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Avec leur BD "Kivu", Van Hamme et Simon dénoncent un "régime de terreur" dans l'est de la RDC


Des catholiques assistent à une messe à l’extérieure de l’église nazaréenne à Goma, Nord-Kivu, 1er avril 2012.
Des catholiques assistent à une messe à l’extérieure de l’église nazaréenne à Goma, Nord-Kivu, 1er avril 2012.

Avec leur bande dessinée "Kivu", le scénariste Jean Van Hamme (Thorgal, Largo Winch, XIII) et le dessinateur Christophe Simon (Alix, Corentin) veulent dénoncer "un régime de la terreur" dans l'est de la République démocratique du Congo (RDC).

L'album (éditions Le Lombard) publié il y a quelques jours par les auteurs belges raconte l'histoire d'un jeune employé d'une multinationale belge envoyé en RDC qui se retrouve projeté brutalement dans la réalité de ce conflit oublié de plus de 20 ans.

Le projet d'une bande-dessinée autour du sanglant conflit au Kivu est né d'une demande du docteur Guy-Bernard Cadière, un chirurgien belge qui assiste régulièrement le docteur Mukwege, un gynécologue congolais, dans son hôpital de Panzi, "pour réparer les femmes qui ont été violées et assez sauvagement meurtries au Kivu" explique Jean Van Hamme.

Le scénariste de BD belge Jean Van Hamme pose lors d’une séance photo à Paris, le 21 septembre 2018.
Le scénariste de BD belge Jean Van Hamme pose lors d’une séance photo à Paris, le 21 septembre 2018.

Le Kivu est une province agricole de l'est de la République démocratique du Congo (RDC) qui recèle des minerais, cobalt, manganèse et surtout le coltan dont les multinationales ont un urgent besoin pour fabriquer tout ce qui est informatique, tablette, smartphone.

"L'hôpital de Panzi est là pour soigner les blessés - ce sont surtout les femmes qui s'y présentent - et le docteur Cadière m'a demandé si on pouvait faire une bande dessinée sur le sujet", se rappelle Jean Van Hamme. "J'ai choisi de faire un reportage déguisé, c'est à dire raconter une intrigue de fiction avec en arrière-plan la réalité du Congo".

Comment aborder en bande dessinée un sujet aussi dur ? "Il était certain qu'on ne pouvait pas montrer des dessins de femmes éventrées, de femmes au vagin ouvert et saignant, mais on pouvait le dire", confie Jean Van Hamme.

"Les images ne sont pas dures, c'est le texte qui est dur et ça peut toucher les gens, ça peut informer les gens. Seront-ils touchés ? Oui je le suppose. Longuement ? Je ne sais pas. Je suppose que toutes les nouvelles qu'ils apprennent sur les horreurs qui se passent dans d'autres pays, ça les touche un moment et puis ça ne les touche plus", se plaint le dessinateur.

Il a appliqué une technique qu'il pratique depuis longtemps à un projet qui est effectivement plus politique et plus humaniste que d'habitude. Il raconte avoir bien connu le Kivu dans les années 50: "cet eden transformé en enfer me touche profondément".

Il a passé huit jours en RDC, notamment à l'hôpital Panzi, pour se documenter. Pour lui, "le plus dur, c'est d'affronter le regard de ces femmes qui ont été violées et qui ont peur de vous parce que vous êtes un homme", se souvient-il. "Et je dis des femmes mais il y avait aussi une petite fille de huit ans et un bébé de 17 mois. On les voit petit à petit se reconstruire".

Jean Van Hamme se souvient d'une rencontre marquante qui l'a insipirée pour un personnage : "une petite fille qui m'a inspirée pour le personnage de Violette et qui dessinait très bien. En voyant ses dessins, je lui ai dit: "c'est très beau ce que tu dessines mais pourquoi les visages n'ont pas de bouche ?". Et là elle me regarde avec des yeux qui ne peuvent même plus pleurer: "Parce qu'elle ne peut rien dire".

"Avoir été confronté à cette réalité là, on n'en revient pas indemme", conclu-t-il

Avec AFP

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