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A Minneapolis, un groupe d'auto-défense se pose en protecteur des Afro-Américains


Fox, Larry K.Mitchell, 28 ans, charpentier du nord de Minneapolis et membre des Minnesota Freedom Fighters (MNFF), avec son fusil le 28 juillet 2020 à Minneapolis, Minnesota.
Fox, Larry K.Mitchell, 28 ans, charpentier du nord de Minneapolis et membre des Minnesota Freedom Fighters (MNFF), avec son fusil le 28 juillet 2020 à Minneapolis, Minnesota.

Avec leurs fusils semi-automatiques AR-15 en bandoulière et leurs gilets pare-balles, les membres des "Freedom Fighters du Minnesota", un groupe d'autodéfense afro-américain fondé dans le sillage de la mort de George Floyd, sont impressionnants et le savent.

"Notre but est de montrer que des hommes noirs peuvent protéger leur communauté, avec des armes, et être dignes de confiance", explique à l'AFP Randy Chrisman, un homme de 30 ans à la carrure athlétique.

"Nous en avons assez d'être vus comme des membres de gang parce que nous possédons des armes, ou comme des ennemis à cause de la couleur de notre peau", ajoute ce père de famille qui, depuis le printemps, patrouille régulièrement dans certains quartiers de Minneapolis.

La grande métropole du nord des Etats-Unis, où George Floyd est mort le 25 mai sous le genou d'un policier blanc, s'était embrasée après le drame. Plusieurs commerces et un commissariat avaient brûlé lors des émeutes.

Da Mayor (alias Mr z), 32 ans, musicien du nord de Minneapolis et membre des Minnesota Freedom Fighters (MNFF), avec son fusil le 3 août 2020 à Minneapolis, Minnesota.
Da Mayor (alias Mr z), 32 ans, musicien du nord de Minneapolis et membre des Minnesota Freedom Fighters (MNFF), avec son fusil le 3 août 2020 à Minneapolis, Minnesota.

Dans ce contexte confus, "on entendait dire que des suprémacistes blancs allaient incendier nos commerces, casser les vitrines" et profiter du chaos pour vandaliser les quartiers noirs, rappelle M. Chrisman.

Alors, quand la branche locale de l'association de défense des droits civiques NAACP lance un appel à former des groupes de protection, il répond présent, avec une vingtaine d'autres propriétaires noirs d'armes à feu, tous dotés de permis et formés à l'usage de leurs pistolets et fusils.

Pendant plusieurs jours, ils patrouillent ensemble une artère commerçante des quartiers nord.

"On a eu des interactions avec certaines personnes, des extrémistes blancs", assure un autre membre du groupe, qui veut être identifié par son surnom, "Step Child". Globalement "on a réussi à maintenir le calme", dit-il sans vouloir entrer dans les détails.

Law, Lawrence Barnes, 44 ans, entraîneur de basket-ball de Chicago et membre des Minnesota Freedom Fighters (MNFF), avec son fusil le 26 juillet 2020 à Minneapolis, Minnesota.
Law, Lawrence Barnes, 44 ans, entraîneur de basket-ball de Chicago et membre des Minnesota Freedom Fighters (MNFF), avec son fusil le 26 juillet 2020 à Minneapolis, Minnesota.

"Dissuasif"

Forts de cette expérience, ces hommes venus d'horizons variés (ils sont chauffeur routier, entraîneur de basket, agent immobilier...), âgés de 25 à 55 ans, formalisent leurs liens, se trouvent un nom et se dotent d'un logo.

Dans les mois suivants, ils participent à la sécurité lors de l'hommage à George Floyd et de nombreuses manifestations antiracistes. "Quand il y a une menace, nous sommes appelés pour encadrer la marche", explique Step Child, 45 ans, qui travaille dans la sécurité informatique.

Et surtout, ils continuent à s'entraîner pour parer à toute éventualité.

Ils enchaînent exercices de cardio, arts martiaux, séances de tirs de précision, entraînement au combat mais aussi aux techniques de désescalade. "Nous ne sommes pas des fous de la gâchette, nous ne voulons pas avoir à tirer", explique Randy Chrisman.

Pourquoi alors patrouiller en tenue quasi militaire avec des armes à feu? "La communauté nous fait davantage confiance ainsi", estime-t-il.

Eagle Eye, O. Walker, 38 ans, de Minneapolis, membre des Minnesota Freedom Fighters (MNFF), pose avec son arme le 29 juillet 2020 à Minneapolis.
Eagle Eye, O. Walker, 38 ans, de Minneapolis, membre des Minnesota Freedom Fighters (MNFF), pose avec son arme le 29 juillet 2020 à Minneapolis.

Elles ont "un effet dissuasif", ajoute Step Child, tout en déroulant l'argumentaire classique sur le Deuxième amendement de la Constitution qui, dit-il, garantit le droit au port d'armes et à l'autodéfense.

Les Freedom Fighters assurent avoir de bonnes relations avec la police, et même lui servir "de ponts" vers des populations noires extrêmement méfiantes envers les forces de l'ordre. Contactées par l'AFP, celles-ci n'ont pas commenté.

Comme les autorités, les membres du groupe attendent désormais avec appréhension l'issue du procès du policier blanc Derek Chauvin, accusé du meurtre de George Floyd.

Le verdict est attendu fin avril ou début mai. "S'il est acquitté, beaucoup de personnes vont être en colère, il pourrait y avoir des attaques ou des émeutes", craint Randy Chrisman.

"Malheureusement, je pense que nous allons être appelés en renfort".

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