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Le pape François met en exergue la famille africaine


Le pape François lors de son audience générale hebdomadaire, place Saint-Pierre au Vatican, le 6 avril 2016.
Le pape François lors de son audience générale hebdomadaire, place Saint-Pierre au Vatican, le 6 avril 2016.

L’Afrique est citée en exemple dans les nouvelles directives sur la famille et le mariage du pape François dans son document intitulé "Amoris Laetitia". François tend la main aux divorcés remariés, et à tous ceux vivant "en situation irrégulière" mais sans bouger sur les homosexuels.

"Dans certains pays, spécialement en différentes parties de l’Afrique, la sécularisation n’a pas réussi à affaiblir certaines valeurs traditionnelles, et dans chaque mariage, se réalise une forte union entre deux familles élargies, où l’on garde encore un système bien défini de gestion des conflits et des difficultés », écrit le souverain pontife.

Albert Mianzoukouta, journaliste à Radio Vatican
Albert Mianzoukouta, journaliste à Radio Vatican

"Il parle notamment - et cela est un peu surprenant et à la fois rafraîchissant - de l’expérience du mariage en Afrique, qui inclut trois étapes particulières : le mariage traditionnel, celui devant l’Etat et celui devant les autorités de l’Eglise, quelles qu’elles soient, catholiques, protestantes ou autres", confie à VOA Afrique Albert Mianzoukouta, journaliste à Radio Vatican dans un entretien téléphonique depuis Rome en Italie.

"Ce texte d’une densité énorme, un document de neuf chapitres, dans lesquels le pape insiste sur le fait que la société évolue. L’institution du mariage, elle, doit quand même rester comme une sorte de boussole qui n’aille pas dans tous les sens et qui n’embrasse pas toutes les commodités du moment sans toutefois renier le besoin de s’adapter aussi aux défis nouveaux qui se posent", indique Albert Mianzoukouta.

Albert Mianzoukouta joint par Jacques Aristide
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Cette "exhortation apostolique" de quelque 260 pages répond en partie aux attentes des divorcés remariés civilement, en appelant à leur donner toute leur place dans l'Eglise.

Et sans remettre en cause le dogme du mariage catholique indissoluble, il n'exclut pas un accès au cas par cas à la communion.

Jorge Bergoglio reconnaît aussi une valeur à certaines unions libres, mais uniquement celles entre un homme et une femme, stables et soucieuses des enfants.

Ces directives sur la famille et le mariage étaient très attendues, après deux synodes (assemblées d'évêques) qui avaient, en octobre 2014 puis octobre 2015, illustré les profondes divisions de l'Eglise sur sa réponse aux évolutions sociétales.

Résumant l'approche de "miséricorde" qu'il prône dans tant de domaines, Jorge Bergoglio assure: "Je comprends ceux qui préfèrent une pastorale plus rigide qui ne prête à aucune confusion", mais l'Eglise "doit être une mère (...) qui ne renonce pas au bien possible, même si elle court le risque de se salir avec la boue de la route".

"On retrouve dans ce texte l'expérience personnelle du pape François qui a souvent cheminé avec tant de familles en difficulté", a commenté le cardinal de Vienne, Christoph Schönborn, chargé de présenter le texte devant des centaines de journalistes.

Ce fils de divorcés a salué "la force d'autocritique" d'un pape qui a rejeté "un modèle abstrait, loin des situations concrètes" que l'Eglise avait souvent présenté sur la famille. Il s'est félicité que le texte parle positivement "de l'émotion, des passions, de l'éros, de la sexualité".

"La dimension érotique de l'amour" est un "don de Dieu", écrit ainsi le pontife argentin.

La Conférence des baptisé(e)s francophones (réformateurs) a salué le caractère "discrètement subversif" de ce texte.

- Ouvertures discrètes -

Le pape adopte une approche d'ouverture et d'accueil, soulignant à maintes reprises le fait que les personnes en situation "irrégulière" "ne sont pas excommuniées" ni "exclues de la grâce divine".

Pour autant, il n'annonce pas un changement de doctrine général, en particulier pour les divorcés remariés. Ces derniers sont encouragés à participer activement à la vie de leur paroisse et à trouver l'aide d'un prêtre pour se réintégrer.

Dans deux discrètes notes de bas de page, une ouverture aux sacrements pour certains divorcés pas responsables de l'échec de leur mariage, après un chemin de "discernement" et de "repentance", se dessine, à la discrétion des évêques.

"L'exhortation dit sans le dire qu'un couple qui a fait un travail de discernement peut, si sa conscience le lui dicte, et si le prêtre y consent, accéder aux sacrements", s'est ainsi félicitée la Conférence des baptisés.

Le pape "s'appuie sur la doctrine édictée sous Jean Paul II, la norme demeure", mais "les effets (de cette norme) ne doivent pas être les mêmes selon les personnes, même pour la discipline des sacrements", a expliqué à l'AFP le théologien Antonio Spadaro, directeur de la revue jésuite Civilta Cattolica.

Le pape valorise aussi les mariages civils et les unions libres, "signes d'amour" quand elles atteignent "une stabilité consistante", que l'Eglise doit s'efforcer de conduire au mariage.

Ces questions avaient profondément divisé le synode, tout comme celle des homosexuels, qui s'était heurtée à un tir de barrage des prélats du Sud.

Et sur ce point, l'exhortation apostolique reste très timorée: l'exigence du "respect" à l'égard de tous est rappelée, mais le pape s'inquiète surtout des difficultés des parents ayant un enfant gay et insiste sur la conviction qu'une union homosexuelle ne peut pas être assimilée à un mariage.

Pour Andrea Rubera, porte-parole d'une association italienne de gays chrétiens, la quasi-absence des personnes homosexuelles d'"un texte qui parle de la joie de l'amour" est "décevante". "Mais l'Eglise n'était pas prête à faire plus" et selon lui, même si les "magnifiques chapitres" sur la vie maritale et l'accueil des personnes en difficulté n'ont pas été écrits pour elles, rien n'empêche les familles gays de s'y reconnaître.

Le texte porte le style du pape François: un hymne à la famille traditionnelle dans un langage simple, concret, parfois poétique, citant même son film culte, "le Festin de Babette" de Gabriel Axel.

Le texte est aussi un manuel de vie pour les fiancés, la préparation au mariage, les familles au quotidien, le rythme travail-vie privée, l'éducation des enfants, évoquant pour la première fois de manière claire la nécessité d'une éducation sexuelle.

Il donne des conseils pratiques pour les couples: toujours un baiser le matin, sortir ensemble, partager les tâches domestiques... et faire la fête.

Le texte, envoyé à chacun des 4.700 évêques, aborde aussi beaucoup de thèmes qui touchent les familles du Sud, comme les mariages arrangés et la polygamie, les familles divisées par les migrations, les mariages interreligieux, les abus sexuels, les mutilations sexuelles ou les violences contre les femmes.

Avec AFP

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