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Les législatives, "retour d'une paix durable" entre Ivoiriens?


Michel Gbagbo, fils de l'ancien président ivoirien Laurent Gbagbo, porte un t-shirt avec le portrait de son père lors d'une commémoration de son arrestation, à Abidjan, 11 avril 2017.
Michel Gbagbo, fils de l'ancien président ivoirien Laurent Gbagbo, porte un t-shirt avec le portrait de son père lors d'une commémoration de son arrestation, à Abidjan, 11 avril 2017.

Le scrutin législatif  "marque le retour de Laurent Gbagbo et de son organisation politique dans le jeu politique institutionnel", estime son fils aîné Michel Gbagbo, faisant référence aux élections qui se tiendront le samedi 6 mars 2021.

En Côte d'Ivoire, les partisans de l’ancien président Laurent Gbagbo, réunis au sein d’une coalition, prendront part aux prochaines législatives. C'est une première depuis son arrestation en 2011 et son jugement à La Haye pour son rôle présumé dans la crise post-électorale.

Le Front populaire ivoirien pro-Gbagbo (FPI), qui a boycotté toutes les élections depuis dix ans, est le moteur d'une coalition de mouvements dont Ensemble pour la démocratie et la souveraineté, qui présente des candidats dans la plupart des circonscriptions aux législatives du 6 mars.

Michel Gbagbo dit voir en cela "le retour d'une vie démocratique apaisée et une paix durable". Il est candidat dans la commune de Yopougon à Abidjan, ancien fief du FPI, rapporte l'AFP.

Le retour de la paix va au-delà des élections

Tel n'est pas l'avis d'André Silver Konan, analyste politique, écrivain et journaliste ivoirien, pour qui "les élections législatives ne sont pas les gages de réconciliation", que VOA Afrique a interviewé depuis Abidjan.

"La réconciliation va au-delà des élections. Les gages de réconciliation prioritairement, c'est la justice et la fin de l'impunité. Malheureusement, par rapport à ce que nous voyons en Côte d'Ivoire, nous n'e sommes pas encore à ce stade où on met fin à l'impunité", regrette le patron de presse.

Plusieurs élections ivoiriennes ont été émaillées de violences. La crise post-électorale de 2010-2011 avait fait 3.000 morts. En 2018, il y avait eu au moins 5 morts.

Une quinzaine de personnes sont mortes en août 2020 dans des violences survenues dans le sillage de l'annonce de la candidature controversée du président Alassane Ouattara à un troisième mandat.

Aucune justice pour les victimes

"Il n'y a eu qu'un procès, qui a d'ailleurs été bâclé. C'est celui de l'ex première dame, Simone Gbagbo", déplore André Silver Konan.

Simone Ehivet Gbagbo, l'ex-première dame ivoirienne (2000-2010), avait été condamnée à une peine de 20 ans de prison pour "atteinte à la sûreté de l'Etat" en 2015.

Elle avait été aussi poursuivie pour crimes contre l'humanité pendant la crise post-électorale, notamment pour son implication présumée dans des tirs d'obus sur le marché d'Abobo, un quartier d'Abidjan favorable à Alassane Ouattara, rival de Laurent Gbagbo à la présidentielle de 2010 et actuel président de la Côte d'Ivoire. Elle avait été également jugée pour sa participation présumée à une cellule qui organisait des attaques menées par des milices et des militaires proches du régime.

Fin mars 2017, à la surprise générale, la Cour d'assises d'Abidjan l'avait acquittée de crimes contre l'humanité pendant la crise post-électorale; refusant de suivre le procureur qui réclamait la prison à vie contre l'ex-première dame.

Mme Gbagbo n'avait pas été libérée après son acquittement, car elle purgeait déjà sa peine de 20 ans de prison.

Le 26 juillet 2018, la Cour Suprême ivoirienne a cassé le jugement d'acquittement dont avait bénéficié l'ex-première dame Simone Gbagbo au terme de son procès en assises et demandé son renvoi devant une nouvelle cour.

Le 6 août, le président Ouattara déclaré avoir signé une ordonnance amnistiant 800 détenus poursuivis pour des crimes en lien avec la crise post-électorale de 2010-2011 et des infractions contre la sûreté de l’État commises après son investiture, le 21 mai 2011. Parmi eux... l’ancienne Première dame, Simone Gbagbo.

Laurent Gbagbo avait été lui, transféré et détenu depuis 2011 à La Haye par la Cour pénale internationale, qui le jugeait depuis 2016 pour des crimes contre l'humanité présumés pendant la crise de 2010-2011.

Sept ans après son transfèrement à La Haye, l'ex-président ivoirien a été acquitté le 15 janvier 2019 par la CPI, ainsi que son ancien ministre Charles Blé Goudé.

Depuis lors, il vit en Belgique et attend l'autorisation des autorités d'Abidjan pour rentrer dans son pays.

D'ailleurs, son retour et celui des exilés figurent au nombre des blocages au dialogue politique en Côte d'Ivoire.

"Tout ce que nous voulons demander à Ouattara, c'est qu'il ramène Gbagbo au pays, de la même façon dont il l'en avait fait partir", réclamait d'ailleurs Nenin Elisée, le 30 août 2020, lors d'une manifestation des Ivoiriens à Washington aux Etats-Unis contre un 3e mandat du président Ouattara.

Le parti de M. Gbagbo a rejoint la coalition EDS, qui a passé une alliance électorale avec le principal parti d'opposition, le Parti démocratique de Côte d'Ivoire (PDCI) de Henri Konan Bédié, ancien président et ex-allié du chef de M. Ouattara.

L'objectif de cette alliance, selon M. Bédié et M. Gbagbo, est de peser à l'Assemblée nationale pour empêcher "la consolidation d'un pouvoir absolu" d'Alassane Ouattara et son parti, le Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix (RDPH) qui y détient la majorité absolue.

L'alliance FPI - PDCI, pourra-t-elle remporter la majorité à l'Assemblée nationale? L'analyste André Silver Konan est un peu dubitatif.

"Le parti au pouvoir part favori car il a pu aligner des candidats sur l'ensemble du territoire, alors que l'opposition, toutes tendances réunies, n'a pas pu trouver le nombre des candidats nécessaire pour couvrir toutes les circonscriptions, notamment dans l'extrême nord du pays", explique-t-il au micro de VOA Afrique.

Toutefois, il estime que les dés ne sont pas encore jetés.

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