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De Pyongyang à Téhéran, la "pression maximale" de Trump est-elle transposable ?


Le président des États-Unis, Donald Trump, serre la main du dirigeant nord-coréen Kim Jong Un lors de leurs premières rencontres à Singapour, le 12 juin 2018 .
Le président des États-Unis, Donald Trump, serre la main du dirigeant nord-coréen Kim Jong Un lors de leurs premières rencontres à Singapour, le 12 juin 2018 .

Un an après avoir mobilisé avec succès la communauté internationale contre la Corée du Nord, Donald Trump tente de mettre à genoux l'Iran, dans l'espoir de le forcer, à son tour, à négocier.

Mais la possibilité de transposer une même stratégie à deux situations différentes ne va pas de soi.

Selon un diplomate européen, le président des Etats-Unis est convaincu que c'est sa "campagne de pression maximale", mélange de sanctions draconiennes, isolement diplomatique et menaces militaires, qui a contraint le dirigeant nord-coréen Kim Jong Un à lâcher du lest et accepter de négocier une dénucléarisation, sans rien avoir encore promis de concret.

Donald Trump entend donc "faire la même chose avec l’Iran : taper très fort" et ensuite négocier en position de supériorité, ajoute-t-il sous couvert d'anonymat.

L'hôte de la Maison Blanche a claqué ainsi la porte, en mai, de l'accord conclu en 2015 par les grandes puissances avec Téhéran pour l'empêcher de se doter de la bombe atomique, et rétabli des sanctions très dures contre la République islamique.

Dans le cas iranien, Washington veut aller au-delà du seul aspect nucléaire : accusant l'Iran d'avoir un rôle "déstabilisateur" et "malveillant" au Moyen-Orient, l'administration Trump lui demande "des changements profonds en termes de comportement".

"Pas le bon modèle"

"Jusqu'à ce que cela arrive, nous continuerons à exercer ce que le président a appelé une pression maximale", a expliqué lundi son conseiller à la sécurité nationale John Bolton, en assurant que le but ultime n'était pas un changement de régime à Téhéran.

Lors de son discours mardi à l'ONU, puis mercredi lors d'une réunion inédite du Conseil de sécurité sur la non-prolifération qu'il présidera lui-même, Donald Trump devrait ériger la Corée du Nord en modèle pour résoudre la crise avec l'Iran.

"Le modèle nord-coréen ne peut pas être le bon modèle, car on ne peut pas faire de telles comparaisons", a balayé lundi le président iranien Hassan Rohani sur la chaîne américaine NBC, excluant de rencontrer Donald Trump cette semaine à New York.

De fait, les différences sont nombreuses.

La Corée du Nord a déjà développé des bombes atomiques et revendique le statut de puissance nucléaire, quand le régime iranien s'est officiellement engagé à ne pas en fabriquer.

La Corée du Sud est un moteur du réchauffement spectaculaire avec le Nord, quand les alliés des Etats-Unis au Moyen-Orient, Arabie saoudite et Israël en tête, poussent au contraire Washington dans une ligne jusqu'au-boutiste contre l'Iran, ennemi régional commun.

"Crédibilité"

"La campagne de pression contre l'Iran est en partie inspirée par les amis de l'administration Trump au Moyen-Orient", résume Thomas Countryman, ex-haut responsable américain aujourd'hui à la tête de l'Arms Control Association.

Surtout, le régime nord-coréen était déjà relégué au rang de paria par la communauté internationale, tandis que la République islamique, en signant l'accord de 2015, a engagé un rapprochement avec l'Occident qui s'avère difficile à remettre en cause. Les alliés européens des Etats-Unis, rangés derrière la bannière américaine pour punir Pyongyang, refusent bec et ongles de rompre avec Téhéran, dénonçant le cavalier seul de Washington.

Camouflet pour Donald Trump, ils ont annoncé lundi soir la future création d'une entité spécifique pour pouvoir continuer à commercer avec l'Iran, notamment pour l'achat de pétrole, et contourner ainsi les sanctions américaines.

En quittant l'accord iranien, "les Etats-Unis sont en train de perdre leur crédibilité traditionnelle au sein du Conseil de sécurité sur les questions de non-prolifération", estime Thomas Countryman.

Favorable à une ligne très ferme, Behnam Ben Taleblu, du cercle de réflexion Foundation for Defense of Democracies, juge lui "sage et nécessaire la stratégie de pression maximale à l'égard des deux régimes".

"Couper leur accès à la finance internationale et réduire les trafics illicites peut appauvrir ces régimes et les empêcher de financer leurs activités militaires néfastes", dit-il à l'AFP.

Les sanctions américaines, qui visent tous les pays et entreprises, y compris étrangères, qui continueraient de faire affaire avec l'Iran, sont bien en train d'affaiblir l'économie iranienne.

Certains observateurs, persuadés il y a encore quelques mois que les Américains, sans les Européens, ne parviendraient jamais à imposer une pression suffisante pour faire plier Téhéran, commencent à s'interroger.

Les sanctions s'annoncent "sauvages", prévient un diplomate européen, évoquant la crise profonde que traverse le régime iranien.

Avec AFP

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