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Ethiopie: deux employés humanitaires tués en région Amhara, en proie à des troubles


Le coordinateur humanitaire régional adjoint des Nations Unies David Carden (L) et Sanjana Quazi (C), qui dirige le Bureau des Nations Unies pour la coordination des affaires humanitaires
Le coordinateur humanitaire régional adjoint des Nations Unies David Carden (L) et Sanjana Quazi (C), qui dirige le Bureau des Nations Unies pour la coordination des affaires humanitaires

Deux employés d'une organisation humanitaire ont été tués dimanche en Amhara, région du nord de l'Ethiopie en proie depuis plusieurs jours à des troubles et où la colère contre le gouvernement fédéral n'est pas retombée mardi.

A Bahir Dar, capitale administrative de l'Amhara, "des manifestants ont bloqué la route avec des pneus enflammés et des pierres", a raconté mardi à l'AFP un habitant, disant avoir "entendu des tirs dans la ville" sans pouvoir les localiser précisément.

Des manifestations et blocages de routes en Amhara sont signalés depuis que le gouvernement fédéral a entamé jeudi le processus de désarmement et de réaffectation dans l'armée fédérale ou la police des membres des unités militaires dont disposent certaines régions.

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Ces "forces spéciales", comme elles sont appelées en Ethiopie, ont été mises sur pied hors de tout cadre légal depuis une quinzaine d'années par certains des onze Etats régionaux, tracés le long de lignes linguistiques et culturelles dans un pays comptant plus de 80 peuples et 120 millions d'habitants.

"Chuol Tongyik, un responsable de la sécurité, et Amare Kindeya, un chauffeur, ont été tués par balles dans un véhicule du CRS dans la région de l'Amhara" dimanche, dans des circonstances "inconnues", a annoncé dans un communiqué le Catholic Relief Services, ONG catholique basée aux Etats-Unis qui, selon son site internet, travaille en Ethiopie depuis près de 60 ans.

Echanges de tirs

Le comité international de la Croix-Rouge (CICR) s'est dit inquiet mardi dans un tweet "d'attaques récentes contre des ambulances ou du personnel médical évacuant des patients en danger de mort dans la région de l'Amhara", sans autre détail et sans faire référence aux meurtres des employés du CRS.

Une porte-parole du CICR a indiqué à l'AFP ne pas être en mesure de donner plus de précisions dans l'immédiat. La situation est difficile à évaluer en Amhara, interdite d'accès à la presse "pour des raisons de sécurité" et avec laquelle les communications étaient aléatoires mardi.

Habtamu, un habitant de la localité de Kobo, a indiqué mardi à l'AFP que "des membres des forces spéciales amhara et des Fano (miliciens "d'autodéfense" amhara, ndlr) ont échangé des tirs dimanche avec les militaires" de l'armée fédérale en marge d'une manifestation, mais que le calme était revenu depuis. Lundi, des restrictions notamment de circulation nocturne et de réunions ont été imposées à trois des principales villes d'Amhara: Gondar, Dessie et Debre Birhan.

Ces règles ont été édictées par le "poste de commandement" militaire de chacune des villes, laissant supposer que l'armée fédérale est désormais en charge de leur sécurité. Dimanche, le Premier ministre Abiy Ahmed a assuré que le processus de désarmement irait à son terme "quel qu'en soit le prix" et averti "que la loi s'appliquerait contre ceux jouant délibérément un rôle déstabilisateur".

"Décision irresponsable"

Le gouvernement assure que le processus concerne toutes les régions, sans qu'il soit possible de le vérifier. Pour l'heure, les troubles sont signalés uniquement en Amhara, dont les puissantes "forces spéciales" ont apporté une aide cruciale à l'armée fédérale durant les deux ans de conflit contre les autorités de la région du Tigré.

Un accord signé en novembre a mis fin à cette guerre, mais l'Ethiopie reste déchirée par de multiples conflits locaux, souvent liés au réveil de revendications identitaires et foncières depuis la nomination de M. Abiy en 2018, après trois décennies de régime d'une coalition dominée par la minorité tigréenne.

Deuxième peuple d'Ethiopie en nombre, les Amhara en ont longtemps constitué l'élite politique et économique. Ils considèrent leur région comme le berceau historique de l'Ethiopie actuelle, que l'empereur amhara Tewodros II a contribué à unifier. Leur langue, l'amharique, est la langue nationale.

Des conflits territoriaux les opposent aux Tigréens, mais aussi aux Oromo, le peuple le plus nombreux d'Ethiopie et les nationalistes amhara dénoncent un "génocide" en cours contre leur peuple. Pour le Mouvement national de l'Amhara (NaMA), un parti local d'opposition, la décision du gouvernement fédéral est "complètement irresponsable, dangereuse et expose la région de l'Amhara à une grande instabilité".

Dans un communiqué daté de dimanche, il affirme par ailleurs qu'aucun désarmement des "forces spéciales" d'autres régions n'est en cours, contrairement à ce qu'affirme le gouvernement fédéral dont l'objectif principal, selon lui, "est le désarmement et le démantèlement des forces spéciales amhara" uniquement.

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