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Les Maliens élisent leur président malgré la menace jihadiste


Dans un bureau de vote lors du second tour de l'élection présidentielle au Mali, à Bamako le 12 août 2018.
Dans un bureau de vote lors du second tour de l'élection présidentielle au Mali, à Bamako le 12 août 2018.

Les Maliens votaient dimanche au second tour d'une élection dont le président Ibrahim Boubacar Keïta est donné favori malgré des accusations de fraude et une menace jihadiste que cinq années d'interventions militaires internationales n'ont pas réussi à éradiquer.

Déterminant pour l'avenir du Sahel, le scrutin ne déclenche pas les passions au Mali, la victoire semblant déjà promise au sortant, dit "IBK", face à l'opposant Soumaïla Cissé.

Le vainqueur entrera en fonction début septembre avec la lourde tâche de relancer l'accord de paix conclu en 2015 avec l'ex-rébellion à dominante touareg, dont l'application accumule les retards. L'accord avait été signé après l'intervention de l'armée française qui, en 2013, avait repris le contrôle du nord du Mali, où les jihadistes avaient imposé la charia pendant un an.

Malgré la pluie dans plusieurs régions, les bureaux de vote ont commencé à ouvrir comme prévu à 08H00 (GMT et locale). Les 23.000 bureaux, pour plus de huit millions d'inscrits, doivent fermer à 18H00, les résultats étant attendus dans quatre ou cinq jours.

Lors du premier tour le 29 juillet, quelque 3% des bureaux de vote étaient restés fermés en raison de violences, empêchant près de 250.000 Maliens de se rendre aux urnes, surtout dans le Centre et le Nord.

>> Lire aussi : L'aide internationale, un moyen de pression limité sur le processus électoral au Mali

Cette fois, quelque 36.000 militaires maliens, soit 6.000 de plus qu'au premier tour, sont mobilisés pour sécuriser le scrutin avec l'aide des Casque bleus de la Minusma, des forces françaises de l'opération Barkhane et, dans le Nord, où l'Etat est peu ou pas présent, de groupes armés signataires de l'accord de paix.

Malgré cela, le vote n'a pas pu avoir lieu dans le village de Kiname, à 120 km de Tombouctou (nord), où "des hommes armés sont venus et ont emporté tout le matériel électoral au bord du fleuve et l'ont incendié, avant de repartir", a déclaré un habitant joint par l'AFP. Selon des informations de médias locaux, non confirmées officiellement, d'autres bureaux sont restés fermés.

Passe d'armes

A Bamako, le président-candidat et son adversaire se sont livrés à une passe d'armes sur la fraude électorale.

Selon le camp de M. Cissé, des bulletins de vote "circulent dans le pays" depuis plusieurs jours pour faciliter la réélection de M. Keïta. Son chef de campagne, Tiébilé Dramé, a exhibé dans la nuit un carnet de cinquante bulletins "saisi" sur un "agent de Bamako" chargé de leur distribution, preuve selon lui que des bourrages d'urnes étaient en préparation.

Les Maliens manifestent avant le second tour de la présidentielle (vidéo)
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"Il est des manoeuvres dont nous savons qu'elles sont à l'oeuvre pour faire croire que nous serions dans une logique de fraude", a répliqué Ibrahim Boubacar Keïta après avoir voté. "Comment frauder quand on a l'assurance de l'estime de son peuple? Pourquoi essayer de frauder?", a-t-il ajouté.

Les observateurs de l'UE, premier bailleur international du Mali ont cette fois pu se déployer à Gao (Nord), mais toujours pas à Tombouctou et Kidal (Nord), ni Mopti (centre).

Sur le plan sécuritaire, la tension était montée samedi avec l'arrestation de trois membres d'un commando, qualifié de "groupe terroriste", au moment où il "planifiait des attaques ciblées à Bamako pendant le weekend".

Leurs objectifs présumés n'ont pas été dévoilés, mais le pays a connu ces dernières années plusieurs attentats jihadistes, contre des lieux fréquentés par des Occidentaux ou contre les forces militaires, ainsi que des enlèvements d'étrangers et de nombreuses violences intercommunautaires.

"Corriger les erreurs"

Le scrutin se tient dans une relative indifférence de la population, fatiguée par plus de six ans de violences et dont près de la moitié vit sous le seuil de pauvreté malgré un taux de croissance supérieur à 5% et une place de premier producteur africain de coton.

"Le nouveau président, nous espérons qu'il fera mieux, qu'il saura corriger les erreurs", a confié, en gardant son vote "secret", El Hajd Aliou Sow, un retraité de la fonction publique, venu voter dans une école du centre de la capitale où les premiers électeurs se comptaient sur les doigts d'une main.

Grand favori pour décrocher à 73 ans un deuxième mandat de cinq ans, M. Keïta avait récolté 41,70% des suffrages au premier tour, contre 17,78% pour M. Cissé, un ancien ministre des Finances de 68 ans qui n'a pas su unir l'opposition pendant l'entre-deux tours.

La "mobilisation massive", appelée par M. Cissé, est peu probable, la participation n'ayant été que de 42,70% le 29 juillet.

L'affiche manque également cruellement de nouveauté: les deux finalistes ont milité dans le même parti dans les années 1990 puis fait partie des mêmes gouvernements. Ils s'étaient déjà affrontés en 2013, M. Keïta l'emportant à plus de 77%.

"Pour beaucoup, avec cet écart, les dés semblent être jetés", estime le juriste Aboubacar Traore.

Avec AFP

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