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Ghana : le derby Asante Kotoko - Hearts marqué par les drames


Les joueurs du SC Asante Kotoko font leur entrée au stade avec les arbitres et l’équipe adverse avant le match, 5 juillet 2017.
Les joueurs du SC Asante Kotoko font leur entrée au stade avec les arbitres et l’équipe adverse avant le match, 5 juillet 2017.

Le derby entre les deux clubs les plus titrés du pays dimanche (6 août), a été marqué par un autre drame cette année avec un bilan d'un mort.

"Je suis le gardien de mon frère". A l'entrée du stade d'Accra, une statue d'un homme portant un blessé sur ses épaules rend hommage aux 127 personnes décédées en mai 2001 lors du "clasico" ghanéen entre Hearts of Oak et Asante Kotoko, une des plus grandes tragédies de l'histoire du football.

La rencontre devait initialement avoir lieu le 16 juillet mais le 13, le bus d'Asante, qui revenait d'un match à Accra, a percuté un camion à l'arrêt. Bilan: un mort (le responsable de l'équipement du club) et 37 blessés dont l'entraîneur Steve Pollack et 7 joueurs assez gravement. Après un report, le derby tant attendu va avoir lieu.

L'ensemble de la famille du football avait exprimé ses condoléances après l'accident mais le message de solidarité des Hearts avait été particulièrement remarqué. Il concluait: "Nous avons la conviction que vous surmonterez cet orage, à l'image de votre devise: +Tuez-en un millier, des milliers viendront+."

Cette devise d'Asante Kotoko est aussi celle de l'empire Ashanti (qui a régné sur une importante partie du Ghana avant d'être conquis par les Britanniques), dont le symbole est un porc-épic, présent sur les maillots. Les piquants des porc-épics repoussent facilement.

- Rivalité historique -

La rivalité est historique entre les clubs issus des deux métropoles du pays, Accra, la capitale politique et économique (2,2 millions d'habitants) pour Hearts, et Kumasi, la capitale de l'empire Ashanti pour Asanté Kotoko (2 millions d'habitants). Mais la tragédie de 2001 les lie à jamais.

"Il y a de l'amitié entre les supporteurs. Après quand le match commence, c'est une autre paire de manches", affirme Vicentia Kafui Deku, présidente des femmes supportrices de Hearts of Oak.

"Nous, c'est comme Real Madrid et Barcelone. Nous sommes les deux plus grands clubs, la rivalité rend le foot meilleur", analyse-t-elle.

Elle était au stade en mai 2001 et a encore peur quand elle s'y rend aujourd'hui, mais elle participe chaque année à une commémoration du "disaster" (désastre).

Mécontents de l'arbitrage, des supporteurs d'Asante avaient lancé des chaises sur la pelouse, provoquant le tir de gaz lacrymogène dans la foule. La bousculade qui avait suivi a causé la mort de 127 personnes --écrasées ou asphyxiées-- plusieurs centaines d'autres étant blessées.

L'enquête a fustigé l'intervention de la police mais aussi la fermeture des portes du stade.

Ce drame, comme celui du Heysel (Belgique 39 morts en 1985) ou de Hillsborough (Angleterre 96 morts en 1989) ont conduit les autorités du football à revoir les règles de sécurité, notamment l'évacuation des stades.

Ebenezer Owusu, 37 ans, supporteur d'Asante, était lui présent: "J'ai dû monter sur quelqu'un pour sauter par dessus un mur et je me suis cassé un poignet. Je n'ai pas de problème avec les supporteurs de Hearts. Mes voisins de palier sont Hearts, on s'entend bien, on se moque les uns des autres. Le problème c'était la police".

- Supporteur dans le ventre de sa mère -

"Une semaine après (le désastre) j'étais au stade", raconte Ebenezer, vêtu d'une casquette et d'un tee-shirt de l'Asante. Son métier lui rapporte environ 600 Cedi (125 euros) par mois. Un tiers part pour supporter le club. Maillot, gadgets, billet, déplacements mais aussi... rituels et magie.

"Nous (supporteurs) on essaie de faire quelque chose pour l'équipe. Certains vont voir des pasteurs, d'autres, des prêtres traditionnels... ça marche" promet-t-il.

Objets enterrés sur le terrain, ordre d'entrée dans le stade, prières secrètes, mots magiques à prononcer, il y un nombre incalculable de moyens pour "influer" sur le match, assurent de nombreux Ghanéens.

"Il y a des gens qui vont se faire de l'argent avec ces pratiques... Des gens font toutes de choses, certains vont dormir dans des cimetières", rigole Jojo Ephson, bloggeur de sports, et supporteur de Hearts "depuis le premier jour de ma vie et même dans le ventre de ma mère".

"Mais, c'est aussi de la guerre psychologique. Ça donne un peu de piment", ajoute-t-il.

"Hearts c'est comme le Ghana, il y a des supporteurs de différentes origines, groupes, ethnies, religions... Alors que Asante, comme son nom l'indique, ce sont principalement des Ashantis", dit-il.

Une assertion démentie par Ebenezer, qui assure: "On a des supporteurs de toutes les ethnies. C'est pour ça qu'on a le plus de supporteurs".

"Faux!" rétorque Jojo. "Ils ont plus de supporteurs (qui vont au stade) mais nous avons le plus grand nombre de fans. Nous en avons partout dans le pays et même en Europe, aux États-Unis".

Avec AFP

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