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Les mairies rurales à l'écoute de la colère des "gilets jaunes" en France


Un gilet jaune manifeste vers Marseille en France le 9 décembre 2018.
Un gilet jaune manifeste vers Marseille en France le 9 décembre 2018.

Des milliers de contributions recueillies dans des "cahiers de doléances": pendant un mois, les mairies rurales de France ont reçu les revendications de la population lors d'une rare consultation destinée à répondre à la colère des "gilets jaunes".

En référence à la Révolution française, où en 1789 les Français avaient consigné leurs plaintes et leurs voeux dans des "cahiers de doléances", des registres ont été mis à la disposition des citoyens dans les mairies début décembre.

Au moins 5.000 petites villes françaises ont participé à cette opération lancée par l'Association des maires ruraux de France (AMRF) à la suite du mouvement des "gilets jaunes".

Mobilisés depuis mi-novembre, ces derniers, des Français modestes protestant contre la politique sociale et fiscale du gouvernement, reprochent notamment à la classe politique française d'être déconnectée de la population.

En tête des préoccupations inscrites dans ces cahiers se trouvent le pouvoir d'achat, "l'injustice fiscale" et la diminution de l'offre de services publics en milieu rural.

Les résultats de cette consultation inédite doivent à présent alimenter le "grand débat", cette concertation nationale voulue par le gouvernement pour répondre à la plus grave crise politique essuyée par le quinquennat d'Emmanuel Macron depuis son élection en mai 2017.

"Nous, les maires des petites communes, ça fait longtemps qu'on a tiré la sonnette d'alarme. On voit bien que depuis trois-quatre ans les gens n'y arrivent plus", affirme Paul Ryckelynck, maire de Haveluy, une petite ville du Nord de la France de 3.100 habitants.

"Arrivée au 10 du mois, je n'ai plus de quoi nourrir, habiller les enfants et encore moins de faire Noël", lit Fabien Thiémé, le maire communiste de Marly (Nord), où environ 180 messages ont été écrits dans le cahier de doléances.

"C'est poignant ! Mes administrés disent +trop c'est trop+. Ils sont asphyxiés par les charges, par l'augmentation de tout ce qui touche au quotidien, l'eau, le gaz, l'électricité, le carburant".

- Si rien ne se passe, "ça va faire mal" -

Les doléances fusent parfois dans toutes les directions: diminuer les taxes, remplacer le Sénat, taxer les revenus du capital, lutter contre les lobbies, rétablir des services de proximité, augmenter le nombre de fonctionnaires dans les hôpitaux et les maisons de retraite ... Avec la fracture numérique en ligne de mire: "supprimer toutes les démarches administratives par internet".

"Cette expression, il faut qu'elle soit suivie d'effet, parce que si ça repart comme avant, alors là ça va faire mal", prévient M. Eichenlaud, maire de Montcel, une ville de 1.043 habitants en Savoie (Est).

La participation a toutefois été très inégale sur le territoire. Comme à Lesterps, dans l'Ouest, où le maire de cette commune de 550 habitants n'a recueilli aucune contribution écrite. "Pour beaucoup de personnes, passer de l'oral à l'écrit ce n'est pas évident. On préfère échanger oralement, dans la rue, dans les commerces ou au café", explique le maire Daniel Soupizet.

Une synthèse des cahiers doit être remise aux présidents du Parlement puis au chef de l'Etat.

Sollicités pour le "grand débat" à venir, les maires entendent s'en tenir à un rôle de "facilitateur", en mettant à disposition des salles municipales, et attendent des précisions du chef de l'Etat dans une lettre qu'il doit adresser aux Français mi-janvier.

Mais sur le terrain, le "grand débat" suscite beaucoup de méfiance. "Mes concitoyens sont pessimistes, ils disent +ça ne sert à rien+, +c'est de l'enfumage+. Ils sont très méfiants vis-à-vis des politiques", souligne Paul Ryckelynck.

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