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Ethiopie: les Sidama attendent les résultats du référendum d'autodétermination


Les Oromiens célèbrent la veille d'Ireecha, également appelée Irreessa, une fête d'action de grâce du peuple oromo en Éthiopie, le 29 septembre 2018.
Les Oromiens célèbrent la veille d'Ireecha, également appelée Irreessa, une fête d'action de grâce du peuple oromo en Éthiopie, le 29 septembre 2018.

Les Sidama, une ethnie du sud de l'Éthiopie, attendaient jeudi les résultats de leur référendum d'autodétermination qui s'est déroulé dans le calme mercredi et doit déboucher sur la création de leur propre région autonome, la 10e de l'État fédéral éthiopien.

Les premiers résultats du scrutin étaient affichés sur les murs des bureaux de vote dans la capitale régionale Hawassa, qui avait renoué avec une activité normale, ont constaté des journalistes de l'AFP. Les résultats préliminaires globaux sont attendus tard jeudi ou vendredi.

Quelque 2,3 millions d'électeurs étaient appelés à se prononcer sur la création d'une région autonome sidama, un scrutin à valeur de test pour la stabilité du pays.

Les Sidama, qui ont été nombreux à se rendre aux urnes à Hawassa, située à environ 200 km au sud d'Addis Abeba, se sont félicités que le scrutin se soit déroulé sans aucun incident notable, comme l'a souligné la Commission électorale nationale (NEBE).

Le référendum "a été très pacifique, démocratique et libre", a déclaré à l'AFP Desta Ledamo, administrateur en chef de la zone sidama. "Cela montre au monde qu'une lutte de pouvoir civilisée peut réussir en Ethiopie", a-t-il ajouté.

Une analyse dont le Premier ministre Abiy Ahmed s'est fait l'écho. "Le processus de vote démontre notre capacité à régler nos différences dans les urnes et à permettre au processus démocratique de prévaloir", a-t-il estimé.

Depuis l'arrivée au pouvoir en avril 2018 du réformateur Abiy, l'Éthiopie connaît une forte recrudescence des violences intercommunautaires et des velléités autonomistes.

Ce référendum pourrait accentuer la tendance et le risque de fragmentation du pays en servant d'inspiration à certains des quelque 80 autres groupes ethniques éthiopiens.

L'Éthiopie, deuxième pays le plus peuplé d'Afrique avec plus de 100 millions d'habitants, est actuellement divisée en neuf régions semi-autonomes dessinées sur les bases d'un fédéralisme ethnique.

Sa Constitution exige que le gouvernement organise un référendum pour tout groupe ethnique souhaitant former une nouvelle entité dans l'année qui suit sa demande.

- 'Juste une étape clé' -

La route des Sidama pour quitter la région des Nations, Nationalités et Peuples du Sud (SNNP - sud), à laquelle ils appartiennent actuellement, avait débouché sur des violences qui avaient fait plusieurs dizaines de morts en juillet et conduit Addis Abeba à placer la zone sous contrôle de la police fédérale et de l'armée.

Les Sidama caressent le projet de quitter leur région depuis de longues années. Mais ils ont été galvanisés par l'arrivée au pouvoir de M. Abiy, récemment auréolé du prix Nobel de la paix.

Selon les observateurs, la montée en puissance des revendications régionales et ethniques, en partie due à l'ouverture de l'espace politique initiée par M. Abiy, s'accommode mal de son approche centralisatrice du pouvoir.

Un vote favorable des Sidama est jugé très probable par les analystes. Dans les rues d'Hawassa, toutes les affiches électorales étaient en faveur de l'autonomie. Un homme interrogé dans la capitale, et qui par peur a refusé de donner son identité, a regretté un résultat prédéterminé.

Mais la création de cette 10e région n'ira probablement pas sans complications.

"Des festivités seront certainement de rigueur (en cas de victoire), mais la nouvelle région ne sera pas créée du jour au lendemain. Ceci (le scrutin) est juste une étape clé du processus", a ainsi souligné William Davison, chercheur pour le groupe de réflexion International Crisis Group (ICG).

Le calendrier pour la formation de cette nouvelle région, l'allocation du budget fédéral, le partage des richesses au niveau régional sont des sources potentielles de litiges.

Le statut d'Hawassa, actuelle capitale de la région SNNP, dont les Sidama veulent faire leur capitale, est aussi épineux. Un accord signé récemment prévoit que le gouvernement régional SNNP restera dans la ville pour les deux prochains mandats de cinq ans. Mais la question pourrait resurgir ensuite.

Enfin, quel sera le sort des minorités dans la nouvelle région, très diverse d'un point de vue ethnique?

"L'autonomie des Sidama ne devra en aucun cas porter préjudice aux résidents non-sidama ou à leurs commerces, à aucun moment de ce processus", a prévenu M. Davison.

La résolution pacifique ou non de ces questions sera observée avec beaucoup d'attention, puisqu'au moins dix autres groupes dans le sud du pays ont lancé une procédure d'autonomie similaire à celle des Sidama.

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