Ce couloir est prévu dans le cadre d'une trêve quotidienne de cinq heures annoncée par la Russie pour permettre l'entrée de l'aide et la sortie de civils de cette enclave, cible d'une campagne aérienne du régime qui a coûté la vie à plus de 600 civils depuis le 18 février.
Les forces prorégime et Moscou d'un côté, et les rebelles qui contrôlent l'enclave dans la Ghouta de l'autre se sont à nouveau accusés mercredi de violations de la trêve, dans un pays ravagé par une guerre dévastatrice depuis près de sept ans.
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Malgré la baisse d'intensité des bombardements et pour le second jour consécutif depuis l'entrée en vigueur de la "pause humanitaire", aucun convoi d'aides n'est entré dans la Ghouta, tout comme aucun civil n'a emprunté le couloir établi au niveau du secteur d'Al-Wafidine, pour sortir de l'enclave rebelle proche de Damas, selon une source militaire.
Près d'un check-point du régime aux abords du couloir, seuls des soldats sont présents. Un peu plus loin, les bus et les ambulances attendent, vides, selon une correspondante de l'AFP sur place.
Pourtant, les tirs ont baissé d'intensité mercredi et seuls des bombardements sporadiques ont été signalés pendant la journée et en soirée sur l'enclave rebelle, selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH). Neuf civils ont péri dans le secteur alors que des dizaines mourraient quotidiennement la semaine dernière, a ajouté l'ONG.
"Jusqu'à maintenant personne n'est venu" au passage d'Al-Wafidine, a indiqué à l'AFP la source militaire, accusant les rebelles "d'empêcher ceux qui tentent de passer, soit en faisant pression sur eux, soit en tirant". "La trêve doit durer trois jours, elle pourrait être prolongée" si des civils sortent.
Le chef de la diplomatie Sergueï Lavrov a lui aussi accusé les rebelles de "bloquer l'évacuation de ceux qui souhaitent partir" de la Ghouta orientale.
Il s'agit "d'accusations mensongères lancées par le régime Assad et les Russes, que nous rejetons catégoriquement. Nous n'avons pas ciblé le secteur d'Al-Wafidine", a rétorqué Hamza Bayrakdar, porte-parole de Jaich al-Islam, un des groupes rebelles contrôlant l'enclave.
"Nous refusons de sortir", a affirmé à l'AFP Mohamad Abou al-Majd, un habitant de l'enclave. "Où iront les jeunes? Ils les enrôleront dans l'armée, pour combattre le peuple. Et nos habitants tueront nos habitants".
"Que signifie une trêve jusqu'à 14H00? Cela signifie qu'après les bombardements peuvent reprendre et le nombre de morts augmentera", a-t-il déploré.
L'enclave d'une centaine de kilomètres carrés tenue par les insurgés dans la région de la Ghouta orientale constitue le dernier bastion rebelle aux portes de Damas.
Soutenu par l'allié russe, le régime, qui cherche à reprendre coûte que coûte cette enclave d'où des obus sont tirés sur Damas, a lancé le 18 février une campagne aérienne d'une rare intensité contre ce secteur.
Selon l'OSDH, 602 civils dont 147 enfants ont péri depuis sous les bombes du régime qui ont en outre provoqué d'énormes destructions.
- 'Frustration' -
Il est "difficile pour tout civil d'emprunter les couloirs en l'absence de garanties suffisantes. Les civils ont peur, en l'absence de consensus" entre les protagonistes, a estimé la porte-parole du Comité international de la Croix-Rouge en Syrie, Ingy Sedky.
Elle a aussi déploré le délai très court de la trêve qui ne permet pas d'acheminer les aides médicales.
Pourtant, une quarantaine de camions chargés d'aide humanitaire sont prêts à se rendre à Douma, la grande ville de l'enclave rebelle, a indiqué Mark Lowcock, secrétaire général adjoint aux Affaires humanitaires, devant le Conseil de sécurité.
"Quand votre résolution sera-t-elle mise en oeuvre ?" a-t-il lancé, dans un grand silence. Samedi, le Conseil de sécurité a adopté une résolution réclamant une trêve "sans délai" de 30 jours dans toute la Syrie, qui n'a pas été suivie d'effet.
Depuis samedi, il n'y a ni accès humanitaire, ni autorisation du régime pour se rendre dans des zones assiégées, ni évacuation médicale. En revanche, c'est toujours des bombardements, toujours des morts, toujours des blessés, a-t-il dit.
Le secrétaire général adjoint de l'ONU pour les Affaires politiques, Jeffrey Feltman, a fait part de son côté de sa "frustration". "Ce dont nous avons besoin c'est d'une application (de la trêve) et elle ne survient pas", a-t-il constaté.
Il n'en reste que l'initiative russe offre un peu de répit à l'enclave rebelle et ses 400.000 habitants, qui subissent au quotidien pénurie de nourriture et de médicaments, en raison du siège asphyxiant imposé par le régime depuis 2013.
Déclenché en 2011 par la répression de manifestations pacifiques prodémocratie, le conflit en Syrie s'est complexifié avec l'implication de pays étrangers et de groupes jihadistes. Il a fait plus de 340.000 morts et jeté à la rue des millions de personnes.
Avec AFP