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Procès en France : des survivants du génocide rwandais ont vu un accusé parmi les tueurs


Octavien Ngenzi et Tito Barahira, représentés ici par des leurs avocats lors d’une audience au palais de justice de Paris à Paris, France, le 10 mai 2016. Ils sont accusés d'avoir incité les foules à massacrer des centaines de Tutsis dans une église de la ville de Karabondo. REUTERS / Gonzalo Fuentes - RTX2DLXP
Octavien Ngenzi et Tito Barahira, représentés ici par des leurs avocats lors d’une audience au palais de justice de Paris à Paris, France, le 10 mai 2016. Ils sont accusés d'avoir incité les foules à massacrer des centaines de Tutsis dans une église de la ville de Karabondo. REUTERS / Gonzalo Fuentes - RTX2DLXP

Armé d'une lance ou d'un fusil, haranguant des tueurs ou portant lui-même les coups: des survivants du génocide rwandais sont plusieurs à avoir vu l'ancien bourgmestre Tito Barahira, jugé en France, participer aux massacres à Kabarondo (sud-est).

Depuis bientôt un mois, Barahira comparaît à Paris avec son successeur à la tête de la localité, Octavien Ngenzi, pour crimes contre l'humanité et génocide, en particulier pour le massacre de centaines de Tutsi réfugiés dans l'église du village le 13 avril 1994.

Ce jour-là, Jean-Damascène Rutagungira, un réfugié tutsi qui s'était "mêlé à la foule des tueurs", l'a vu encourager les génocidaires.

"Une vieille femme, une certaine Joséphine Mukaruhigira, est sortie de l'église. Elle a vu Barahira et s'est écriée: +Toi, Barahira, tu sais que je suis hutu+", a-t-il raconté mardi.

Il explique qu'un jeune milicien de la commune, dont le père était en conflit avec elle, a répondu: "Comment peux-tu être hutu alors que tu nous a spoliés?". Le premier, "Barahira l'a frappée sur les doigts, puis à la nuque". A leur tour, les miliciens extrémistes "Interahamwe l'ont frappée, puis dépouillée de ses habits".

Originaire de la même colline que l'ancien bourgmestre, Jean-Damascène Rutagungira est formel: "c'était bien Barahira". Il l'a vu plusieurs fois ce jour-là, sur la place du marché où des réfugiés avaient été attirés dans un guet-apens vers 9h00, puis dans l'après-midi, "armé d'une lance", devant l'église pendant l'assaut.

Il assure avoir distinctement entendu Barahira et Ngenzi donner des ordres aux tueurs: "Machetez-les". Lui a assisté impuissant au massacre de vingt-et-un membres de sa famille, dont sa femme, son bébé d'un mois et ses deux enfants de 2 et 6 ans.

Comme lui, plusieurs témoins ont vu Barahira parmi les tueurs, la plupart du temps une lance à la main. Marie Mukamunana, une agricultrice tutsi dont la famille a été décimée dans l'église, a vu le bourgmestre "armé d'un fusil".

A l'avocat de Barahira qui s'étonne des contradictions des témoins, Jean-Damascène Rutagungira répond: "quand 5.000 personnes se font massacrer par 10.000 personnes, on ne voit pas tous la même chose".

Dans l'église du village, l'abbé avait cessé de compter les arrivées le 12 à la mi-journée: il y avait alors plus de 3.500 personnes entassées, des Tutsi pour la plupart mais aussi des Hutu, fuyant le déchaînement de violences dans la campagne alentour.

Les accusés, qui nient toute participation aux massacres, devraient être à nouveau interrogés en début de semaine prochaine.

Avec AFP

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