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La Côte d'Ivoire investit dans l'igname et le manioc plutôt que blé


Le ministre ivoirien de l'Agriculture et du Développement rural, Kobenan Kouassi Adjoumani prononce un discours le 22 novembre 2019 à Abidjan, lors de l'ouverture de la 5e édition du Salon international de l'agriculture et des ressources animales
Le ministre ivoirien de l'Agriculture et du Développement rural, Kobenan Kouassi Adjoumani prononce un discours le 22 novembre 2019 à Abidjan, lors de l'ouverture de la 5e édition du Salon international de l'agriculture et des ressources animales

Pour que "l'Afrique nourrisse les Africains", elle doit diversifier ses cultures, transformer les produits localement et nouer des accords régionaux, a déclaré à l'AFP le ministre ivoirien de l'Agriculture, Kobenan Kouassi Adjoumani, venu à Paris au Salon de l'agriculture.

Question: Comment la Côte d'Ivoire peut-elle réduire sa dépendance aux importations alimentaires?

Réponse: La crise en Ukraine n'a pas fait que des dégâts: elle nous a donné des idées pour que nous puissions nous-mêmes produire pour notre souveraineté alimentaire. Nous avons eu des difficultés pour nous approvisionner en intrants de première nécessité, en blé (acheminé notamment de Russie ou d'Ukraine, NDLR). Nous avons donc décidé de dire qu'à la place, nous pouvions produire du manioc, dont la farine sert à faire du pain.

Notre économie de base, c'est notre agriculture: elle représente 22% du PIB du pays. Nous produisons du café, du cacao, de l'hévéa qui sont des cultures de rente mais aujourd'hui, nous avons décidé de faire de la diversification agricole. Nous sommes premiers producteurs de cacao, de noix de cajou, de noix de cola, mais ce ne sont pas des produits que nous consommons, d'où notre politique pour développer la production vivrière et maraîchère.

Nous voulons nous concentrer sur les productions locales: l'igname, le manioc, le maïs. Avec notre programme de relance agricole, nous avons commencé par restaurer les instruments de production décimés par les crises. Mais on s'est dit qu'il fallait aller au-delà, et améliorer la conservation et la transformation des aliments. Une grande partie de notre production n'arrive pas sur le marché à cause des pertes post-récolte, faute de centres de stockage et d'usines de transformation.

Q: Comment améliorer la transformation, notamment pour le cacao?

R: La Côte d'Ivoire représente 40% de la production mondiale. Avec le Ghana (20% de la production), nous avons décidé de parler d'une seule voix: pour que les producteurs soient mieux rémunérés, il faut transformer nos produits au plan local.

Quand elle a lieu en Côte d'Ivoire, où huit millions de personnes dépendent de la culture du cacao, la transformation en beurre ou en poudre apporte une plus-value aux producteurs: ils sont rémunérés 25.000 à 30.000 francs CFA le kilogramme de cacao transformé (près de 40 euros), contre 900 francs CFA le kg brut (soit 1,30 euro).

Nous disons donc aux multinationales de venir investir en Côte d'Ivoire, de construire des usines pour transformer les fèves en chocolat, ce qui réduira aussi les coûts de transport vers l'Europe. Et si elles payent les producteurs de manière régulière, les gens n'entameront pas les forêts.

Q: Comment les pays d'Afrique travaillent-ils ensemble pour assurer la production des denrées directement sur le continent?

R: L'Afrique doit nourrir l'Afrique, et pour cela, il faut que des programmes soient établis. Certains pays ont des difficultés à produire, à cause des incidents climatiques ou du manque de pluie. En Côte d'Ivoire, on peut produire davantage, et le surplus peut être acheminé dans les pays limitrophes.

Nous avons décidé de travailler ensemble, et la Banque africaine de développement a annoncé un financement de dix milliards de dollars (fin janvier, pour que l'Afrique devienne son principal fournisseur de denrées alimentaires, NDLR). En Côte d'Ivoire, ces fonds ne serviront pas à financer des produits de rente, mais les cultures vivrières et maraîchères.

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