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Les migrants de Calais entre soulagement et inquiétude à l'heure du départ


Un migrant quitte "la jungle" près de Calais pour s'inscrire à un centre de transit, le 24 octobre 2016.
Un migrant quitte "la jungle" près de Calais pour s'inscrire à un centre de transit, le 24 octobre 2016.

Soulagement, inquiétude, résignation, résistance... Les migrants qui vivent depuis des mois dans la boue et les abris précaires de la "Jungle" de Calais ont commencé à évacuer le site lundi sous la surveillance étroite des autorités françaises, déterminées à raser l'immense bidonville.

Mazen, un guitariste soudanais fan de reggae est optimiste : "Tout va bien se passer, faut pas s'en faire", dit-il avec un grand sourire en citant son idole, "the King", Bob Marley.

Wahid, un jeune Afghan de 23 ans, s'est levé à 5h (3hTU), dans un froid humide, pour être "dans les premiers" à embarquer dans un car pour rallier un des centres d'accueil disséminés dans toute la France.

"Nous ne savons pas encore où on va, mais ce sera forcément mieux que la Jungle, la Jungle c'est fait pour les animaux, pas pour les humains", déclare celui qui dit vouloir "rester en France, reprendre mes études, apprendre le français".

Devant le hangar installé pour orienter les candidats au départ, quatre files s'allongent : adultes seuls, familles, personnes vulnérables et mineurs. Au fil de la matinée, la tension monte, avec des bousculades et des altercations, les policiers interviennent.

Une fois à l'intérieur, il faut choisir sa destination, à l'aide de bracelets de couleur distribués par des fonctionnaires de l'immigration. Puis, les autorités enregistrent les identités.

Rahim est content d'embarquer, avec ses deux amis. "Mais on ne connaît pas la ville où on va", soupire-t-il. Pas le temps de se lamenter: le groupe est complet, le bus arrive, les hommes se bousculent autour des soutes pour entasser leurs bagages, valises, paquets, sacs à dos.

Le premier car est parti peu avant 9h (7h TU), à la grande satisfaction des officiels déployés sur le terrain. Le défi est de tenir le rythme d'un départ tous les quarts d'heure, avec un total de 60 cars prévus lundi.

"Bye bye Jungle", crie un petit groupe en s'éloignant du bidonville dans lequel s'entassent entre 6.500 et 8.000 personnes, selon les sources.

Malgré l'important dispositif logistique, "les gens sont un peu perdus, ils ne savent pas vraiment ce qu'il se passe ni ce qu'ils doivent faire", confie Véronique, une bénévole du Haut commissariat aux réfugiés (UNHCR) qui s'efforce d'aider les uns et les autres.

Le plan d'évacuation vise à raser le site où s'entassent des réfugiés venus de différents pays, pour la plupart d'Afghanistan, du Soudan ou d'Erythrée, avec le même rêve: traverser la Manche pour gagner la Grande-Bretagne.

- Fin d'un 'stress permanent' -

"C'est une urgence pour les migrants mais aussi pour les Calaisiens qui attendent cela depuis longtemps", commenté un député socialiste venu sur le terrain inspecter l'évacuation. Selon lui, "on n'aurait jamais dû laisser cette situation se mettre en place".

"Pour nous, c'est le jour J", se félicite Jean-Marc Puissereau, le gestionnaire du port de Calais sur les ondes de la BBC. "Ce n'était pas la guerre, mais cela fait deux ans qu'on vit dans un état de stress permanent", en raison des attaques des migrants sur les camions qui empruntent l'autoroute voisine. Pour lui, il faudra dans les mois à venir "contrôler d'éventuels retours" sinon ce ne sera qu'"une perte de temps".

"Beaucoup ne veulent pas partir, il pourrait y avoir des problèmes", estime Abbas, un Soudanais de 25 ans, en écho aux craintes exprimées par différentes associations. "Moi, je voulais aller en Grande-Bretagne mais j'ai laissé tomber maintenant", assure-t-il.

"S'ils ne me laissent pas passer, je me cacherai illégalement pour tenter à nouveau de monter dans un camion. J'ai l'habitude maintenant", confie Achram, Afghan de 17 ans. Arrivé il ya dix mois, Achram espère bénéficier du programme permettant aux mineurs isolés de rejoindre la Grande Bretagne; il a déposé un dossier et attend la réponse de l'administration du Home Office.

Farhan, 12 ans, préfererait rentrer chez lui "mais son pays n'est pas sûr". "Mon coeur s'est brisé depuis que j'ai quitté ma famille l'an dernier, depuis je ne leur ai pas parlé", confie le jeune Ethiopien qui a franchi la Méditerranée et voyagé seul à travers l'Europe pour retrouver les siens, de l'autre côté de la Manche, à une trentaine de km à vol d'oiseau.

Avec AFP

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