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Affaire Khashoggi: la Turquie inculpe des proches du prince héritier d'Arabie


Une policière turque passe devant une photo du journaliste saoudien Jamal Khashoggi à Istanbul, lors du premier anniversaire de son assassinat, le 2 octobre 2019. (Photo: AFP/Lefteris Pitarakis)
Une policière turque passe devant une photo du journaliste saoudien Jamal Khashoggi à Istanbul, lors du premier anniversaire de son assassinat, le 2 octobre 2019. (Photo: AFP/Lefteris Pitarakis)

La Turquie a annoncé mercredi avoir lancé des poursuites contre vingt Saoudiens, dont deux proches du prince héritier Mohammed ben Salmane, à l'issue d'une enquête de plus d'un an sur le meurtre de l'éditorialiste Jamal Khashoggi.

Khashoggi, un collaborateur du Washington Post et critique du régime saoudien après en avoir été proche, a été assassiné et son corps découpé en morceaux en octobre 2018 dans le consulat d'Arabie saoudite à Istanbul où il s'était rendu pour récupérer un document.

Ce meurtre a plongé l'Arabie saoudite dans l'une de ses pires crises diplomatiques et terni l'image du prince héritier Mohammed ben Salmane, dit "MBS", désigné par des responsables turcs et américains comme le commanditaire du meurtre.

Mercredi, le bureau du procureur général d'Istanbul a annoncé dans un communiqué que l'enquête turque sur cette affaire était arrivée à son terme et qu'un acte d'accusation avait été préparé.

Dans cet acte d'accusation, deux proches de MBS, l'ex-conseiller Saoud al-Qahtani et l'ancien numéro deux du renseignement, le général Ahmed al-Assiri, sont identifiés comme les commanditaires du meurtre, selon la même source.

Ils sont accusés d'avoir ordonné un "homicide volontaire prémédité avec l'intention d'infliger des souffrances". Dans le même document, 18 autres suspects sont accusés d'avoir pris part à ce meurtre.

Les vingt suspects risquent la prison à vie.

Selon la Turquie, Khashoggi a été étranglé, puis son corps a été démembré. Les restes de l'éditorialiste de 59 ans n'ont jamais été retrouvés.

Après avoir nié le meurtre, puis avancé plusieurs versions contradictoires, les autorités de Ryad ont affirmé qu'il avait été commis par des agents saoudiens ayant agi seuls et sans ordre de hauts dirigeants.

A l'issue d'un procès opaque en Arabie saoudite, cinq Saoudiens ont été condamnés à mort l'an dernier. Aucune accusation n'a été retenue contre M. Qahtani et M. Assiri a été acquitté.

La Turquie a qualifié de "scandaleux" le verdict rendu en Arabie saoudite, estimant que les vrais commanditaires avaient bénéficié d'une "immunité".

- Tensions turco-saoudiennes -

Le président Recep Tayyip Erdogan n'a jamais ouvertement accusé le prince héritier ben Salmane, mais des responsables turcs et la presse proche du pouvoir s'en sont chargés.

La rapporteure spéciale des Nations unies Agnès Callamard a rédigé un rapport accablant pour MBS et la CIA a estimé que le meurtre n'a pas pu avoir lieu sans le feu vert du prince héritier.

Mais le président américain Donald Trump a pris la défense de MBS, qui dirige de facto la monarchie pétrolière.

Après le meurtre de Khashoggi, les enquêteurs turcs ont perquisitionné le consulat, la résidence du consul général saoudien et plusieurs véhicules appartenant à la mission diplomatique.

Ils ont aussi examiné les factures téléphoniques de certains suspects, retracé leurs mouvements à l'aide d'images de caméras de vidéosurveillance et recueilli les témoignages de plus de cinquante personnes, selon le bureau du procureur.

Les autorités turques ont par ailleurs émis des mandats d'arrêt internationaux contre les suspects, qui se trouvent tous à l'étranger.

L'annonce des poursuites mercredi par la justice turque risque de causer de nouvelles tensions dans les relations entre Ankara et Ryad, qui se sont dégradées à cause de l'affaire Khashoggi.

La Turquie et l'Arabie saoudite sont deux puissances rivales dans le monde musulman. Ankara s'est notamment attiré les foudres de Ryad en soutenant le Qatar, mis à l'écart par ses voisins du Golfe.

Les deux pays sont en outre opposés en Libye où ils soutiennent militairement les belligérants: la Turquie appuie le gouvernement de Tripoli, reconnu par les Nations unies, et l'Arabie saoudite soutient le maréchal Khalifa Haftar qui cherche à le renverser.

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