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Suspension de la prise en charge des démunis dans les hôpitaux gabonais


L’entrée du CHU de Libreville, le 8 mai 2022.
L’entrée du CHU de Libreville, le 8 mai 2022.

C’est incontestablement le fait social le plus marquant au Gabon: depuis une semaine, les hôpitaux publics conditionnent la prise en charge des patients dits économiquement faibles par le paiement des frais de consultations ou d’hospitalisation.

Devant les urgences du centre hospitalier universitaire de Libreville, le bruit de gyrophare d’une ambulance signale l’évacuation d’un homme sauvagement agressé dans la nuit par des délinquants qui écument la capitale gabonaise. La victime a été secourue depuis son quartier par des passants.

"Il allait mourir sur place. Les blessures ne sont pas prises en charge par l’assurance", avance l’un des témoins de la scène.

L’infortuné, qui saigne abondamment de la tête, vient d’être conduit au service de traumatologie pour les premiers soins. Pour y parvenir, il a dû débourser près de 10.000 francs CFA.

Un autre patient, Clément Oboulou, n'est pas si chanceux : atteint d’une pneumonie, il n'a toujours pas été vu par un médecin dans cet hôpital public. L'intéressé, quoiqu'assuré, est sans le sou. Or, pour bénéficier d’une prise en charge rapide, il faut bien payer la consultation.

"J’essaie de voir le médecin pour lui dire que moi je n’ai rien comme moyens, et je fais comment? Lui me dit que comme la CNAMGS est bloquée, il me faut payer tout au moins 4000 francs CFA au lieu de 7.500 pour la consultation. Avec la CNAMGS, ça se paie pas. Et là on m’exige de payer une consultation sans compter l’ordonnance qui en sortira", confie-t-il à VOA Afrique.

La CNAMGS, ou Caisse nationale d’assurance maladie et de garantie sociale, est une entité gouvernementale chargée de gérer un programme d'assurance maladie destiné à couvrir les individus et les ménages à faibles revenus.

Héritage d'Omar Bongo Ondimba

C'est en décembre 2008 que les premières cartes d'assurance sont délivrées aux "Gabonais économiquement faibles" sous l'égide de la CNAMGS, lit-on sur le site web de l'agence. La cérémonie est présidée par nul autre qu'Omar Bongo Ondimba, le père et prédécesseur de l'actuel chef de l'État, Ali Bongo Ondimba.

A sa mort moins d'un an après, le projet est poursuivi par l'actuel président, qui supervise son expansion. Dès 2011, quelque 83 000 fonctionnaires sont inscrits à la CNAMGS, selon le portail d'informations Gabonews. Viennent ensuite les travailleurs du secteur privé: en 2013, ils sont plus de 600.000 à être recensés, selon un rapport cité par Infos Plus Gabon, un média en ligne.

Le programme d'assurance maladie s'avère être un énorme succès. En 2012, il remporte le "grand prix de l'Emergence", lors d'une compétition nationale entre des organismes publics gabonais.

Clément Oboulu brandissant sa fiche d’assuré de la caisse d’assurance maladie, à Libreville, le 8 mai 2022.
Clément Oboulu brandissant sa fiche d’assuré de la caisse d’assurance maladie, à Libreville, le 8 mai 2022.

"L’hôpital va mourir"

Au fil des ans cependant, les problèmes apparaissent: lenteurs administratives, incohérences de trésorerie, disputes syndicales...

Aujourd'hui, comme tant d’autres usagers économiquement faibles, Clément Oboulu fait les frais d’une décision prise par la Coalition des syndicats du secteur santé au Gabon. Elle a annoncé la suspension, jusqu’à nouvel ordre, des feuilles de soin et bons d’examen de la CNAMGS dans les structures publiques.

"Il faut que nous puissions travailler et pour travailler il faut de l’argent. Or si nous n’avons pas cet argent l’hôpital va mourir. Et si dans notre hôpital qui est la vitrine de la médecine au Gabon, on ne peut pas faire de la radio parce qu’il y a pas de clichés, si on ne peut pas faire d’examen sanguin parce qu’il n y a pas de réactif, comment nous faisons ?", a déclaré Dr. Christiane Mengue M’Asseko, porte- parole de la coalition.

Contacté par VOA Afrique pour réagir sur cette situation, le ministère gabonais de la Santé n’a pas donné suite à la démarche. Dans un courrier, la coalition rappelle avoir, le 25 avril, saisi le Premier ministre pour signifier les difficultés des structures de santé à fonctionner correctement et offrir des soins de qualité aux populations.

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