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La Tanzanie va rouvrir ses universités malgré les doutes sur l'épidémie


Un travailleur vérifie la température des voyageurs au poste frontière avec le Kenya à Namanga, dans le nord de la Tanzanie, le 16 mars 2020.
Un travailleur vérifie la température des voyageurs au poste frontière avec le Kenya à Namanga, dans le nord de la Tanzanie, le 16 mars 2020.

Le président tanzanien John Magufuli a annoncé jeudi la réouverture des universités et le retour des compétitions sportives dans son pays à partir du 1er juin, après avoir assuré que l'épidémie était en net recul, au grand dam de l'opposition.

M. Magufuli a régulièrement minimisé la gravité de l'épidémie de nouveau coronavirus et cela fait trois semaines que son gouvernement n'a pas actualisé le nombre total de cas, bloqué à 480, dont 16 morts, au 29 avril.

Alors que l'ambassade des Etats-Unis sur place a récemment fait état de signes de "croissance exponentielle" du virus dans plusieurs endroits du pays et que l'opposition dénonce des manoeuvres de "dissimulation", M. Magufuli a décidé d'assouplir les mesures en place pour enrayer l'épidémie.

"Nous avons décidé de rouvrir les universités à compter du 1er juin 2020", a-t-il déclaré lors d'une réunion publique dans la capitale administrative, Dodoma, précisant qu'une décision sur le primaire et le secondaire serait prise ultérieurement.

Il a ajouté que les événements sportifs pourraient reprendre à la même date, assortis toutefois de mesures de distanciation sociale.

"A l'heure actuelle, je n'ai pas entendu parler de sportifs qui seraient morts du coronavirus et ça veut dire que non seulement le sport est important pour le divertissement, mais aussi pour la lutte contre le virus", a-t-il déclaré.

Les annonces du président Magufuli ont une nouvelle fois suscité la consternation dans les rangs de l'opposition. Zitto Kabwe, leader de l'Alliance pour le changement et la transparence (ACT-Wazalendo) a estimé que l'approche du gouvernement équivalait "à bombarder la population", accusant les autorités d'être "en rébellion contre la science".

"Aujourd'hui, nous avons appris que le gouvernement rouvrait les universités et autorisait de nouveau les activités sportives. C'est dangereux", a-t-il déclaré dans un discours diffusé en ligne.

- Remercier Dieu -

Interrogé par l'AFP, un employé d'un hôpital public de Dar es Salaam, la capitale économique, a affirmé, sous couvert de l'anonymat: "Ce qui se passe (réellement) est différent de ce qui est rapporté".

"J'ai vu quatre personnes mourir (...) en une seule journée dans cet hôpital", a-t-il assuré, précisant qu'elles présentaient toutes les symptômes du Covid-19.

La fermeture des écoles, des universités, l'interdiction des activités sportives et la suspension des vols internationaux ont été les principales mesures prises par l'administration Magufuli pour lutter contre l'épidémie.

Lundi, le gouvernement a levé la suspension sur les vols intérieurs et internationaux, en place depuis le 7 mai, et indiqué que ceux qui entreraient dans le pays ne seraient pas soumis à une quarantaine obligatoire.

Les pays voisins, comme l'Ouganda, le Rwanda ou le Kenya, ont imposé des mesures beaucoup plus strictes, comme le confinement de leur population ou des couvre-feu nocturnes et des restrictions de mouvement.

Le Kenya a ordonné la semaine dernière la fermeture de sa frontière terrestre avec la Tanzanie, sauf pour les marchandises, après avoir constaté un nombre croissant de cas positifs en provenance de ce pays.

Plus de 100 chauffeurs de poids lourds tanzaniens ont ainsi été testés positifs à la frontière par les autorités kényanes ces derniers jours et ont été refoulés.

Dimanche, le président Magufuli avait annoncé une diminution "drastique" du nombre de patients atteints du Covid-19 dans les hôpitaux du pays, sans donner de chiffres, attribuant cette nette amélioration aux prières des Tanzaniens.

Il a déclaré une nouvelle session de trois jours de prières nationales à partir de vendredi, pour remercier Dieu, tandis que le gouverneur de Dar es Salaam, Paul Makonda, a appelé ses administrés à sortir dans la rue ce week-end et à faire du bruit pour célébrer l'évolution de l'épidémie dans le pays.

Issu des rangs du parti au pouvoir (Chama Cha Mapinduzi - CCM), M. Magufuli, 60 ans, a été élu président en 2015.

Surnommé "Tingatinga" (bulldozer en swahili), un temps salué pour ses efforts affichés dans la lutte contre la corruption, il est régulièrement accusé par ses opposants de forte dérive autoritaire et par les groupes de défense des droits de l'homme d'avoir grandement restreint les libertés publiques dans son pays.

La prochaine élection présidentielle est prévue en octobre 2020, à une date encore indéterminée.

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