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L'aide sociale, bouée de sauvetage des pauvres sous confinement en Afrique du Sud


Des résidents regardent depuis leur balcon des forces de sécurité fouiller un bar qu'ils pensaient être illégalement ouvert au centre-ville de Johannesburg le 30 mars 2020.
Des résidents regardent depuis leur balcon des forces de sécurité fouiller un bar qu'ils pensaient être illégalement ouvert au centre-ville de Johannesburg le 30 mars 2020.

Les poches vides comme à chaque fin de mois, Ntombi Dlamini n'a pas eu le luxe de pouvoir faire des provisions avant le confinement. Alors c'est avec un soulagement évident qu'elle est venue chercher lundi son aide sociale, avec quelques jours d'avance.

"Je suis vraiment heureuse parce que mes placards étaient vides", souffle cette grand-mère sud-africaine de 60 ans, qui élève quatre petits-enfants dans le township d'Alexandra, à Johannesburg.

"Aujourd'hui je vais pouvoir manger. Et puis acheter de la nourriture jusqu'à ce que ce coronavirus soit passé."

Plus de 17 des 57 millions de Sud-Africains vivent de l'aide sociale, la deuxième plus importante source de revenu des ménages après les salaires, selon les statistiques officielles.

Pour le gouvernement, le versement anticipé était une priorité absolue alors que le pays est entré vendredi dans une période de confinement de vingt-et-un jours pour cause d'épidémie de coronavirus, qui menace particulièrement les populations les plus pauvres.

"Nous avons entendu l'anxiété et la peur que cette pandémie suscite chez des millions de familles sud-africaines, surtout les plus vulnérables", a noté la ministre du Développement social, Lindiwe Sisulu, la semaine dernière. "Pas de panique, l'aide sociale sera payée le 30 et le 31 de ce mois."

Dans la ville portuaire de Port-Elizabeth (sud), de longues files de bénéficiaires se sont étirées toute la journée devant les points de paiement.

Une immense bousculade s'est produite dans le township de Kwazakhele, où des centaines de personnes âgées ont refusé d'observer les règles sanitaires de distance imposées par les autorités.

"On a fait la queue serrés comme ça depuis des heures, pourquoi nous en empêcher maintenant ?", s'indigne en brandissant sa canne une vieille femme qui n'a pas souhaiter révéler son identité. "On s'en fout de ce virus, on a des enfants et des petits-enfants à nourrir !"

- 'J'ai très peur' -

Un peu en retrait, Nomonde Maphai, 87 ans, observe le spectacle avec circonspection. "J'ai utilisé mon dernier sac de farine de maïs hier", s'inquiète-t-elle, déterminée à ne pas rentrer chez elle les mains vides.

La distribution s'est déroulée de façon nettement plus ordonnée à Johannesburg, où les bénéficiaires ont été autorisés à venir chercher leurs billets dans les points de distribution des supermarchés avant que ne se forment les files d'attente des autres clients.

Mais sitôt leur liasse de billets en poche, ils n'ont eu d'autre choix que de rejoindre la cohue des supermarchés des quartiers pauvres, pris d'assaut lundi pour la troisième journée consécutive depuis le début du confinement malgré la présence de la police et de l'armée.

"Vous voyez ma jambe, je ne peux même pas parler tellement c'est douloureux", grimace une personne handicapée de 64 ans, Christine Mhiongo, en passant devant une caisse avec un sac de pattes de poulet congelées qu'elle vient d'arracher d'un rayon.

"C'est vraiment difficile de faire ses courses et de se déplacer", soupire en écho Grace, 61 ans. "La semaine dernière, je n'ai même pas pu atteindre le centre commercial tellement il y a avait de monde."

Agés, parfois handicapés, toujours vulnérables, les "anciens" du township d'Alexandra savent qu'ils sont les proies favorites du Covid-19, qui a déjà contaminé plus de 1.200 personnes dans le pays et fait deux morts, selon le dernier bilan officiel publié dimanche.

"J'ai très peur du coronavirus", avoue Leti Maluleka, 57 ans, qui vit entassée avec dix autres personnes dans une cabane d'Alexandra. "Je me lave les mains, mais c'est tout ce que je peux faire", lâche-t-elle, "on est tellement nombreux à la maison que si l'un d'entre nous est infecté, on le sera tous très rapidement".

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