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L'Afrique du Sud fait le pari de l'anonymat pour lutter contre les stigmatisations du sida


Des militants des droits civiques défilent à Durban, en Afrique du Sud, le 18 juillet 2016.
Des militants des droits civiques défilent à Durban, en Afrique du Sud, le 18 juillet 2016.

L'Afrique du Sud, le pays du monde le plus touché par l'épidémie, a relevé le défi en faisant le pari de l'autodépistage et des distributeurs automatiques de médicaments.

Malgré les progrès de la prévention, la généralisation des tests et la baisse du prix des trithérapies, le virus VIH continue à faire des ravages dans le pays le plus industrialisé du continent, qui compte 7 millions de séropositifs (18,9% de sa population adulte).

Et plus largement, selon l'ONG Unitaid, trois personnes séropositives sur dix dans le monde ignorent qu'elles sont infectées par le virus.

En Afrique du Sud, l'une des causes du maintien de l'épidémie à un haut niveau est que certaines catégories de personnes à risques répugnent toujours à se présenter dans des centres de santé publics pour un dépistage.

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Pour contourner cette difficulté, Unitaid propose des tests d'autodépistage aux portes d'un supermarché du quartier pauvre de Hillbrow, au centre de Johannesburg.

Ce matin-là, un groupe de volontaires tente d'y attirer les curieux.

"Nous visons spécifiquement les jeunes hommes. En déployant un groupe de jeunes volontaires masculins ici, nous espérons attirer leurs pairs du quartier", explique Lynne Wilkinson, de l'université du Witwatersrand, qui pilote le projet.

Isolés du regard des autres dans des tentes, les passants remplissent une simple fiche en échange d'un test gratuit qu'ils pourront utiliser eux-mêmes, sur place ou à leur domicile.

"Très facile"

"Le mode d'emploi est écrit en six langues, la plupart des gens ne se trompent pas", assure Mokgadi Mabuela, une jeune femme qui distribue les tests. "Ils comprennent vite que c'est un test à faire eux-mêmes, même si certains hommes ne peuvent s'empêcher de vous demander un rendez-vous..."

Le résultat du test est disponible en vingt minutes. S'il est positif, un test de confirmation est immédiatement proposé.

"Je suis passé la semaine dernière avec mon frère qui a fait le dépistage. Je l'ai fait à mon tour aujourd'hui pour connaître ma propre situation", indique un jeune homme qui préfère taire son nom. "C'est vraiment très facile."

Lancée au Malawi, en Zambie puis au Zimbabwe à partir de 2015, l'initiative est désormais élargie à l'Afrique du Sud. Après le quartier de Hillbrow, les tests seront disponibles à partir de mai dans des stations de minibus de la ville, qui transportent chaque jour des centaines de milliers de passagers.

Unitaid envisage d'en distribuer 4,8 millions d'exemplaires.

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C'est en utilisant l'un d'entre eux que Oscar Tyumre, un musicien de 45 ans habitant à Alberton, à l'est de Johannesburg, a appris qu'il était porteur de la maladie. Le personnel d'Unitaid lui a alors "conseillé d'aller dans leur clinique pour prendre un traitement", se félicite-t-il, "c'était difficile à accepter mais grâce à eux j'ai pu me soigner tout de suite".

Oscar Tyumre affirme aujourd'hui avoir été soulagé de connaître sa séropositivité. "Mon conseil, c'est de ne pas se laisser abattre. Vous pouvez tout de suite commencer votre traitement et continuer à vivre jusqu'à 100 ans !"

Guichet automatique

A une dizaine de kilomètres plus au nord, l'association à but non lucratif Right ePharmacies vient de lancer une autre nouveauté destinée à protéger les victimes du VIH des préjugés: les malades du township d'Alexandra peuvent désormais y retirer leur traitement en toute discrétion dans un distributeur automatique semblable à ceux des banques, le tout premier de ce type en service sur le continent africain.

Grâce à une carte, un code et la confirmation - légalement obligatoire - d'un pharmacien via une liaison vidéo, les patients peuvent venir retirer leur trithérapie en moins de cinq minutes, sans croiser le moindre regard.

"C'est plus facile et plus rapide", se réjouit une malade du quartier, Philda Dladla, 59 ans. "Avant, il fallait patienter toute la journée à la clinique", souligne-t-elle. Avec le distributeur automatique, tout le monde peut venir facilement chercher ses médicaments, "à condition de ne pas oublier son code personnel."

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Pour assurer l'anonymat des utilisateurs, les quatre machines de la pharmacie, fabriquées en Allemagne et vendues un peu moins de 140.000 euros l'unité, sont isolées par une cabine.

"Vous ne pouvez révélez votre maladie que si vous sortez avec vos médicaments dans la main", explique un des responsables du projet, Thato Mathabathe.

Depuis septembre, quelque 200 patients utilisent chaque jour les distributeurs pour renouveler leur traitement contre le sida, le diabète, l'asthme ou l'hypertension. Trois autres sites devraient bientôt en être équipés à Johannesburg.

Avec AFP

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