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Ces femmes qui ont été présidentes en Afrique


L'ancienne présidente libérienne Ellen Johnson-Sirleaf, lauréate du prix Nobel de la paix, posant avec son diplôme et sa médaille après avoir été récompensée, à Oslo, le 10 décembre 2011. (Reuters/Leonhard Foeger)
L'ancienne présidente libérienne Ellen Johnson-Sirleaf, lauréate du prix Nobel de la paix, posant avec son diplôme et sa médaille après avoir été récompensée, à Oslo, le 10 décembre 2011. (Reuters/Leonhard Foeger)

La représentation des femmes en politique est en hausse dans le monde. En Afrique, elles s'affirment dans les instances dirigeantes, jouant pleinement leur rôle de pionnières. Bien que minoritaires, à l'exception de quelques pays comme le Rwanda, elles parviennent à s'imposer au sommet de l'Etat.

Il y a eu jusqu'ici une soixantaine de femmes présidentes dans le monde dont 17 par interim et deux chancelières. Onze présidentes sont en poste actuellement, dont une en Afrique, Sahle-Work Zewde, élue à la tête de l'Ethiopie le 25 octobre 2018.

L'Afrique a déjà eu douze présidentes dont sept par intérim. Bien que certaines aient exercé pour de très courtes durées, ces personnalités ont ouvert la voie à de nombreuses femmes qui tentent leur chance en politique sur le continent.

Libéria: la pionnière "Ma Ellen"

Parmi ces pionnières, nul doute que la plus connue est Ellen Johnson Sirleaf, qui, le 16 janvier 2006 est devenue la première femme présidente élue en Afrique, et également la présidente africaine qui est restée le plus longtemps au pouvoir, grâce à sa réélection en 2011 pour un second mandat qui s'est achevé le 22 janvier 2018.

La présidente libérienne Ellen Johnson Sirleaf et Hillary Clinton avec sa fille Chelsea lors d'un événement sur l'égalité des genres à Washington, le 9 mars 2015.
La présidente libérienne Ellen Johnson Sirleaf et Hillary Clinton avec sa fille Chelsea lors d'un événement sur l'égalité des genres à Washington, le 9 mars 2015.

En tant que spécialiste de la finance ayant fait ses armes à la Banque mondiale, Mme Sirleaf s'est engagée, dès le début de sa présidence, à réduire la dette nationale, qui s'élevait à près de cinq milliards de dollars en 2006. En 2009, le gouvernement a racheté la dette à un taux réduit de 97%, le plus élevé jamais enregistré pour un pays en développement.

Une année plus tard, le pays a atteint le point d'achèvement de l'initiative en faveur des pays pauvres très endettés (PPTE), ce qui lui a valu un allégement de la totalité de sa dette extérieure. Pour préserver la voie de la guérison vers la normalisation économique, Mme Sirleaf s'est alors engagée à suivre une ligne de conduite salvatrice: empêcher les emprunts non viables en les limitant à 3% du PIB.

Malawi: Joyce Banda a réduit son propre salaire

Au Malawi, la vice-présidente Joyce Banda est devenue présidente le 7 avril 2012, à la suite de la mort soudaine du président Bingu wa Mutharika. Elle a dirigé le pays jusqu'au 31 mai 2014, après avoir échoué à la présidentielle face à Peter Mutharika, frère cadet du défunt président.

L'ancienne présidente du Malawi Joyce Banda au Sommet Concordia à New York, le 20 septembre 2016.
L'ancienne présidente du Malawi Joyce Banda au Sommet Concordia à New York, le 20 septembre 2016.

Fervente militante des droits des femmes, elle est la fondatrice de plusieurs associations féminines, dont l'Association Nationale des Femmes d'Affaires (NABW). Son succès l'a incitée à aider d'autres femmes à atteindre leur indépendance financière et à briser les cycles de violence et de pauvreté. En 2014, Forbes l'a désignée 40e femme la plus puissante du monde et la femme la plus puissante d'Afrique.

Au plan économique, Mme Banda a relevé plus d'un défi, notamment en lançant, dès les premiers jours de sa présidence, une offensive diplomatique pour rétablir les relations internationales du Malawi, qui avaient été considérablement détériorées sous l'administration Mutharika. En 2012, elle a par ailleurs réduit son salaire de 30% dans le cadre de mesures d'austérité.

Une scientifique au pouvoir à Maurice

Agnès Ohsan-Bellepeau a été présidente par intérim de Maurice en 2012 et Ameenah Gurib-Fakim, chercheuse reconnue en phytothérapie et biodiversité, a été présidente de juin 2015 à 2018. La nomination de cette dernière a été approuvée à l’unanimité lors d’un vote à l’Assemblée nationale. Mme Gurib-Fakim a travaillé à faire connaître le réchauffement climatique et à promouvoir de nouveaux investissements dans la science et la technologie à Maurice.

L'ancienne présidente de Maurice Ameenah Gurib-Fakim lors d'un sommet sur les questions d'eau à Budapest, Hongrie, le 29 novembre 2016.
L'ancienne présidente de Maurice Ameenah Gurib-Fakim lors d'un sommet sur les questions d'eau à Budapest, Hongrie, le 29 novembre 2016.

En tant que scientifique, elle a réalisé un travail académique hors norme et rédigé une vingtaine d'ouvrages sur la phytothérapie. En juin 2016, elle figurait dans la liste Forbes des 100 "femmes les plus puissantes du monde" et 1ère parmi les 100 femmes influentes en Afrique sur la liste 2017.

Ameenah Gurib-Fakim a démissionné de ses fonctions de présidente de Maurice le 23 mars 2018, après le 50e anniversaire des célébrations de l'indépendance, en plein milieu d'un scandale financier.

Les présidentes intérimaires

La femme d'affaires et avocate d'entreprise Catherine Samba-Panza a été présidente de transition de la Centrafrique du 23 janvier 2014 au 30 mars 2016, au cours d'une période des plus troubles et complexes de ce pays, qui peinait à sortir d'une rébellion armée en 2013 ayant chassé du pouvoir François Bozizé.

L'ancienne présidente par intérim centrafricaine Catherine Samba Panza accueillant le pape François à Bangui le 29 novembre 2015.
L'ancienne présidente par intérim centrafricaine Catherine Samba Panza accueillant le pape François à Bangui le 29 novembre 2015.

Son expérience dans les affaires a développé sa farouche opposition à la corruption. Catherine Samba-Panza est également une ardente promotrice des droits des femmes. En tant que membre éminente de l’Association des Femmes Juristes de Centrafrique, elle a œuvré pour une plus grande inclusion des femmes aux postes gouvernementaux et pour les droits des victimes de violence en Centrafrique et dans la région des Grands Lacs.

Mme Samba-Panza a tenté, à plusieurs reprise, de faire entendre raison aux milices armées, à commencer par cette première déclaration devenue célèbre: "J'appelle mes enfants, en particulier les anti-balaka, à baisser les armes et à arrêter tous les combats. Il en va de même pour les ex-Séléka. Ils ne devraient pas avoir peur. Je ne veux plus entendre parler de meurtres et assassinats. A partir d'aujourd'hui, je suis la présidente de tous les Centrafricains, sans exclusion."

Si son appel à des pourparlers entre les deux parties au conflit avait été bien accueilli à l'époque, aujourd'hui, plusieurs groupes armés contrôlent toujours les trois quarts du pays. Forte de ce triste constat, Catherine Samba-Panza s'est portée candidate à la présidentielle du 27 décembre 2020, remportée par le président Faustin Archange Touadéra.

Sylvie Kinigi, la rassembleuse du Burundi

Sylvie Kinigi a été Première ministre du Burundi du 10 juillet 1993 au 7 février 1994 et présidente par intérim du 27 octobre 1993 au 5 février 1994. Les aléas de la guerre civile l'on poussée à occuper les deux postes.

Après une éducation religieuses dans une école belge pour filles, Sylvie Kinigi a étudié l'économie à Bujumbura. Mariée à 19 ans à un professeur et devenue mère de quatre enfants, elle poursuivit ses études. Alors engagée en politique dans le parti au pouvoir, elle a fait changer les lois notamment à travers des mesures économiques et sociales pour les femmes. En 1991, elle est parvenue à réduire les dépenses militaires et à mettre en œuvre un programme de réforme, en tant que conseillère du premier ministre.

Après les élections de 1993, le vainqueur de la présidentielle, l'opposant Hutu Melchior Ndadaye, a nommé un cabinet multi-ethnique, avec une Première ministre Tutsi, Sylvie Kinigi, qui s'est aussitôt engagée à faire de la réconciliation sa priorité absolue.

Un pari réduit à néant quelques mois plus tard, lors de l'assassinat du président Ndadaye et de six de ses ministres, qui marquera le début de la guerre civile. Malgré le chaos, Mme Kinigi parvint à rassembler une quinzaine de ministres pour continuer à gouverner, devenant ainsi présidente par intérim.

En janvier 1994, le Parlement élit le Hutu Cyprien Ntaryamira à la présidence pour le reste du mandat de M. Ndadaye. Mme Kinigi démissionne de son poste de Première ministre lors de l'investiture de M. Ntaryamira et quitte le pays.

Rose Francine Rogombé entre deux Bongo au Gabon

Le Gabon, qui a aujourd'hui une Première ministre, a également bénéficié de l'une des dirigeantes les plus pragmatiques qui soit, Rose Francine Rogombé qui, en tant que présidente du Sénat, a exercé la fonction de présidente par intérim de juin à octobre 2009, après la mort du président Omar Bongo le 8 juin 2009, le temps de préparer les élections qui ont vu la victoire d'Ali Bongo, le fils du défunt chef de l'Etat.

Rose Francine Rogombé, assermentée chef d'État par intérim du Gabon lors d'une cérémonie au Sénat, le 10 juin 2009 à Libreville.
Rose Francine Rogombé, assermentée chef d'État par intérim du Gabon lors d'une cérémonie au Sénat, le 10 juin 2009 à Libreville.

Après avoir conduit une transition exemplaire pour l'organisation de ces élections, la "dame de fer" a repris son poste au Sénat. En reconnaissance de son travail dans la conduite du Gabon pendant l'élection présidentielle anticipée, Marcel Sandoungout, le sénateur le plus âgé à l'époque, lui a remis une médaille d'honneur à l'occasion de son retour. Lors des élections sénatoriales de décembre 2014, une autre femme, Lucie Milebou Aubusson, a été élue pour succéder à Mme Rogombé à la présidence du Sénat, le 27 février 2015.

Rose Francine Rogombé, présidente de la fondation des juristes gabonaises, secrétaire d’État à la Promotion de la Femme dans les années 1980, s'est en effet illustrée dans son parcours politique qui lui aura permis de démontrer ses compétences et qualités exemplaires lui ayant même valu le respect des opposants au régime jusqu'à son retrait de la vie politique quelques semaines avant son décès le 10 avril 2015, à Paris, à l'âge de 73 ans.

Lors de ses obsèques nationales, Laure Olga Gondjout, médiatrice de le République, a déclaré que c'était une référence pour “ses jeunes soeurs”, et a exprimé sa fierté pour son parcours. Mme Rogombé, qui a laissé derrière elle une famille nombreuse, est la mère de Madeleine Berre, actuelle ministre de l'Emploi et de l'Innovation.

La matriarche du Libéria, Ruth Perry

Ruth Perry a été présidente par intérim du Conseil d'État du Libéria du 3 septembre 1996 au 2 août 1997, à la suite de la première guerre civile. Ancienne enseignante, sénatrice et banquière, mère de sept enfants, Mme Perry a été très active dans les mouvements de la société civile tels que la Women Initiative in Liberia, Women in Action for Goodwill et l'Association of Social Services, qui cherchaient à mettre fin à la guerre civile.

Photo d'illustration du drapeau libérien.
Photo d'illustration du drapeau libérien.

Le 18 août 1996, la Communauté Economique des États de l'Afrique de l'Ouest a négocié un cessez-le-feu entre les factions belligérantes du Libéria et annoncé que Ruth Perry remplacerait Wilton Sankawulo à la présidence du Conseil d’État dans un gouvernement intérimaire.

En septembre 1996, Perry s'est rendue dans les comtés de Bomi et de Grand Cape Mount pour constater les souffrances des populations et a appelé à une aide humanitaire rapide. Elle a rallié son soutien au processus de paix libérien lors d'un discours passionné à l'Assemblée Générale des Nations Unies à New York le 9 octobre 1996; et elle a traversé le pays avant le désarmement pour exhorter les combattants à déposer les armes”, a commenté en 2002 le professeur Adekeye Adebajo, directeur de l’Institut pour la pensée et la conversation panafricaine de l’Université de Johannesburg en Afrique du Sud.

Les présidentes de quelques jours: Ivy Matsepe-Cassaburi et Carmen Pereira

Ivy Matsepe-Cassaburi a servi quelques jours en 2005 en Afrique du Sud, ainsi que Carmen Pereira en 1984 en Guinée Bissau.

Ivy Matsepe-Cassaburi a brièvement été présidente par intérim lorsque le président Thabo Mbeki et le vice-président étaient à l'extérieur du pays. Elle a ensuite été choisie comme chef de l'Etat à titre intérimaire le 25 septembre 2008 pendant 14 heures, entre la démission de Thabo Mbeki et l'entrée en fonction de Kgalema Motlanthe.

Ivy Matsepe-Cassaburi a été la première personne noire et la première femme présidente de la South African Broadcasting Corporation (SABC), média d'État. Elle a également été Première ministre de l'État Libre entre 1996 et 1999 ( 3 femmes ont occupé ce poste après elle) et ministre des Communications d'Afrique du Sud jusqu'à sa mort en 2009.

La Bissau-Guinéenne Carmen Pereira était la fille de l'un des rares avocats africains de la colonie portugaise de l'époque. Elle s'est mariée à un jeune âge et son mari et elle-même ont été impliqués dans la guerre d'indépendance de la Guinée-Bissau contre le Portugal à la suite de la vague de décolonisation dès 1958 et s'est illustrée comme leader et commandant révolutionnaire dans les années 60. Elle a servi seulement trois jours en tant que présidente par intérim en 1984. Carmen Pereira est décédée à Bissau le 4 juin 2016.

L'Éthiopienne Sahle-Work Zewde, sans grand pouvoir mais influente

Bien que le rôle de la présidente éthiopienne soit surtout cérémonial -l'essentiel du pouvoir incombant au Premier ministre Abiy Ahmed - Sahle-Work Zewde est la première femme à occuper ce poste, après avoir été élue par l'Assemblée parlementaire le 25 octobre 2018.

La présidente éthiopienne Sahle-Work Zewde devant le parlement le jour de son investiture, Addis-Abeba, 25 octobre 2018. (Reuters)
La présidente éthiopienne Sahle-Work Zewde devant le parlement le jour de son investiture, Addis-Abeba, 25 octobre 2018. (Reuters)

Sahle-Work était auparavant Représentant spécial du Secrétaire général des Nations Unies auprès de l'Union africaine. Ayant étudié à l'Université de Montpellier en France et parlant couramment le français, elle a été ambassadrice dans plusieurs pays africains et en France.

La présidente éthiopienne lance régulièrement des programmes de soutien et d'autonomisation des femmes. Le 24 janvier 2021 à Addis-Abeba, elle s'est adressée aux dirigeantes de l'initiative Amujae du Centre présidentiel Ellen Johnson Sirleaf pour les femmes et le développement. "Que vous soyez considérées comme dirigeantes dans vos communautés ou au sein du gouvernement, vous inspirerez d’autres femmes à vous rejoindre, en ajoutant de plus en plus de voix pour créer un crescendo qui ne peut être ignoré", avait-elle déclaré.

Lors d'une interview avec la VOA, elle avait confié avoir "grandi dans une famille de quatre filles. J'avais une famille incroyable, en particulier mon père, qui nous a toujours dit qu'il n'y a rien qu'une femme ou une fille ne puisse faire. Cela a été ma devise toute ma vie".

Sahle-Work Zewde avait vanté la parité du cabinet ministériel, composé de 50% de femmes: "En Éthiopie, le gouvernement a pris la décision audacieuse de placer l'égalité des genres et l'autonomisation des femmes au cœur de nos réalisations. Ma venue en est le résultat ainsi que le cabinet".

La présidente avait conclu: "Il nous incombe désormais à tous de nous assurer que l'écart est comblé, que les femmes puissent franchir les échelons et être sélectionnées à tous les postes à responsabilité."

Samia Suluhu Hassan, musulmane de Zanzibar, présidente de la Tanzanie

Après le décès de John Magufuli en Tanzanie, la vice-présidente Samia Suluhu Hassan est devenue la première femme à diriger le pays. Elle va finir le mandat de cinq ans du défunt président jusqu'en 2025.

La vice-présidente tanzanienne Samia Suluhu Hassan (D) dans la région de Tanga, le 16 mars 2021. Elle est devenue présidente après la mort de John Magufuli le 17 mars.
La vice-présidente tanzanienne Samia Suluhu Hassan (D) dans la région de Tanga, le 16 mars 2021. Elle est devenue présidente après la mort de John Magufuli le 17 mars.

Née le 27 janvier 1960 à Zanzibar, Samia Suluhu Hassan est diplômée en développement économique communautaire.

Elle a été responsable du développement au sein du gouvernement de Zanzibar et a travaillé pour le Programme alimentaire mondial.

En 2000, Mme Hassan a été nommée membre du Parlement de l'archipel par le parti présidentiel avant d'être élue à l'Assemblée nationale tanzanienne.

Cette musulmane de 61 ans a été ministre des Femmes et de la Jeunesse, du Tourisme et du Commerce à Zanzibar et ensuite ministre des Affaires de l'Union au niveau national, avant de devenir la colistière de John Mugufuli, réélu en octobre dernier.

Samia Suluhu Hassan devient l'une des deux femmes présidentes actuellement en Afrique, avec l'Ethiopienne Sahle-Work Zewde.

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    Nathalie Barge

    Après une carrière dans la communication en France et en Angleterre, Nathalie Barge a pratiqué le photojournalisme dans plus de 40 pays dont 17 en Afrique, devenant reporter de guerre indépendante. Lors de ses visites en Sierra Leone pendant la guerre civile, elle a mêlé l'écriture à ses prises de vue, relatant des témoignages de victimes et dénonçant le trafic du diamant et l'utilisation des enfants soldats. Grace à sa détermination, Nathalie est entrée dans les mines de diamants de Tongo contrôlées par les rebelles du RUF, et lors de la crise des otages onusiens en mai 2000, elle s'est rendue à Freetown, qui se vidait de ses habitants à l'approche des rebelles. Nathalie Barge a rejoint la VOA en 2008.

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