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Les étudiants algériens ne décolèrent pas et dénoncent la "ruse" de Bouteflika


Des employés de la ville installe le drapeau algérien et un poster du président Abdelaziz Bouteflika, à Alger, en Algérie, le 26 avril 2016.
Des employés de la ville installe le drapeau algérien et un poster du président Abdelaziz Bouteflika, à Alger, en Algérie, le 26 avril 2016.

Des milliers d'étudiants ont manifesté mardi à Alger, et dans d'autres villes du pays, pour dénoncer une "ruse" d'Abdelaziz Bouteflika pour se maintenir au pouvoir, au lendemain du retrait de sa candidature à un 5e mandat et du report sine die de la présidentielle.

"Les étudiants résistent à la prolongation du 4e mandat!", ont scandé les manifestants -auxquels se sont joints des enseignants-, ont constaté des journalistes de l'AFP. Ils ont brandi de nombreux drapeaux et défilé joyeusement dans les artères près de la Grande-Poste, bâtiment emblématique du coeur de la capitale algérienne.

"Pacifique, pacifique", ont-ils également clamé, reprenant un des mots d'ordre de la contestation née le 22 février contre la volonté du président Bouteflika de briguer un 5e mandat à la présidentielle initialement prévue le 18 avril.

"Pas de ruse, Bouteflika", ont encore crié les étudiants algérois, qui manifestaient pour le 3e mardi consécutif, après des appels réitérés sur les réseaux sociaux dès le "message à la Nation" de M. Bouteflika lu lundi soir à la TV nationale.

Confronté à une contestation inédite depuis son élection il y a 20 ans, le chef de l'Etat algérien a annoncé qu'il renonçait à briguer un 5e mandat et a reporté sine die la présidentielle, sans fixer d'échéances.

Il a prolongé par là même son mandat jusqu'à un prochain scrutin dont la date sera fixée par une "Conférence nationale", dont il souhaite que les travaux s'achèvent "avant la fin de l'année".

- Mini-dazibao -

"C'est une ruse pour gagner du temps, pour tenter d'enrayer le mouvement, le temps de ramener une autre marionnette comme président", a déclaré à l'AFP Amel, étudiante en Mathématiques-Informatique à Alger.

"Bouteflika se moque de nous. Depuis le début il voulait prolonger son mandat (...) il a eu ce qu'il voulait (...) de manière illégale", a estimé Ghania Bellal, 19 ans, étudiante en 2e année de journalisme à Alger.

Signe de la réactivité des réseaux sociaux et des protestataires, sur les nombreuses pancartes, le "5", cerclé et barré de rouge, logo de la contestation initiale contre un 5e mandat, a laissé la place à un "4+", refus du prolongement de l'actuel 4e mandat de M. Bouteflika, qui expire le 28 avril.

Sur la Place Audin, non loin de la Grande-Poste, les étudiants ont recouvert un mur de mini-dazibao -pensées, slogans et revendications, drôles, revendicatifs ou poétiques- sur des "post-it" multicolores.

(Gouvernement de) "40 voleurs vs 40 millions" (d'habitants), "10 ans de décennie noire (de guerre civile) + 20 ans de Boutef = jeunesse perdue", "le système, on le chasse par la porte, il revient par la fenêtre", peut-on notamment lire.

Bouteflika cède finalement face à la pression de la rue
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Les étudiants se sont également mobilisés dans le reste de l'Algérie: notamment à Constantine, 3e ville du pays, où près d'un millier d'entre eux a défilé avec des enseignants, selon un journaliste local. Ou encore à Béjaïa, grande ville de Kabylie (nord), où ils étaient plusieurs milliers selon un étudiant.

D'importantes manifestations ont aussi eu lieu à Tizi-Ouzou et Bouira, également en Kabylie, selon les images relayées sur les réseaux sociaux et par des médias.

A Annaba (nord-est), quelques centaines d'étudiants ont défilé, alors que des assemblées générales se déroulaient sur plusieurs campus.

A l'international, la France, ancienne puissance coloniale, a salué mardi, par la voix du président Emmanuel Macron, la décision "du président Bouteflika", tout en appelant à "une transition d'une durée raisonnable".

Cette réaction a été mal perçue par les étudiants à Alger, comme on pouvait le lire sur plusieurs post-it: "Hé la France, on a eu notre indépendance seuls, on a vaincu le terrorisme seuls, on sortira le système seuls" ou "la France et les autres pays: si vous soutenez le mal, vous êtes le mal".

L'importante mobilisation étudiante constitue une première indication de l'apparent échec des annonces du chef de l'Etat à calmer la contestation, d'une ampleur inégalée depuis sa première élection en 1999.

Mais le véritable révélateur sera vendredi, premier jour de week-end et traditionnelle journée de manifestation depuis bientôt trois semaines.

- "Manoeuvres désespérées" -

Sur les réseaux sociaux, le hashtag "Mouvement_du_15_Mars" a déjà remplacé ceux des 22 février, 1er et 8 mars --les trois vendredi précédents théâtres de manifestations massives--, en appelant à un 4e vendredi de mobilisation.

Si le camp présidentiel -Front de libération nationale (FLN) du chef de l'Etat ou Rassemblement national démocratique (RND), son principal allié- estiment que les propositions de M. Bouteflika répondent "aux aspirations du peuple", elles ont été critiquées par l'opposition, marginalisée par la contestation populaire.

L'Avant-garde des Libertés, parti d'Ali Benflis, ancien Premier ministre de M. Bouteflika passé à l'opposition, y voit une de "ces dernières manœuvres désespérées".

Principal parti islamiste, le Mouvement de la société pour la paix (MSP) a dénoncé une tentative "de contourner la volonté des Algériens", tandis que le petit Parti des Travailleurs (PT) a jugé que "la prolongation du 4e mandat" traduisait "une volonté de travestir la volonté de l'écrasante majorité du peuple".

Après deux semaines d'hospitalisation en Suisse, Abdelaziz Bouteflika, 82 ans et sérieusement affaibli à la suite d'un AVC en 2013, est apparu lundi soir --au lendemain de son retour-- sur des images diffusées par la télévision nationale, peu après ses annonces.

On le voit recevoir successivement, dans sa résidence médicalisée de Zéralda, près d'Alger, plusieurs hauts responsables du pays.

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