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Quand les Nigérians s'en remettent à Dieu pour trouver l'amour


Fidèles priant dans une église évangélique de l'Afrique de l'Ouest (ECWA) à Abuja, Nigeria, 11 mai 2014.
Fidèles priant dans une église évangélique de l'Afrique de l'Ouest (ECWA) à Abuja, Nigeria, 11 mai 2014.

Ils sont des milliers à pénétrer dans l'immense église, juste après l'aube, en quête d'amour et de conseils avisés. Au Nigeria, les mouvements évangéliques guident leurs fidèles dans toutes les étapes de leur vie, jusque dans les rapports conjugaux.

Ce "sommet des célibataires" est l'un des nombreux évènements religieux organisés tous les ans en février dans le pays le plus peuplé d'Afrique, où le mariage reste une institution majeure.

Mais la frénésie de la vie quotidienne dans la mégalopole économique de Lagos et la récession qui touche durement la majorité des Nigérians laissent peu de répit pour trouver l'amour.

"La Montagne des ministères du feu et des miracles" a donc décidé de leur offrir ses services, et l'initiative a du succès, à en juger par la foule qui se presse dans le vaste complexe baptisé "Ville de prière", situé à Ibafo, à la sortie de Lagos.

Son programme "Gen218" - en référence au verset de la Genèse "Il n'est pas bon que l'homme soit seul" - promet d'enseigner des astuces pour choisir le bon partenaire et éviter les pièges. Les plus chanceux pourront peut-être même trouver dans l'assemblée de croyants leur future moitié.

Michelle Michaels, une fonctionnaire de 37, espère bien que son tour viendra. "Je suis célibataire et non mariée. Evidemment, je recherche cela (le mariage)", confie-t-elle à l'AFP.

"Mais il faut bien faire les choses", explique-t-elle d'un air sérieux. "Le mariage peut s'avérer catastrophique. Le taux de divorce est très élevé aujourd'hui et je ne veux pas y contribuer".

-24 heures/24, 7 jours/7-

D'une capacité d'accueil impressionnante de plus de 200.000 personnes, les vastes chapiteaux du complexe sont ouverts "24 heures/24, 7 jours/7, non-stop".

Le sommet des célibataires démarre vers 8h30, lorsqu'une chanteuse pimpante en tailleur et cravate rouge entonne de ballades, qui font davantage penser à de la pop-rock qu'à du gospel.

Une demi-heure plus tard, les fidèles surexcités se déhanchent dans les allées, et à 10H30, sous le coup de l'émotion, beaucoup sont en larmes. Certains étalés face au sol, immobiles, comme en extase.

Le sommet semble alors atteindre son point d'orgue, mais il n'a même pas encore commencé. Le pasteur Daniel Kolawole Olukoya, la superstar attendue par la foule, n'entrera en scène que quatre heures plus tard.

Différentes églises organisent des "sommets de célibataires", où l'on prodigue des conseils divins comme l'abstinence jusqu'au mariage, avec beaucoup de louanges.

Le pasteur Matthew Ashimolowo, du "Centre chrétien international de Kingsway", a tenu son propre sommet début février. Il y a repris les grandes lignes de son best-seller, "Ne fréquentez pas les diables" (Do not Date Devils).

Quelques jours plus tard, le couple de prêcheurs Bisi et Yomi Adewale, du "Ministère du renforcement de la famille", organisaient un événement sur le thème "Douze relations que vous devez éviter à tout prix".

"Les célibataires ne sont pas seulement là pour rencontrer de futurs partenaires sanctifiés, mais aussi pour acquérir les facultés spirituelles et les techniques de base pour fonder un foyer riche et prospère", analyse Nimi Wariboko, spécialiste du pentecôtisme et professeur en théologie à l'université de Boston.

"Les sommets sont également des lieux de plaisir, des espaces où l'on peut faire la fête au nom de la foi et vivre l'expérience d'une grande libération émotionnelle sans culpabilité", dit-il. "C'est un package de services destiné aux Nigérians désireux de passer d'une étape de la vie à une autre."

-'Homme-enfant' et 'femme acide'-

Si "la Montagne des ministères du feu et des miracles" peut paraître conservatrice à certains égards - les femmes doivent par exemple se couvrir les cheveux à l'église -, elle peut se montrer libérale sur les traditions.

Ses prêcheurs condamnent les mariages forcés, les mariages précoces, la polygamie et les mariages "hérités", qui prévoient qu'une veuve soit "léguée" à un autre membre de la famille et qui existent encore aujourd'hui au Nigeria.

"Il y a eu une évolution, du mariage arrangé vers le mariage d'amour. Et bien sûr, partager l'amour de Jésus-Christ est une manière de légitimer le choix du futur conjoint", explique Daniel J. Smith, professeur d'anthropologie à l'Université Brown aux États-Unis.

Le pasteur Olukoya demande toutefois de la patience et met en garde: des voeux précipités peuvent déboucher sur un mariage malheureux avec ce qu'il appelle un "homme-enfant" - quelqu'un qui "aime sa mère plus que sa femme" - ou une "femme acide" - une femme qui, "quand elle parle, vous donne envie de vous suicider".

"Être seul n'est pas une mauvaise chose", en conclut Oluboyede Oluwatosin, un technicien de 31 ans qui assiste à son premier sommet de célibataires.

Selon lui, "c'est bien de se marier, mais on ne se lance pas dans l'aventure comme ça, il faut d'abord une formation."

Avec AFP

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