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Problèmes dans le règlement des conflits agro-pastoraux au Cameroun


Une communauté victime d’expropriation dans le village Nakong dans le nord du Cameroun, le 20 juin 2019. (Crédit photo/ SNE).
Une communauté victime d’expropriation dans le village Nakong dans le nord du Cameroun, le 20 juin 2019. (Crédit photo/ SNE).

De nombreux dysfonctionnements affectent le règlement des conflits agro-pastoraux au Cameroun, d’après une récente étude des experts locaux en gouvernance foncière.

Les personnes défavorisées et vulnérables au Cameroun paient le plus lourd tribut des dysfonctionnements dans le règlement des conflits agro-pastoraux.

Les difficultés des conflits agro-pastoraux
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Au nombre de ces dysfonctionnements : les charges des frais de sessions de règlement des litiges. "Les coûts qu’impliquent le règlement des conflits sont souvent payés par les communautés locales et nous pensons que c’est actuellement très élevé", explique Jitar Christian Taku, géographe environnementaliste et co-auteur de l’étude.

Or l’article 3 du décret du 3 juillet 1978 qui fixe les modalités de règlements des litiges agro-pastoraux, précise que "les frais de fonctionnement de la commission sont inscrits au budget annuel du ministère chargé des Domaines, du cadastre et des affaires foncières". La violation de cette disposition empêche les plus démunis de réclamer leurs droits fonciers.

Les défenseurs des droits fonciers collectifs au Cameroun au cours d’un atelier à Yaoundé, le 25 juillet 2019. (Crédit photo/SNE)
Les défenseurs des droits fonciers collectifs au Cameroun au cours d’un atelier à Yaoundé, le 25 juillet 2019. (Crédit photo/SNE)

L’autorité des chefs traditionnels

L’autre problème majeur est relatif à la marginalisation des autorités traditionnelles au sein de la commission de règlement des litiges agro-pastoraux.

Il arrive parfois que "le chef du village est informé à la dernière minute sur la tenue d’une session de règlement d’un conflit agro-pastoral", fait remarquer Moise Mbimbe Nlom, juriste et coordonnateur d’action pour le développement communautaire.

Dr Tany Robinson, chef supérieur dans la région du sud assiste à un atelier de planification et de plaidoyer sur la gouvernance foncière au Cameroun. Yaoundé, le 25 juillet 2019. (VOA/Emmanuel Jules Ntap)
Dr Tany Robinson, chef supérieur dans la région du sud assiste à un atelier de planification et de plaidoyer sur la gouvernance foncière au Cameroun. Yaoundé, le 25 juillet 2019. (VOA/Emmanuel Jules Ntap)

"Les bonnes lois existent, mais il y a une mauvaise application", déplore le docteur Tany Robinson, chef supérieur dans la région du Sud-Ouest.

Lors des règlements des conflits sur le terrain, "les autorités administratives se comportent comme les seuls gestionnaires de la terre, du coup notre position a diminué et cela nous fait perdre en crédibilité auprès des communautés locales", témoigne le docteur.

Commentant cet aspect de l’étude, Jean-Marie Mama, chef supérieur de 1er degré du groupement Tchanga Manga VI dans la région du centre, confie "qu’il a été mis de côté par l’ancien gouverneur de la région du centre lors de la phase des indemnisations des riverains de l’autoroute Yaoundé-Douala qui traverse le village lobo dont il est territorialement compétent".

Au regard de ces dérives, "le gouvernement devrait renforcer les communautés locales et leurs leaders pour résoudre leurs litiges en utilisant la diplomatie traditionnelle", préconise le docteur Tany Robinson.

Vulgarisation de la loi

Le texte qui organise le fonctionnement de la commission de règlement des litiges agro-pastoraux date de 1978. "Ce texte est obsolète et ne reflète pas la réalité du terrain", confie à VOA Afrique le juriste Moise Mbimbe Nlom.

Ce dernier a fait aussi le constat "d’une très grande méconnaissance par les populations rurales du décret présidentiel signé il y a 41 ans".

"Avec le document que nous avons produit, les gens savent que quand la commission est saisie, elle a trois jours pour descendre sur le terrain. Donc ça ne dépend pas de l’agenda du sous-préfet, c’est une obligation textuelle" rappelle-t-il, lors de la présentation de des résultats de l’étude à la presse.

La coalition internationale pour l’accès à la terre (ILC) encourage la gouvernance foncière centrée sur les personnes démunis et vulnérables. Au Cameroun, cet objectif est poursuivi par une plate-forme d’une vingtaine d’institutions, sous la coordination de la Stratégie Nationale d’Engagement SNE.

Depuis quatre ans, la SNE s’emploie à faire avancer la problématique de la réforme foncière. Elle apporte par exemple une assistance judiciaire aux communautés locales et autochtones victimes de violations des droits fonciers.

"Nous nous battons pour la sécurisation des droits fonciers collectifs des communautés locales et autochtones, mais on a l’impression que la législation en place favorise certaines personnes", dénonce Michelle Sonkoue, facilitatrice de la SNE au Cameroun.

Au Cameroun, le seul moyen de sécurisation foncière valable du point de vue du droit moderne, c’est le titre foncier. Pourtant, "sur le terrain le constat que l’on fait est que les populations qui vivent en zones rurales, n’ont pas les moyens d’accéder au titre foncier", regrette la responsable de la SNE.

Faute de titre foncier, le nombre de litiges agro-pastoraux s’est accru au fil du temps. Dans le nord-ouest en zone anglophone, les experts affirment que 52% des villages sont concernés par ce problème.

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