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A Casablanca, la guerre entre taxis et Uber se fait plus féroce


Le logo uber sur le téléphone portable et le signe d'un taxi, le 15 septembre 2014.
Le logo uber sur le téléphone portable et le signe d'un taxi, le 15 septembre 2014.

"Uber, c'est un transporteur clandestin des temps modernes!" s'exclame Nordine. A Casablanca, capitale économique du Maroc, les taxis sont en guerre contre la société américaine de véhicules de transport avec chauffeur (VTC), source de controverses dans de nombreux pays.

"Quand tu ouvres l'application Uber sur ton portable, tu vois leurs chauffeurs rôder autour de toi comme un virus", peste Nordine, la cinquantaine, assis sur le capot de son véhicule dans le centre grouillant de cette ville de 4,2 millions d'habitants.

"Et contre un virus, les antibiotiques ne suffisent pas, il faut des solutions radicales, leur tendre des pièges", assène-t-il.

Des chauffeurs mécontents ont ainsi multiplié les opérations de force ces deux dernières semaines: se faisant passer pour des usagers lambda, ils ont commandé des Uber pour ensuite les encercler et les livrer aux policiers, sous le regard médusé des passants.

Car la société américaine est hors la loi à Casablanca depuis une décision de la préfecture d'août 2015, un mois après son lancement officiel. Casablanca était alors la première ville du Maghreb et d'Afrique francophone où Uber s'était installée.

La presse marocaine évoque des courses-poursuites, menaces et intimidations, les taxis semblant agir en auxiliaires de la police. Le tout ponctué du slogan "Uber dégage!", de plus en plus visible sur les vitres des taxis rouge tomate qui sillonnent Casablanca.

Hors la loi

La préfecture rappelle à l'AFP "qu'une société non autorisée est une société hors la loi". Les véhicules des contrevenants sont parfois mis en fourrière, leurs permis retirés, précise une responsable.

Au Maroc, la gestion des taxis relève pour l'essentiel des préfectures. Le ministère des Transports et le gouvernement gardent pour l'instant le silence sur le sujet Uber.

La start-up, qui a continué d'opérer à Casablanca malgré l'interdiction conteste l'interprétation de la préfecture. "Nous sommes une société technologique qui met en relation usagers et conducteurs, et non une société de transport", soutient la directrice générale d'Uber Maroc, Meryem Belqziz, interrogée par l'AFP.

"Comme pour tout changement important, on trouve des résistances, mais avec le temps, les gens s'habituent aux nouveaux modes de consommation", poursuit-elle.

Les derniers incidents sont le fait d'une "action isolée. Il n'y a pas eu de blessés, c'est plus du harcèlement", même si "les chauffeurs d'Uber sont un peu secoués", assure-t-elle endisant étudier "toutes les mesures pour les protéger".

"Tous les taxis ne sont pas contre Uber", poursuit-elle.

"Nous avons à ce jour intégré 250 taxis sur notre plateforme et on continue de le faire. (...) Nous discutons avec les autorités, il y a un vide juridique qu'il faut clarifier", argumente Mme Belqziz, qui refuse de communiquer le nombre de ses chauffeurs ou le chiffre d'affaires.

Forte demande

Il y a "une forte croissance de la demande" au Maroc, avec plus de 15.000 utilisateurs uniques d'Uber durant les trois derniers mois, se borne-t-elle à préciser.

Si certains taxis ont accepté de devenir partenaires de la firme américaine, les représentants des 18.000 petits et grands taxis de Casablanca ne cessent de dénoncer la "concurrence déloyale" d'Uber et d'autres plateformes similaires comme les marocaines Chauffeur.ma et iTaxi ou l'émiratie Careem.

Les syndicats du secteur --une quarantaine sur Casablanca-- disent pour la plupart ne pas cautionner les actions violentes, mais soulignent l'exaspération des chauffeurs de taxis, comme dans d'autres pays dont la France, le Brésil ou l'Egypte.

"Entre l'arrivée du tramway, les transporteurs clandestins et maintenant Uber, ils sont en train de nous tuer!", s'indigne Abdelouahab Ouajane, responsable d'une petite association locale de défense des taxis.

Mais alors que Casablanca fait face à une demande en transports largement supérieure à l'offre, et que les taxis locaux y ont très mauvaise réputation, les usagers sont nombreux à défendre les sociétés de VTC.

Certains font entendre leur voix sur des pages Facebook dédiées réunissant jusqu'à 10.000 abonnés. Ils remercient Uber qui "rend service aux Marocains", brocardent le "délabrement" de certains taxis ainsi que les "filouteries" et "escroqueries" de leurs chauffeurs.

Avec AFP

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