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Amnesty accuse l'armée nigériane d'abus sexuels contre les victimes de Boko Haram


Camp de déplacés, Maiduguri, Nigeria, le 30 août 2016.
Camp de déplacés, Maiduguri, Nigeria, le 30 août 2016.

Des femmes ont été violées par des soldats et des miliciens en échange de nourriture, et des milliers d'autres sont mortes de faim dans les camps de déplacés du nord-est du Nigeria, où sévit le groupe djihadiste Boko Haram, selon un rapport d'Amnesty International

Ce document accuse l'armée nigériane et la milice engagée à ses côtés contre Boko Haram d'avoir "séparé les femmes de leur époux" et de les avoir "enfermées dans des camps annexes isolés, où elles sont violées" depuis 2015, époque à laquelle les autorités ont repris le contrôle des territoires occupés par les insurgés.

>> Lire aussi : L'insurrection de Boko Haram et le lac Tchad

La plupart des hommes et des adolescents étaient détenus séparément pour s'assurer qu'ils n'étaient pas liés au groupe djihadiste, les femmes se retrouvant alors seules pour subvenir aux besoins de leurs familles, affirme l'ONG de défense des droits humains.

"Au lieu de recevoir une protection de la part des autorités, les femmes et les filles ont été contraintes de se faire violer pour se nourrir ou ne pas mourir de faim", a déclaré Osai Ojigho, directrice d'Amnesty Nigeria, citée dans le rapport.

Le rapport, qui s'appuie sur plus de 250 entretiens, porte sur les camps établis dans sept villes de l'Etat du Borno - le plus touché par l'insurrection -, dont Bama, Banki, Rann et Dikwa.

Plusieurs d'entre elles ont confié avoir été violées fin 2015 et début 2016 dans le camp Hôpital de Bama, "où des conditions proches de la famine sévissaient".

"Un [milicien] est venu et m'a apporté de la nourriture. Le lendemain, il m'a dit que je devais aller chercher de l'eau chez lui. Il a alors refermé la toile de la tente derrière moi et m'a violée", a ainsi raconté Ama, 20 ans.

Certaines ont dit avoir été contraintes de devenir les "compagnes" de membres des forces de sécurité "pour ne pas mourir de faim", selon Amnesty, ajoutant que les témoignages font état d'un "système bien organisé" d'exploitation sexuelle.

Par ailleurs, des milliers de personnes seraient mortes de faim dans ces camps, où sévissaient d'importantes pénuries de nourriture, entre début 2015 et juin 2016, lorsque les organisations humanitaires sont arrivées massivement dans le Nord-Est.

L'ONG dénonce l'"impunité" dont jouissent les coupables alors qu'une commission présidentielle a été mise sur pied en août 2017 pour enquêter sur les abus attribués à l'armée, s'est indigné Amnesty.

"Personne ne semble avoir été traduit en justice", affirme Amnesty. "On ne sait toujours pas si des enquêtes ont réellement eu lieu, car aucune conclusion n'a été rendue publique".

L'armée nigériane a durement dénoncé ce rapport. "Ces fausses informations peuvent mettre en péril le bon travail, au service de la nation, mené par nos soldats patriotes", a écrit dans un communiqué John Agim, porte-parole des armées.

Pour Garba Shehu, porte-parole de la présidence, "il ne s'agit que d'un rapport recyclé de ce qui a été écrit en 2015, puis en 2016, puis l'année encore suivante".

Amnesty International dénonce régulièrement des exactions commises par les forces de sécurité nigérianes.

Le conflit avec Boko Haram a fait près de 2,6 millions de déplacés, dont plus d'un million ne peuvent toujours pas rentrer chez eux, et plus de 20.000 morts depuis 2009 dans le Nord-Est.

Avec AFP

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