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La contestation accuse les généraux soudanais d'avoir réprimé dans le sang des manifestations


La police dispersent des manifestants à coup de gaz lacrymogène à Khartoum, Soudan, 24 février 2019.
La police dispersent des manifestants à coup de gaz lacrymogène à Khartoum, Soudan, 24 février 2019.

Trois nouveaux corps ont été découverts lundi près de la capitale soudanaise, la contestation accusant les généraux au pouvoir d'avoir réprimé dans le sang les manifestations massives organisées la veille pour un transfert du pouvoir aux civils.

Ces nouvelles victimes s'ajoutent aux sept personnes tuées dimanche et aux 180 personnes blessées, lorsque des dizaines de milliers de personnes ont déferlé dans les rues de Khartoum et de plusieurs autres villes.

Le Conseil militaire de transition, qui tient les rênes du pays depuis la destitution en avril du président Omar el-Béchir, a de son côté fait porter la responsabilité des violences au principal mouvement de la contestation, l'Alliance pour la liberté et le changement (ALC).

A Omdourman, ville voisine de Khartoum qui a connu dimanche une mobilisation particulièrement forte, une petite foule s'est attroupée lundi matin autour de trois cadavres, dont les circonstances de décès demeuraient floues, a constaté un correspondant de l'AFP sur place.

Des dizaines de personnes ont scandé "à bas, à bas" les militaires --un slogan utilisé depuis décembre pour réclamer l'éviction de M. Béchir et aujourd'hui du Conseil militaire-- avant d'être dispersés par des tirs de gaz lacrymogènes lancés par la police.

Les rassemblements massifs de dimanche sont les plus importants depuis qu'un sit-in installé devant le QG de l'armée à Khartoum a été violemment dispersé le 3 juin, avec à la clé une centaine de morts et un tollé international.

La découverte de ces trois corps porte à 136 le nombre de victimes depuis ce drame, qui avait fait à lui seul environ une centaine de morts selon un comité de médecins proche de la contestation. Les autorités comptent pour leur part 68 morts depuis le 3 juin.

- "Violence excessive" -

L'ampleur de la mobilisation dimanche a démontré que le mouvement de contestation a gardé intacte sa capacité à rallier la population contre le pouvoir militaire, et ce, malgré un blocage d'Internet en vigueur depuis près d'un mois et un important dispositif sécuritaire.

Les manifestants ont ainsi affronté des tirs de gaz lacrymogènes, alors qu'ils marchaient sur le Palais présidentiel où siège le Conseil militaire.

Des échauffourées ont eu lieu à environ 700 mètres du Palais où au moins 25 véhicules des paramilitaires des Forces de soutien rapide (RSF) sont arrivés en renfort, selon un journaliste de l'AFP.

Sept personnes ont été tuées, selon l'agence de presse officielle Suna. Le comité de médecins a fait, lui, état de cinq morts, auxquels s'ajoutent les trois corps découverts lundi.

"Le Conseil militaire est entièrement responsable pour ces vies (perdues) et ces blessés", a asséné Mohammed Naji al-Assam dans une vidéo postée dimanche soir sur Facebook par son mouvement, l'Association des professionnels soudanais, acteur majeur de la contestation.

"Une nouvelle fois, comme à plusieurs reprises, les manifestants pacifiques soudanais ont été la cible d'une violence excessive, des tirs à balle réelle", a ajouté le militant.

- "Retenue" -

Pour le Conseil militaire, les forces régulières ont fait preuve de "retenue" dimanche.

L'ALC, qui a appelé à manifester dimanche, "a violé ses engagements et incité les manifestants à se diriger vers le palais (présidentiel) et le QG de l'armée", a dénoncé le général Jamal Omar, dans une vidéo postée par le Conseil sur Facebook.

L'ALC "porte l'entière responsabilité de ces violations et des victimes parmi les forces régulières et les citoyens", a-t-il ajouté.

La contestation au Soudan a été déclenchée initialement par le triplement en décembre du prix du pain dans un pays pauvre à l'économie exsangue.

Les manifestations ont rapidement pris une tournure politique en réclamant l'éviction d'Omar el-Béchir, qui dirigeait le pays d'une main de fer depuis près de trois décennies.

Lundi, la France a déploré les violences de la veille, appelant les deux camps "à progresser de bonne foi dans les négociations et à aboutir au plus vite à la formation d'un gouvernement conduit par des civils", d'après la porte-parole du ministère des Affaires étrangères.

Depuis plusieurs jours, les chefs de la contestation et le Conseil militaire se disent ouverts à une reprise des négociations, à travers une médiation de l'Ethiopie et de l'Union africaine, pour dessiner les grandes lignes de la transition à venir.

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