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Guinée: la Francophonie remet en cause la régularité des votes à venir


Louise Mushikiwabo, Secrétaire générale de l'Organisation internationale de la Francophonie (OIF).
Louise Mushikiwabo, Secrétaire générale de l'Organisation internationale de la Francophonie (OIF).

L'Organisation internationale de la francophonie (OIF) a sévèrement remis en cause lundi la régularité d'un référendum et d'élections organisés dimanche par le pouvoir, en jugeant "problématiques" plus de deux millions de noms d'électeurs figurant sur les listes.

L'OIF a du coup indiqué qu'il lui était "difficile" de continuer sa mission, six jours seulement avant ces consultations à hauts risques.

L'opposition au président Alpha Condé dénonce le référendum sur la Constitution et les législatives organisées simultanément comme une manoeuvre du chef de l'Etat pour briguer un troisième mandat à la fin de l'année, alors que l'actuelle Constitution en limite le nombre à deux. Elle montre du doigt un nombre disproportionné d'électeurs par rapport à la démographie du pays, et l'inscription, selon elle, de mineurs sur les listes électorales.

En 2018, l'OIF avait mené avec l'ONU et l'Union européenne un audit du fichier électoral datant de 2015. L'audit dénombrait 2,49 millions d'électeurs dont la présence sur les listes était "problématique", rappelle l'OIF, responsable de la mise en oeuvre des recommandations de cet audit, dans un communiqué publié lundi.

Or ces électeurs figurent toujours dans la base de données actuelle, observe l'OIF. Parmi eux, des électeurs décédés ou des doublons, dit-elle. Sur ces 2,49 millions de personnes, 98% "ne disposent pas de documents permettant leur identification", dit-elle.

"Nous pensons que notre fichier est suffisamment crédible", a répondu devant des journalistes le président de la commission électorale, Amadou Salif Kébé. "Dire qu'il est purgé de toutes les tares, non. Mais c'est un fichier avec lequel on peut aller à toutes les élections".

"La Francophonie ne fait que constater la mascarade qui est en cours en Guinée. Mieux vaut tard que jamais", a commenté Abdourahmane Sano, coordinateur du collectif menant la contestation anti-Condé.

"Les Guinéens doivent se lever maintenant comme un seul homme pour faire face au coup d'Etat de Monsieur Alpha Condé", a-t-il ajouté, reprenant l'accusation de "coup d'Etat" institutionnel portée par l'opposition contre le président.

La Guinée, pays pauvre malgré d'importantes ressources naturelles, est en proie depuis quatre mois à la contestation contre une réforme constitutionnelle et contre le projet prêté de longue date au président Condé de chercher à se succéder fin 2020. Au moins 30 civils et un gendarme ont été tués depuis le début de protestations qui ont été durement réprimées à plusieurs reprises.

L'OIF "implore" les autorités guinéennes d'agir pour éviter de nouveaux décès et "enrayer tout risque d'escalade".

M. Condé, 81 ans, ne confirme ni ne dément l'ambition d'un troisième mandat.

Opposant historique qui connut l'exil et la prison, M. Condé a été le premier président démocratiquement élu en 2010 en Guinée. Son avènement a marqué l'instauration d'un gouvernement civil après des décennies de régimes autoritaires et militaires. L'opposition dénonce toutefois une dérive "dictatoriale" de sa part.

M. Condé justifie le référendum par la nécessité de "doter la Guinée d'une Constitution qui réponde aux besoins actuels", sur les droits des femmes, l'écologie ou encore la répartition des revenus de l'Etat. Cela "n'a rien à voir avec la présidentielle", disait-il récemment dans un entretien avec Radio France Internationale et France 24, où il assurait que rien n'est plus "démocratique" qu'un référendum.

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