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La faible participation assombrit la réélection attendue du président Kenyatta


Uhuru Kenyatta s'adresse à la foule lors d'une meeting, Nairobi, le 23 octobre 2017
Uhuru Kenyatta s'adresse à la foule lors d'une meeting, Nairobi, le 23 octobre 2017

Le Kenya paraissait vendredi toujours plus divisé après une présidentielle boycottée par l'opposition, endeuillée par la mort de plusieurs de ses partisans et dont la faible participation questionne d'ores et déjà la légitimité du président Uhuru Kenyatta.

Les opérations de compilation des résultats se poursuivaient et vendredi, la Commission électorale (IEBC) avait reçu les résultats de plus de 36.000 des 40.883 bureaux de vote du pays, a annoncé sur son compte Twitter son chef Wafula Chebukati.

Le résultat ne fait aucun doute: le sortant Kenyatta - de l'ethnie majoritaire kikuyu - est assuré de l'emporter, son rival historique, l'opposant Raila Odinga (un Luo), ayant décidé de ne pas participer à ce qu'il a qualifié de "mascarade" électorale.

Le taux de participation est estimé à moins de 35% des 19,6 millions d'électeurs sur plus de 90% des circonscriptions dépouillées, a précisé M. Chebukati. Mais au vu de ces chiffres si faibles - à l'opposé du plébiscite souhaité par Uhuru Kenyatta - nombre d'observateurs questionnent déjà sa légitimité.

Outre le boycott de l'opposition et les menaces contre les électeurs de M. Kenyatta dans les bastions de M. Odinga, nombre de partisans traditionnels du président sortant ne se sont semble-t-il pas déplacés.

Affrontements entre électeurs et la police dans le bidonville de Nairobi (vidéo)
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Un manque d'engouement qu'expliquent sans doute une lassitude de plus en plus prégnante face aux turpitudes de l'élite politique et un ras-le-bol de la gestion de la crise électorale qui affecte durement l'économie.

"A l'issue de cette élection, le pays est plus fracturé et instable que jamais", dénonce vendredi le quotidien The Nation dans son éditorial. MM. Kenyatta et Odinga "doivent comprendre (...) que leurs positions antagonistes ne sont plus tenables", juge-t-il.

Pays dynamique et première économie commerciale en Afrique de l'Est, le Kenya est plongé dans sa pire crise politique depuis 10 ans, depuis que la justice a annulé - une première en Afrique - la présidentielle du 8 août, qui avait vu la réélection de M. Kenyatta, avec un taux de participation de 79,5%.

La Cour suprême avait justifié cette décision par des irrégularités dans la transmission des résultats, faisant peser la responsabilité de ce scrutin "ni transparent, ni vérifiable" sur la Commission.

M. Odinga, 72 ans et trois fois candidat malheureux à la présidence (1997, 2007, 2013), a fait pression pour obtenir une réforme de cette Commission mais l'opposition a jugés insuffisants les changements récemment mis en oeuvre.

Le président de l'IEBC avait lui-même émis des doutes sur la capacité de la Commission à garantir un scrutin crédible, confortant la décision de M. Odinga de boycotter l'élection.

Malgré les appels à la retenue des deux camps, des affrontements violents avec la police ont eu lieu jeudi dans de nombreux bastions de l'opposition, où les frustrations et le sentiment de marginalisation ont été exacerbés depuis des années. Le Kenya a connu depuis l'indépendance (1963) trois présidents sur quatre issus de l'ethnie kikuyu, qui domine également l'économie du pays.

Au moins quatre personnes ont été tuées par balle et des dizaines d'autres blessées dans des bidonvilles de Nairobi et l'ouest du pays. La situation était calme vendredi matin à Kisumu, où l'activité avait partiellement repris. Mais des manifestants se confrontaient à la police dans la ville de Bugoma (ouest).

Au moins 44 personnes ont été tuées depuis le 8 août, la plupart dans la répression brutale des manifestations par la police. Ces heurts ravivent les terribles souvenirs de la présidentielle de fin 2007 qui avait débouché sur les pires violences politico-ethniques depuis l'indépendance et fait au moins 1.100 morts.

Dans quatre des 47 comtés du pays (Homa Bay, Kisumu, Migori et Siaya), majoritairement peuplés par l'ethnie luo, la présidentielle a été reportée à samedi par la Commission électorale, le vote n'ayant pas pu se tenir dans des conditions acceptables.

Mais le gouverneur de Kisumu, Anyang' Nyong'o, une des figures de l'opposition, a répliqué dès jeudi qu'il n'y aurait aucun vote possible samedi dans son comté, où une semaine de deuil est organisée.

Dénonçant la "dictature" qui s'est abattue sur le Kenya, Raila Odinga a appelé de ses voeux mercredi la création d'un "Mouvement national de résistance" contre "l'autorité illégitime du gouvernement".

Le journal The Standard synthétisait bien l'image d'un pays éprouvé, titrant à la Une: "Un Kenya, deux visages" en publiant deux photos prises jeudi: des électeurs faisant la queue pour voter d'un côté, et une manifestation réprimée par la police de l'autre.

Avec AFP

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