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Coup de théâtre avant la présidentielle: le candidat Karoui libéré


Nabil Karoui était détenu depuis le 23 août, dix jours avant le début de la campagne pour le premier tour de l'élection présidentielle, une arrestation qu'il a qualifiée de politique.
Nabil Karoui était détenu depuis le 23 août, dix jours avant le début de la campagne pour le premier tour de l'élection présidentielle, une arrestation qu'il a qualifiée de politique.

Le candidat à la présidentielle tunisienne Nabil Karoui a été libéré à quatre jours du second tour, un coup de théâtre au moment où les résultats officiels confirment une victoire en demi-teinte des islamistes aux législatives.

Habillé de noir, M. Karoui a été accueilli en héros dans la soirée à sa sortie de la prison de la Mornaguia, à 20 km de Tunis. Ses partisans l'ont porté sur leurs épaules avant qu'il ne quitte les lieux, en Mercedes noire, sans faire de déclaration.

"C'est une merveilleuse nouvelle, ça a été très dur sans lui", a déclaré l'un des cadres de son parti, Oussama Khelifi. "Il veut aller voir le peuple tunisien, expliquer son programme, il veut participer à ces élections et gagner".

Homme d'affaires et des médias, M. Karoui était détenu depuis le 23 août, dix jours avant le début de la campagne pour le premier tour de l'élection présidentielle, une arrestation qu'il a qualifiée de politique.

La Cour de Cassation a décidé mercredi de libérer M. Karoui, qui reste inculpé de fraude fiscale et blanchiment d'argent.

"Le mandat de dépôt contre Nabil Karoui est annulé, l'enquête se poursuit, mais il est libre", a indiqué un de ses avocats, Me Nazih Souei.

M. Karoui avait récolté 15,58% des voix au premier tour de la présidentielle, derrière le juriste Kais Saied, 18,4%.

Il lui reste deux jours pour faire campagne, durant lesquelles il est invité à participer à un débat télévisé inédit avec son adversaire vendredi soir.

- Parlement morcelé -

Cette libération a éclipsé la confirmation officielle que le parti d'inspiration islamiste Ennahdha était arrivé en tête aux législatives de dimanche avec 52 sièges sur 217, devant son principal rival, le parti de Nabil Karoui, Qalb Tounes, 38 sièges.

Le chef d'Ennahdha, Rached Ghannouchi, qui se présentait pour la première fois à une élection, a été élu député. Tout comme le frère de M. Karoui, Ghazi, qui n'a pourtant plus été vu en public depuis qu'un mandat de dépôt a été émis contre lui en août.

Ennahdha sera donc chargé de former le gouvernement, une tâche compliquée étant donné le morcellement du Parlement.

Les tractations entre les partis ont démarré dès la clôture dimanche de ces législatives coincées entre les deux tours de la présidentielle.

Ennahdha reste le principal parti du Parlement, mais il est loin des 89 sièges obtenus en 2011, et des 68 dans l'Assemblée sortante. En outre, contrairement à 2014, vu la fragmentation des forces, il lui sera difficile de trouver un partenaire de poids pour former une coalition gouvernementale, nécessitant 109 voix.

- Jeux d'alliances -

Qalb Tounes, fondé en juin autour de la personne de M. Karoui, qui a rassemblé des personnalités hétéroclites et fait campagne contre la pauvreté, effectue une entrée remarquée au Parlement. Mais "va-t-il survivre longtemps ou sera-t-il victime de ses contradictions", s'interroge l'ex-député Sélim Ben Abdesselem.

Le parti social-démocrate Attayar ("Courant démocrate") du militant des droits de l'homme Mohammed Abbou a obtenu 22 sièges, marquant une nette progression de cette formation.

Le parti vainqueur en 2014, Nidaa Tounes, a été balayé, passant de 86 à... 3 sièges.

Signe des profondes divergences qui s'annoncent, le mouvement islamo-populiste Karama de son côté a 21 sièges et le parti anti-islamiste PDL 17 sièges.

Pour atteindre une majorité, Ennahdha devra faire des concessions. Les interrogations vont bon train sur une éventuelle alliance avec Qalb Tounes, en dépit de ses promesses de ne pas s'allier à eux.

La solution d'un gouvernement de technocrates est également évoquée par nombre de commentateurs politiques, d'autant qu'Ennahdha a gardé un souvenir cuisant de l'échec de sa première expérience à la tête d'un gouvernement en 2011-13.

Pour le quotidien tunisien La Presse, "la possibilité de voir échouer toutes les tentatives de formation du prochain gouvernement n'est pas à écarter".

Mais "les partis n'ont pas intérêt à aller vers des élections anticipées", estime Selim Kharrat, de l'ONG Al Bawsala.

Pour M. Ben Abdesselem, à défaut de majorité confortable pour légiférer, "le scénario d'élections anticipées dans les quatre à six mois n'est pas à écarter".

"L'instabilité politique risque d'augmenter l'attentisme des partenaires de la Tunisie", avertit M. Ben Abdesselem, alors que la Tunisie est sous perfusion du Fonds monétaire international, qui a accordé en 2016 un prêt de 2,4 milliards d'euros sur quatre ans.

Avec AFP

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