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Lutte contre l'extrémisme: les musulmans britanniques se veulent acteurs et non victimes


Se sentant ciblée à outrance par les politiques contre la radicalisation du gouvernement britannique, la communauté musulmane du Royaume-Uni tente de s'organiser pour trouver elle-même des solutions et participer plus activement à la lutte contre l'extrémisme et le terrorisme.

"Pour réussir, toute politique doit considérer la communauté musulmane comme partie de la solution et non comme partie du problème", a martelé Shuja Shafi, secrétaire général du Conseil des musulmans du Royaume-Uni (MCB), qui organisait une conférence jeudi à Londres.

Une dizaine d'autres sont prévues dans tout le Royaume-Uni, pour tenter d'amener la communauté musulmane à débattre des solutions à apporter aux défis de la radicalisation et du terrorisme.

"Nous pensons que le terrorisme jette une ombre sur notre communauté depuis trop longtemps", a expliqué M. Shafi.

Le gouvernement britannique, confronté au départ de centaines de jeunes qui rejoignent les rangs de l'organisation de l'État islamique (EI), a plusieurs fois appelé la société civile musulmane à l'aider à prévenir ce phénomène.

Mais ces tentatives ont jusqu'ici été plutôt mal reçues, en particulier une lettre envoyée en janvier à quelque 1.000 imams les invitant à "expliquer et prouver comment la foi en l'islam peut faire partie de l'identité britannique".

- 'Culture de la surveillance' -

Surtout, il est ressorti de la conférence que les musulmans britanniques ont l'impression d'être la cible principale du programme de prévention de l'extrémisme "Prevent", qui avait été lancé après les attentats de juillet 2005 à Londres.

"Prevent est censé concerner tous les types d'extrémismes mais toutes les preuves montrent qu'il est focalisé sur les étudiants musulmans", a accusé Shelly Asquith, qui fait campagne contre ce programme au sein de l'association étudiante NUS.

Citant plusieurs exemples d'enfants signalés aux autorités, comme celui d'un jeune garçon qui a parlé d'éco-terrorisme en classe ou d'un autre qui a demandé pourquoi il n'y avait pas de salle de prière dans son école, elle estime que Prevent "crée une culture de la surveillance".

Depuis le début de l'année, les autorités locales, les écoles et les universités se doivent de signaler toute personne présentant selon elles des signes de radicalisation.

"Il y a un message très important que nous devons transmettre au gouvernement: +si vous voulez véritablement travailler main dans la main avec la communauté (musulmane), cela ne peut pas être fait via la sécurité, via Prevent", a déclaré Yasmine Ahmed, directrice de Rights Watch UK.

L'une des difficultés dans la prévention de la radicalisation vient du fait que les ressorts n'en sont pas forcément bien compris, ont souligné plusieurs participants de la conférence.

"Quel est le point de basculement ? Pourquoi de jeunes citoyens britanniques décident, malgré tout ce que nous avons à leur offrir, de se rendre en Syrie ? Le Premier ministre est perplexe, je suis perplexe", a reconnu le député travailliste Keith Vaz, président de la commission parlementaire des Affaires intérieures.

- 'Être plus pro-actifs' -

"Les raisons de la radicalisation de ces jeunes gens se rendant en Syrie sont complexes et multiples. Ce n'est toujours pas clair, il n'y a toujours pas de consensus", a renchéri Catriona Roberston, directrice du Christian-Muslim Forum.

D'après des chiffres officiels, plus de 700 Britanniques sont partis combattre en Syrie et en Irak, parmi lesquels près de 300 seraient rentrés au Royaume-Uni.

Les médias sociaux, allégrement utilisés par l'EI pour sa propagande, sont évidemment pointés du doigt.

Pour James Ball, journaliste spécialisé dans la surveillance, il est difficile d'agir contre des contenus qui sont pour la plupart postés hors du Royaume-Uni. De même, bannir quelqu'un de ces plateformes est concrètement difficile, a-t-il souligné.

"Nous devons être plus pro-actifs, en disant des choses positives sur Twitter", a proposé Dal Babu, ancien commissaire en chef de la police et rare musulman à y avoir atteint un poste de cette importance.

"C'est notre responsabilité en tant que musulmans d'empêcher ces terroristes qui font un mauvais usage du nom de l'islam", a abondé Shaykh Ibrahim Mogra, secrétaire général adjoint du MBC.

Avec AFP

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