive, une paix sans vainqueur ni vaincu".

"Le MFDC continue dans sa dynamique d'ouverture au dialogue en faveur d'une issue heureuse au conflit casamançais, a-t-il indiqué après la tuerie.

Avec AFP

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