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Le retour du "crocodile" Emmerson Mnangagwa au Zimbabwe


Le vice-président zimbabwéen déchu Emmerson Mnangagwa
Le vice-président zimbabwéen déchu Emmerson Mnangagwa

Il est surnommé le "crocodile" pour son caractère impitoyable. Longtemps en tête de la course à la succession du président du Zimbabwe Robert Mugabe avant d'en être sèchement écarté, Emmerson Mnangagwa n'a jamais renoncé à lui succéder.

Vice-président depuis 2014, ce vétéran de la guerre d'indépendance a été limogé la semaine dernière, victime des ambitions politiques de la Première dame Grace Mugabe.

Sa déchéance n'aura duré que quelques jours. Contraint à l'exil, M. Mnangagwa avait promis de revenir dans son pays pour diriger la Zanu-PF, le parti au pouvoir.

Il est rentré jeudi dans son pays avec le soutien de l'armée, qui a pris le contrôle du pays dans la nuit de mardi à mercredi pour dénoncer son éviction.

Son nom revient désormais avec insistance pour diriger la transition politique qui s'annonce, si Robert Mugabe accepte de rendre les clés du pays qu'il dirige depuis trente-sept ans.

Ce scénario constituerait un aboutissement pour ce fidèle serviteur du régime, aux rêves de pouvoir longtemps contrariés.

Dès l'indépendance du Zimbabwe en 1980, Robert Mugabe a mis Emmerson Mnangagwa sur orbite en lui confiant d'importants postes ministériels (Défense, Finances...).

En 2004, il est victime une première fois de son ambition. Accusé d'intriguer pour le poste de vice-président, il perd son poste de secrétaire à l'administration de la Zanu-PF. Et sa rivale Joice Mujuru remporte la course.

Ce n'est finalement qu'en 2014 qu'il accède à la vice-présidence, lorsque Joice Mujuru est victime de la campagne de dénigrement orchestrée par, déjà, Grace Mugabe.

M. Mnangagwa accède alors au statut de dauphin potentiel d'un "camarade Bob" à la santé de plus en plus fragile.

Né le 15 septembre 1942 dans le district de Zvishavana, dans le sud-ouest d'un Zimbabwe alors britannique, le jeune Emmerson a grandi en Zambie.

Fils d'un militant anticolonialiste, il rejoint en 1966 les rangs de la guérilla indépendantiste contre le pouvoir colonial. Arrêté, il échappe à la peine capitale et purge dix ans de prison.

- 'Détruire et tuer' -

M. Mnangagwa continue depuis ces années de lutte à entretenir des liens très étroits avec les militaires du pays.

Le "crocodile" ne verse guère de larmes et n'est connu que pour sa dureté. Il explique que ses années de guérilla lui ont appris à "détruire et tuer".

Alors chef de la Sécurité nationale, il dirige en 1983 la brutale répression des forces de l'ordre dans les provinces dissidentes du Matabeleland (ouest) et des Midlands (centre). Son bilan n'a jamais été confirmé mais elle aurait fait environ 20.000 morts.

En 2008, il est en charge des élections auprès du président et dirige les fraudes et les violences qui permettent à Robert Mugabe de conserver le pouvoir malgré sa défaite au premier tour.

Son zèle lui vaudra des sanctions américaines et européennes. Mais aussi le poste stratégique de chef du Commandement des opérations de tout l'appareil sécuritaire.

Takavafira Zhou, analyste politique à l'université d'Etat de Masvingo (sud), décrit Emmerson Mnangagwa comme un "jusqu'au-boutiste par essence".

Il serait aussi l'un des hommes les plus riches d'un régime critiqué pour sa corruption, avec des intérêts dans les mines d'or.

Un câble diplomatique américain datant de 2008, révélé par WikiLeaks, évoquait "un patrimoine extraordinaire", en partie amassé lorsqu'il a aidé le président Laurent Kabila à combattre les rebelles en République démocratique du Congo (RDC).

Après son éviction de la vice-présidence la semaine dernière, il a spectaculairement rompu avec Robert et Grace Mugabe en les accusant de se prendre pour des "demi-dieux" et en dénonçant un président "qui pense être en droit de diriger jusqu'à sa mort".

Mais l'hypothèse de son retour au pouvoir inquiète ceux qui n'ont pas oublié son passé.

"Personne ne veut d'une transition qui verrait un tyran non élu remplacé par un autre", a résumé le ministre des Affaires étrangères britannique Boris Johnson.

Avec AFP

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