Joseph Kabila, un président jeune et secret

Le président de la RDC lors de son entretien avec le pape au Vatican, le 26 septembre 2016.

Encore jeune président après presque 16 ans de pouvoir en République démocratique du Congo, Joseph Kabila est un chef d'État secret qui ne donne aucun signe de vouloir prendre sa retraite politique alors que s'achève son deuxième mandat censé être le dernier.

Fils de Laurent-Désiré Kabila, chef rebelle ayant fait tomber le dictateur Mobutu Sese Seko, Joseph Kabila, 45 ans, a hérité du pouvoir par succession monarchique après l'assassinat de son père en janvier 2001.

"Avec sa voix timide et sa jeunesse (il n'avait alors que 29 ans), il donnait l'impression, au début d'être un personnage falot", écrit l'historien belge David Van Reybrouck dans un ouvrage de référence sur le Congo.

M. Kabila hérite d'un pays exsangue, déchiré par une guerre terrible entamée en 1998 et qui ne prendra fin qu'en 2003. Le pouvoir central ne contrôle alors guère qu'une partie de l'Ouest et du Sud de la RDC.

Le jeune chef de l'État parle alors l'anglais et le swahili (langue de l'Est africain), s'exprime difficilement en français, la langue officielle du pays, et ne maîtrise pas du tout le lingala, parlé à Kinshasa.

Cette lacune linguistique, sa naissance dans l'Est de la RDC et son enfance en Tanzanie le font percevoir par les habitants de la capitale comme "un homme de l'Est", un "étranger".

Peu à peu cependant, son habileté politique surprend les diplomates étrangers qui le considéraient comme un pantin aux mains de la vieille garde de son père, dont il s'affranchit progressivement.

Après une transition politique post-conflit difficile où il doit cohabiter avec quatre vice-présidents, il est conforté à la présidence par les urnes en 2006 à l'issue des premières élections libres du pays depuis son indépendance de la Belgique en 1960.

'Taiseux'

L'état de grâce ne durera pas longtemps et en 2011, à l'issue d'élections marquées par des irrégularités massives, M. Kabila remporte un deuxième mandat, avec une majorité relative. À Kinshasa, mégapole bouillante de 10 millions d'habitants qui ne l'a jamais aimé, le chef de l'État sortant ne réunit que 16,5 % des suffrages exprimés.

Sa victoire, non reconnue par la majeure partie de l'opposition, plonge le Congo dans la crise politique.

Sur fond de marasme économique, le report sine die de la présidentielle qui devait avoir lieu cette année avant la fin de son mandat le 20 décembre, n'a fait qu'exacerber les tensions alors que la Constitution interdit au chef de l'État de se représenter.

La médiation de la dernière chance patronnée par l'Église catholique pour tenter de trouver un accord permettant d'instaurer un régime de transition politique a été suspendue samedi sans avancée majeure, alors que M. Kabila affiche sa volonté de rester au pouvoir jusqu'à ce qui lui soit trouvé un successeur par les urnes.

Discret, voire "taiseux", selon l'expression d'un ministre, M. Kabila reste très secret, même pour ses proches.

En dépit de progrès incontestables fortement remis en cause par la crise économique qui frappe le pays depuis 18 mois, la RDC reste l'un des États les moins développés et plus corrompus au monde.

La grande pauvreté y est la règle pour la quasi-totalité de ses quelque 70 millions d'habitants, tandis qu'une caste de nantis, hommes d'affaires étrangers, hommes politiques proches ou non du pouvoir se partagent les fruits des immenses richesses naturelles (mines, bois, eau).

Enfant du maquis

Né le 4 juin 1971 dans le maquis de Laurent-Désiré Kabila au Sud-Kivu, le jeune Joseph connaît l'exil à 5 ans.

Il passe presque toute sa jeunesse en Tanzanie avant de rejoindre son père en septembre 1996 lorsqu'éclate la première guerre du Congo.

Adjoint, dans la rébellion, de James Kabarebe, l'actuel ministre de la Défense du Rwanda, qui sera chef de l'armée congolaise après avoir participé à l'accession au pouvoir de "Mzee" (le surnom de son père) en 1997, Joseph Kabila est propulsé général-major.

Il part en Chine pour une formation militaire mais rentre précipitamment au début de la deuxième guerre du Congo en 1998.

Petit et avec un léger embonpoint, la fine moustache toujours impeccable, M. Kabila apparaît peu à l'aise dans les cérémonies officielles et semble n'être jamais aussi heureux que lorsqu'il conduit des tracteurs ou engins de chantiers à l'occasion d'inaugurations.

Peu porté sur la littérature, selon un diplomate qui l'a rencontré à plusieurs reprises, il passe pour être plutôt amateur de jeux vidéo, voitures et travaux fermiers.

Marié à une femme de l'Ouest du pays, Olive Lembe Kabila, le président congolais est père d'une adolescente et d'un garçon.

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