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Le parti de Maduro prend les commandes du Parlement au Venezuela


Le président vénézuélien Nicolas Maduro participant à une réunion avec des membres de l'Assemblée nationale constituante (ANC) au Palais législatif fédéral de Caracas le 29 septembre 2020. (Photo publiée par la présidence vénézuélienne)
Le président vénézuélien Nicolas Maduro participant à une réunion avec des membres de l'Assemblée nationale constituante (ANC) au Palais législatif fédéral de Caracas le 29 septembre 2020. (Photo publiée par la présidence vénézuélienne)

Le parti du président vénézuélien Nicolas Maduro a pris les commandes mardi du Parlement, unique institution jusqu'alors aux mains de l'opposition qui a réuni une assemblée parallèle car elle ne reconnaît pas le verdict "frauduleux" des urnes. 

Malgré une abstention record de 70% et le rejet des résultats par une grande partie de la communauté internationale, les députés du Parti socialiste unifié du Venezuela (PSUV) et de ses alliés occupent désormais 256 des 277 sièges du Parlement unicaméral.

Entourés d'une forte présence policière, ils sont entrés mardi dans l'hémicycle en brandissant des portraits du héros révolutionnaire Simon Bolivar (1783-1830) et du défunt président vénézuélien Hugo Chavez (1999-2013), qui ont été accrochés sur les murs de l'enceinte.

"Nous sommes contraints à l'exorcisme" après cinq ans de législature de l'opposition, a ironisé l'ex-ministre de la Communication, Jorge Rodriguez, élu par acclamation pour un an à la tête de l'Assemblée nationale. "Ce matin, nous avons versé de l'eau bénite dans tous les coins", a-t-il raillé.

"Il ne peut y avoir de pardon dans l'oubli", a-t-il ajouté, dans une allusion à l'ancienne mandature qui avait vu en janvier 2019 l'opposant Juan Guaido se proclamer président par intérim en invoquant la Constitution et encourager une séries de sanctions économiques contre le Venezuela.

Parallèlement, l'Assemblée constituante, composée de fidèles du pouvoir et destinée depuis 2017 à neutraliser les décisions des parlementaires d'opposition, a cessé mardi ses fonctions.

Nicolas Maduro s'est dit "très optimiste" après cet appel pour "un dialogue inclusif, avec tout le pays".

Reconnu par plus de cinquante pays comme président par intérim du Venezuela, le chef de file de l'opposition Juan Guaido a promis de résister et d'assurer la continuité des travaux des parlementaires élus en 2015 jusqu'à l'organisation d'"élections présidentielle et législatives libres".

Mardi, le Parlement sortant s'est réuni à Caracas dans un lieu non divulgué "pour raison de sécurité" et Juan Guaido a de nouveau prêté serment en tant que président de l'Assemblée.

"Mon premier message s'adresse à Maduro. Nous sommes ici debout", a-t-il déclaré lors de l'événement diffusé sur Internet, "malgré ce spectacle dans le Palais législatif kidnappé par une dictature que personne ne reconnaît".

Cette "continuité constitutionnelle de l'Assemblée nationale élue en 2015 répond à la situation atypique que nous vivons dans une dictature" et vise à "défendre notre peuple, la Constitution et l'Assemblée", a-t-il ajouté.

"Soutien international" -

Cependant, selon le politologue Jesus Castillo-Molleda, cette assemblée parallèle "n'a pas de fondements légaux constitutionnels". Mais pour le directeur de l'institut de sondage Datanalisis, Luis Vicente Leon, l'opposition et Juan Guaido espèrent par ce biais continuer à recevoir "un soutien international".

Le secrétaire d'Etat américain, Mike Pompeo, a ainsi immédiatement annoncé dans un communiqué que les Etats-Unis ne reconnaissaient pas le nouveau Parlement issu "d'élections frauduleuses" et continuaient de considérer Juan Guaido comme le "président légitime" du pays.

La Colombie, le Brésil, l'Uruguay, le Costa Rica et le Panama ont également indiqué ne pas reconnaître le nouveau Parlement. "Nous continuerons de travailler" avec M. Guaido, a tweeté le ministre brésilien des Affaires étrangères, Ernesto Araujo.

Le président américain sortant Donald Trump a été le principal allié de M. Guaido. Sous son administration, la Maison Blanche a imposé de lourdes sanctions économiques au Venezuela dont un embargo pétrolier pour tenter d'évincer Nicolas Maduro.

De son côté, le dirigeant socialiste a déjà lancé plusieurs appels au dialogue à l'adresse du futur pensionnaire de la Maison Blanche, le démocrate Joe Biden.

Le groupe de Lima, composé de pays qui ne reconnaissent pas le Nicolas Maduro, a affirmé ce mardi, dans une déclaration signée par le Brésil, la Colombie, le Canada et neuf autres pays de la région, qu'ils ne reconnaissent pas le régime chaviste et soutiennent Juan Guaido.

"Nous appelons la communauté internationale à se joindre à la non-reconnaissance et au rejet de cette Assemblée nationale illégitime et à soutenir les efforts pour le rétablissement de la démocratie" au Venezuela, indique le texte.

Dans un pays étouffé par une inflation galopante (+4.000% sur un an), paralysé dans d'interminables files d'attente pour faire le plein d'essence, excédé par les coupures de courant et les pénuries d'eau, Juan Guaido a perdu le soutien populaire dont il jouissait en 2019.

La consultation symbolique qu'il a organisée après les élections boycottées de décembre n'a pas réussi à ranimer une opposition déçue de son incapacité à renverser Nicolas Maduro, largement soutenu par l'armée.

Pour le directeur du Centre d'études politiques de l'Université catholique Andrés Bello, la dualité présidentielle ne devrait "pas se poursuivre longtemps". D'autant que M. Maduro "va utiliser" les mesures de restrictions liées à la pandémie de Covid-19 pour étouffer toute manifestation, comme il l'a fait en 2020.

Des menaces d'arrestation planent désormais au-dessus de M. Guaido qui, dans un récent entretien à l'AFP, avait exclu tout exil.

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