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La police marocaine se retire de lieux publics à Al-Hoceïma


La police anti-émeute bloque des protestataires lors d'une manifestation dans la ville d'Al-Hoceïma, Maroc, 1er juin 2017.
La police anti-émeute bloque des protestataires lors d'une manifestation dans la ville d'Al-Hoceïma, Maroc, 1er juin 2017.

Les forces de l'ordre ont entamé un retrait "progressif" de lieux publics symboliques à Al-Hoceïma, un geste apparent d'apaisement après huit mois de contestation populaire contre le pouvoir dans cette région du nord du Maroc.

Les policiers déployés depuis des semaines dans le centre des villes d'Al-Hoceïma et d'Imzouren, épicentres du mouvement revendiquant le développement de la région du Rif, ont entamé un retrait progressif lundi, a annoncé le nouveau gouverneur de la province, Fouad Chourak.

Selon un habitant, la place centrale d'Al-Hoceïma a retrouvé son visage des jours ordinaires, sans les cordons de policiers déployés en masse ces dernières semaines dans cette ville d'environ 60.000 habitants.

Le gouverneur a précisé que ce retrait a été décidé sur les "directives" du roi Mohammed VI pour "garantir les libertés".

"Ce sont des signaux profonds, j'espère qu'ils seront reçus par chacun", a plaidé M. Chourak, promettant "d'autres signaux dans le même sillage".

Le nombre de policiers et de gendarmes déployés dans la province pour contenir les manifestations du "hirak" --la mouvance, nom donné localement à la contestation-- n'a jamais été rendu public.

Mais leur omniprésence dans les lieux publics était dénoncée par les militants comme une nouvelle preuve d'une "militarisation" de la région par le "makhzen" (pouvoir), avec une ville d'Al-Hoceïma "en état de siège".

Les clichés d'une intervention dimanche de dizaines de gendarmes en tenue anti-émeutes jusque sur les plages d'Al-Hoceïma pour dissuader des baigneurs de scander des slogans en faveur du "hirak" a fait le tour des réseaux sociaux.

- Rapport controversé -

Les principaux meneurs de la contestation dans le Rif, dont son leader Nasser Zefzafi, ont été arrêtés fin mai, accusés pour certains de lourdes charges.

Mais les manifestations quasi-quotidiennes ont continué depuis, avec des heurts fréquents avec les forces de l'ordre, et de violents affrontements le 26 juin.

Outre un développement de leur région enclavée, les manifestants réclament désormais en priorité la "libération des détenus".

Des organisations de défense des droits de l'Homme, mais également des voix au sein de la société civile et de la classe politique ont critiqué l'approche "sécuritaire" adoptée par les autorités.

Une centaine de personnes a été placée en détention préventive. Des condamnations allant jusqu'à 18 mois de prison ont été prononcées contre 40 détenus et 18 autres sont poursuivis en liberté provisoire, selon les derniers chiffres officiels.

L'Etat marocain a relancé un vaste programme de développement de cette province, mais le roi a tancé la semaine dernière ses ministres pour le retard de ces projets.

Le retrait policier d'Al-Hoceïma intervient au début de la saison estivale, qui voit chaque année des Rifains de la diaspora en Europe revenir en vacances.

L'impact de ces retours suscite des craintes, alors que des associations de la diaspora affichent un fort soutien au "hirak", et que Nasser Zefzafi avait appelé, avant son arrestation, à une grande marche le 20 juillet.

La presse marocaine a par ailleurs diffusé de premiers extraits d'un rapport -très attendu- du Conseil national des droits de l'homme (CNDH), un organisme officiel, sur les évènements d'Al-Hoceïma.

Ces notes, établies par deux médecins experts et que l'AFP a pu consulter, rapportent des "mauvais traitements" décrits par les prisonniers et concluent à des "suspicions légitimes sur la violation" de leurs droits et un possible recours à "des faits de torture".

Le CNDH a exprimé son "étonnement" sur ces fuites, assurant que ses enquêtes sur Al-Hoceïma n'ont "pas encore abouti".

La police (DGSN) a exprimé "son rejet catégorique des accusations graves (...), publiées sur la base d'un document partiel et non officiel".

La presse marocaine évoquait mardi un "couac", voire un "clash" entre les deux institutions.

Des témoignages similaires avaient déjà été rapportés par la défense des accusés ainsi que par des ONG. Les autorités démentent tout abus, s'en remettant aux résultats des expertises médicales.

Les expertises du CNDH ont été transmises au ministère de la Justice, qui les a lui-même envoyées aux parquets de Casablanca et Al-Hoceïma "afin de prendre les mesures légales qui s'imposent", a indiqué mardi soir le ministère.

Avec AFP

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