La nouvelle loi sur l'immigration votée en France

Le Premier ministre français, Edouard Philippe, lors d'une séance de questions au gouvernement à l'Assemblée nationale française, à Paris, le 18 avril 2018.

Le projet de loi "asile-immigration" a finalement été voté dans la nuit de dimanche à lundi par les députés français, après une semaine de vive opposition, jusque dans les rangs du parti du président Emmanuel Macron.

Après 61 heures de joutes enflammées, le projet de loi "pour une immigration maîtrisée, un droit d'asile effectif et une intégration réussie" a été voté en première lecture par 228 voix contre 139 et 24 abstentions.

Les Républicains (droite) et toute la gauche ont voté contre, tout comme les députés FN (extrême droite).

Pour la première fois depuis l'élection en 2017 d'Emmanuel Macron, un député de son parti LREM, l'ex-socialiste Jean-Michel Clément, a voté contre. Menacé d'exclusion par les instances du parti, il a préféré annoncer son départ du groupe LREM.

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Quatorze autres députés macronistes se sont abstenus. C'est peu comparé aux 312 élus LREM à l'Assemblée nationale, chambre basse française, mais c'est un signe de la "fébrilité" de la majorité, selon Le Figaro, quotidien de droite.

"L'immigration est un sujet sur lequel la position ne va pas de soi en macronie. Or la fébrilité d'une majorité est toujours un aveu de faiblesse", écrit le journal.

Au Sénat maintenant de prendre la suite en juin, où la majorité de droite a déjà promis de "l'amender considérablement".

Le ministre de l'Intérieur, Gérard Collomb, a salué l'adoption d'un "texte juste". Dès l'ouverture des débats il y a une semaine, il avait plaidé "l'urgence à réagir" pour limiter "une immigration massive" et "en même temps" garantir le droit d'asile, "sacré" en France.

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Le texte vise à réduire à six mois, contre onze aujourd'hui, l'instruction de la demande d'asile, afin d'accélérer l'intégration. Parallèlement, il vise à faciliter l'expulsion des déboutés.

"On ne peut pas prendre toute la misère du monde", a récemment déclaré le président Emmanuel Macron. La France a enregistré un peu plus de 100.000 demandes d'asile en 2017, un record, et a accordé l'asile à 36% des demandeurs.

'Dangereux'

Toujours sensible, la question de l'immigration - le pays comptait près de 6 millions d'immigrés en 2014 - a été au centre de la campagne présidentielle l'an dernier, marquée par la qualification pour le deuxième tour de la cheffe de l'extrême droite, Marine Le Pen.

Tandis que droite et extrême droite ont dénoncé le "laxisme" d'une "petite loi" et évoqué le spectre d'une régularisation des clandestins, la gauche est restée vent debout contre une loi "inhumaine", s'opposant en particulier au doublement de la durée maximale de rétention, portée à 90 jours, avec la possibilité maintenue "d'enfants derrière les barbelés".

Le projet de loi est "dangereux", a estimé Amnesty International France, qui dénonce les "occasions ratées (..) de mettre enfin un terme à la rétention des enfants ou encore d'assurer une protection digne" aux réfugiés.

L'ONG n'est pas non plus satisfaite de l'assouplissement, adopté par l'Assemblée dans un souci d'apaisement, du "délit de solidarité" sanctionnant les personnes venant en aide aux migrants.

Ce délit vivement contesté pénalise des citoyens venant en aide aux migrants nécessitant des secours. L'article prévoit dorénavant des "exemptions", notamment lorsqu'il s'agit de donner soins, hébergement ou nourriture.

"La nouvelle liste des immunités et les conditions requises pour ne pas être poursuivi laisseront tout de même une épée de Damoclès au-dessus des militants, citoyens et organisations qui agissent pour le respect des droits humains", estime Cécile Coudriou, présidente d'Amnesty International France.

"Hormis de rares avancées (...), cette loi reste essentiellement tournée vers la répression et la restriction des droits des personnes étrangères", a estimé la Cimade, une association d'aide aux migrants

"Le texte reste déséquilibré, malgré quelques améliorations", a jugé le responsable de France Terre d'Asile, Pierre Henry. Selon lui, la loi "ne répond pas à la crise des instruments européens", notamment sur le "règlement Dublin et l'absence de politique de convergence européenne".

Avec AFP