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Syrie: Ankara et Washington font un pas vers une "zone de sécurité"


Les troupes américaines patrouillent près de la frontière turque à Hasakah, en Syrie, le 4 novembre 2018.
Les troupes américaines patrouillent près de la frontière turque à Hasakah, en Syrie, le 4 novembre 2018.

La Turquie et les Etats-Unis ont décidé mercredi d'établir un "centre d'opérations conjointes" pour coordonner la création d'une "zone de sécurité" dans le nord de la Syrie, une mesure visant à prévenir un affrontement entre forces turques et kurdes.

Cette annonce, chiche en détails, intervient après trois jours d'intenses négociations entre Ankara et Washington, qui cherche à éviter une nouvelle opération militaire turque contre les Unités de protection du peuple (YPG), une milice kurde qui contrôle des zones du nord de la Syrie.

Soutenues et armées par les Etats-Unis contre le groupe jihadiste Etat islamique (EI), les YPG sont toutefois considérées par la Turquie comme une "organisation terroriste" menaçant sa sécurité.

Selon deux communiqués publiés séparément par le ministère turc de la Défense et l'ambassade américaine à Ankara, les deux pays se sont entendus pour mettre "rapidement" en place "un centre d'opérations conjointes en Turquie pour coordonner et gérer la mise en place de la zone de sécurité".

Cette "zone de sécurité" aura ensuite vocation à devenir, à terme, un "couloir de paix" où pourraient s'installer les réfugiés syriens, qui sont plus de 3,6 millions à avoir rejoint la Turquie.

Aucun détail n'a cependant été dévoilé sur ce projet de "zone de sécurité", ni sur sa profondeur, ni sur les forces qui en auraient le contrôle, deux points où les divergences étaient particulièrement fortes.

D'après la presse turque, Ankara réclamait le contrôle exclusif sur une bande de 30 km de profondeur d'où les YPG devraient se retirer, bien plus que la formule proposée par Washington.

La Turquie conçoit cette "zone de sécurité" comme un tampon entre sa frontière et les positions des YPG à l'est de l'Euphrate en Syrie, jusqu'à la frontière irakienne.

"Ce qui est important, c'est que nous prenions des mesures pour l'est de l'Euphrate. Et c'est ce qui est en train d'être fait avec les Américains", s'est félicité le président Recep Tayyip Erdogan, sans toutefois avancer un calendrier du "processus" devant permettre au futur "centre d'opérations" d'aboutir à cette "zone de sécurité".

- Menaces d'intervention -

La Turquie avait multiplié ces derniers jours les menaces d'intervention contre les positions kurdes dans cette région, après des mois de négociations infructueuses avec les Etats-Unis sur l'idée de zone de sécurité, née en janvier après l'annonce d'un futur retrait américain de Syrie. Mardi encore, M. Erdogan affirmait que, faute d'accord, il lancerait "très bientôt" une opération.

Le président turc, en difficulté sur la scène politique intérieure, "avait besoin d'afficher sa fermeté en matière de sécurité et sa volonté d'alléger la pression que font peser sur la Turquie les millions de réfugiés", estime Nicholas Heras, expert au Center for a New American Security.

"Les Etats-Unis ont entamé un processus pour donner à Erdogan une présence, sous surveillance, à l'est de l'Euphrate, et la réinstallation ordonnée de certains réfugiés", ajoute-t-il.

L'absence de détails laisse toutefois penser qu'il s'agit "plutôt d'un engagement à poursuivre les discussions plutôt que d'un vrai compromis", dit à l'AFP Nicholas Danforth, du cercle de réflexion The German Marshal Fund of the United States. "Si ces discussions sur la zone de sécurité capotent, Ankara va probablement menacer à nouveau de mener des actions unilatérales", prévient-il.

Le soutien de Washington aux YPG empoisonne depuis plus de trois ans les relations entre les deux pays alliés au de l'Otan. Cette milice est l'épine dorsale des Forces démocratiques syriennes (FDS), une coalition kurdo-arabe que les Etats-Unis et d'autres pays occidentaux, comme la France, ont appuyée et armée contre l'EI.

Mais Ankara, qui dénonce les liens entre les YPG et le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), qui livre une sanglante guérilla en Turquie depuis 1984, redoute que l'implantation d'une zone autonome kurde à sa frontière ne galvanise les velléités séparatistes sur son sol.

En 2016, l'armée turque a lancé une offensive terrestre dans le nord-ouest de la Syrie contre l'EI et les YPG. L'an dernier, elle a mené une deuxième offensive contre les combattants kurdes, s'emparant de l'enclave d'Afrine.

Avec AFP

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