L’annonce, en février, par le président George W. Bush de la mise en place du Commandement militaire régional des Etats-Unis pour l’Afrique (Africom) a suscité un tollé sur le continent africain et la controverse reste vive.
Les adversaires de l’Africom font valoir que Washington cherche surtout à garantir son accès aux ressources du continent et à étendre la guerre contre le terrorisme international en renforçant des régimes qui lui sont favorables, mais qui négligent les populations locales. Le Pentagone affirme, de son côté, que la mission principale de l’Africom sera de former des soldats africains au maintien de la paix, tout en aidant à réduire la pauvreté et la corruption.
L’ancien commandant de l’armée éthiopienne, le général Tsadkan Gebretensae, est d'avis que les Africains restent, à une majorité écrasante, contre tout élargissement de la présence militaire américaine des Etats-Unis sur le continent. « Tous les pays africains ont leurs propres raisons d’être sceptiques ; ce scepticisme profond est général, même dans les pays où les politiques sécuritaires sont essentiellement les mêmes que celles de Washington,» a-t-il dit.
Selon le général, la lutte contre le terrorisme international reste la priorité No 1 des Etats-Unis et les Africains redoutent que, sous le couvert de la lutte contre la pauvreté, Washington n’utilise surtout l’Africom pour lutter contre les militants islamiques. Les Etats-Unis ont déjà une base à Djibouti, dans la Corne de l’Afrique.
Pourquoi autant de réticence? Wafula Okumu, analyste à l’Institut d’études de la sécurité d’Afrique du Sud, pense que Washington a soit ignoré les tragédies en Afrique - tel le génocide au Rwanda - soit appuyé des despotes, tel Mobutu Sese Seko dans l’ancien Zaire. Si les Etats-Unis ne veulent pas s’ingérer en Afrique, précise M. Okumu, ils feraient mieux de laisser les Ongs s’occuper du développement du continent. « Pourquoi ne pas utiliser d’autres moyens efficaces, tels que l’Usaid, ou même le Corps de la paix, qui se sont montrés très aptes à gagner les cœurs et les esprits ?», s’est demandé M. Okumu.
S'appuyant sur ses discussions avec les pays africains, la vice-ministre adjointe américaine de la Défense chargée des affaires africaines, Theresa Whelan, assure, pour sa part que la réticence à une plus grande présence militaire américaine sur le continent est loin d’être générale. « Beaucoup ont réagi en disant: eh bien, peut-être que si vous vivez avec nous ici sur le continent, vous commencerez à comprendre les défis auxquels nous sommes confrontés, plutôt que d’amener vos perspectives occidentales. Vous nous comprendrez un peu mieux », a précisé Mme Whelan.
Tous les dirigeants africains ne sont pas de cet avis. Ainsi, Mosiua Lekota, ministre sud-africain de la défense, déclare haut et fort qu’un plus grand nombre de troupes américaines déstabiliserait le continent. Par contre, le président du Botswana, Festus Mogae, ne rejette pas d’emblée l’Africom. Et il note qu’au moment même où M. Lekota faisait ses déclarations, l’Afrique du Sud participait à des manœuvres conjointes avec la marine américaine au Cap.