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Somalie, un scrutin aussi incertain que risqué


Le président somalien Hassan Sheikh Mohamud lors d'une conférence de presse à Mogadishu, Somalie, 12 septembre 2012.
Le président somalien Hassan Sheikh Mohamud lors d'une conférence de presse à Mogadishu, Somalie, 12 septembre 2012.

Si un décret présidentiel a validé en mai une loi qui doit permettre la tenue d'élections en Somalie, ces dernières n'auront probablement pas lieu en août, et ne ressembleront en rien aux scrutins organisés ailleurs dans le monde.

Vingt-cinq ans de guerre civile en Somalie ont exporté l'insécurité chez ses voisins et envoyé un million de réfugiés à travers le monde, mais la communauté internationale espère que les prochaines élections générales, prévues en août, amorceront le retour à la stabilité de ce pays de la Corne de l'Afrique.

Ces élections sont-elles cruciales?

Preuve que la pression internationale sur la Somalie augmente, le Conseil de sécurité de l'ONU a mandaté en mai une visite de haut rang dans la capitale Mogadiscio, théâtre encore cette semaine d'un attentat islamiste meurtrier.

Les dernières élections - législatives et présidentielle - en 2012, étaient déjà soutenues par l'ONU, mais n'avaient pas été le succès espéré. Le scrutin prévu cette année ne sera pas non plus la panacée aux problèmes somaliens, mais il est un pas dans la bonne direction.

"Nous sommes arrivés à un point crucial: il faut que le pays passe de la phase humanitaire à la phase de développement", a souligné le ministre somalien de la Planification et de la Coopération internationale, Abdirahman Aynte, lors de la visite onusienne.

Auront-elles lieu en août?

Les différents acteurs se sont publiquement engagés à respecter la date limite du mois d'août, prévue par la Constitution de 2012 et privilégiée par une communauté internationale partisane des mandats de quatre ans. Mais des querelles politiciennes pourraient compromettre cette échéance.

Des diplomates assurent sous couvert de l'anonymat qu'ils accepteront un retard s'il ne s'étend pas au-delà de "l'année calendaire en cours".

Et en coulisses, certains politiciens somaliens se sont déjà lancés dans le jeu des alliances et marchandages pré-électoraux en vue de rester, ou entrer, au parlement.

Élections ou processus électoral?

La communauté internationale évoque un "processus électoral" plutôt que des "élections" afin de décrire un scrutin qui ne ressemble en rien aux élections occidentales et coûtera environ 12 millions de dollars.

Au lieu du suffrage universel promis par la Constitution, ce sont des représentants de clans qui choisiront les députés tandis que les différents états fédéraux du pays choisiront les membres de la chambre haute du parlement, qui n'existe pas encore. Ces élections marqueront de fait l'avènement d'un système bicaméral.

Ensemble, députés et sénateurs choisiront un président.

En quoi représentent-elles un progrès?

Le scrutin n'est certes pas ce qui avait été promis aux Somaliens, mais il représente une avancée certaine et sera - littéralement - 100 fois plus inclusif que le précédent.

Jusqu'à 14.000 délégués choisis par les clans et organisés en six "collèges électoraux" participeront au choix des 275 députés, dont 30% seront des femmes. En 2012, seuls 135 chefs de clans avaient participé au processus, au cours duquel des sommes immenses avaient été échangées.

Sur les 54 sièges du Sénat, 48 seront répartis entre les six états fédéraux tandis que la région semi-autonome du Puntland et la république autoproclamée du Somaliland en recevront trois chacune.

Le clan sera donc cette fois encore au coeur du processus électoral, mais comme le formule Michael Keating, le plus haut représentant de l'ONU en Somalie: "Pour sortir du système des clans, la Somalie doit travailler au sein de ce système".

La promesse du suffrage universel a elle été repoussée à 2020.

Qu'en est-il des shebab?

Les islamistes somaliens shebab, chassés de Mogadiscio en 2011 par la mission de l'Union africaine (Amisom), ont juré la perte du gouvernement central. Ils verront certainement ces élections comme une opportunité de mener des attaques.

Le groupe a une puissance de feu suffisante pour perturber le scrutin par des attaques contre des bases militaires étrangères ou des civils, des attentats-suicides, des tirs de mortiers sur des rassemblements de collèges électoraux, des assassinats de candidats, ce qui minerait la légitimité du nouveau gouvernement, voire entraverait sa formation.

"Les shebab ne sont en aucun cas finis", a assuré Matthew Mycroft, l'ambassadeur du Royaume-Uni auprès de l'ONU, lors de la visite du Conseil de sécurité, durant laquelle les craintes sécuritaires ont limité les déplacements de la délégation au seul aéroport de Mogadiscio.

Avec AFP

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