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Au Nigeria, le parcours du combattant des rares candidates aux élections


"La violence électorale est bien réelle, et elle me vise davantage parce que je suis une femme", confie une députée nigériane.
"La violence électorale est bien réelle, et elle me vise davantage parce que je suis une femme", confie une députée nigériane.

Pour Tolulope Akande-Sadipe, briguer un second mandat de députée au Nigeria signifie mettre sa vie en danger, confie cette femme politique âgée de 56 ans qui se présente aux élections législatives du 25 février dans le sud-ouest du pays le plus peuplé d'Afrique.

Le même jour, les Nigérians éliront également leur prochain président, Muhmmadu Buhari se retirant après deux mandats comme prévu par la Constitution, et leurs sénateurs. Le 11 mars, ils choisiront leur gouverneurs et les députés des assemblées locales.

En 2019, lors des dernières élections, le bus de campagne de Mme Akande-Sadipe avait été détruit et ses attachés de presse agressés. Pour ce scrutin, elle dit avoir échappé de peu à une agression alors qu'elle faisait campagne face à cinq hommes pour les primaires de son parti.

Colère des Nigérians trois semaines avant les élections
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Au Nigeria, "la violence électorale est bien réelle, et elle me vise davantage parce que je suis une femme", affirme à l'AFP la députée originaire de l'Etat d'Oyo. Selon elle, ses adversaires "pensent pouvoir l'intimider" parce qu'elle est une femme.

Le pays le plus peuplé d'Afrique, première économie du continent, compte de nombreuses femmes à des postes de direction dans le secteur privé et sur la scène internationale. Mais lorsqu'il s'agit de fonctions électives, elles sont sous-représentées et très souvent mises de côté.

Dans la chambre basse actuelle siègent 13 femmes parmi les 360 députés, plaçant ainsi le Nigeria au 184e rang sur 190 pays dans le monde, selon un classement de l'Union interparlementaire (UIP), basée à Genève. Et la situation ne semble guère s'améliorer.

Le nombre de femmes qui se présentent aux élections de 2023 a diminué à presque tous les niveaux: les femmes ne briguent que 10% des sièges aux assemblées locales, 9% des sièges à l'Assemblée nationale, 8% des sièges au Sénat et 6% des postes de gouverneur.

Une seule femme, Princess Chichi Ojei, est candidate à la présidentielle du 25 février, face à 17 hommes. Et elle est loin de faire partie des favoris que sont Bola Tinubu, du parti au pouvoir (APC), Atiku Abubakar du principal parti d'opposition (PDP), et l'outsider Peter Obi, du parti travailliste (LP).

Patriarcat

Et pourtant, les femmes ont joué un rôle majeur dans la construction politique du Nigeria, se mobilisant contre le pouvoir colonial, puis durant les dictatures militaires, selon Chiedo Nwankwor, professeure à l'université américaine Johns Hopkins. Mais "une fois que ces mouvements ont réussi, les femmes ont été mises de côté".

Le système culturel et religieux conservateur n'aident pas les femmes à s'imposer dans le paysage politique, selon Mercy Ette, chercheuse nigériane à l'université de Leeds qui a étudié la représentation féminine dans le pays. "Même parmi les personnes très instruites, le patriarcat est très fort", renchérit la députée Akande-Sadipe.

Les obstacles sont immenses, mais cela n'empêche pas Khadijah Abdullahi Iya de vouloir devenir la prochaine gouverneure de Niger, un Etat du centre en proie aux violences de groupes criminels.

Un poste qu'aucune femme n'a jamais occupé dans les 36 Etats qui composent la république fédérale. Mais selon cette femme de 48 ans, "les mentalités changent" car "les gens sont à un point de rupture, et ils sentent que les femmes ont la compassion nécessaire, qu'elles peuvent guérir leur maux".

L'insécurité est un enjeu crucial des élections de 2023, le pays étant en proie à des violences de jihadistes, criminels et séparatistes.

Espoir d'un changement

Le financement des campagnes électorales est l'un des obstacles des candidates. "Les femmes n'ont souvent pas l'argent qui permet de se lancer, et très peu d'hommes sont prêts à investir dans leur campagne", selon Mme Ette. L'année dernière, le Parlement, dominé par les hommes, a rejeté cinq projets de loi visant à faire progresser l'égalité des sexes et la représentation des femmes.

"Il y a très peu de volonté politique de changer le statu quo", déclare à l'AFP Ibijoke Faborode, qui dirige ElectHer, une plateforme qui soutient les jeunes candidates. Elle estime toutefois que "quelque chose a changé" avec le mouvement "EndSARS" de protestation contre les violences policières, qui avait éclaté fin 2020 avant d'être réprimé.

Parmi les principaux leaders figuraient de jeunes femmes charismatiques (avocates, journalistes, etc.) regroupées au sein d'une "Coalition féministe". Aucune n'est candidate mais leur engagement a nourri l'espoir de beaucoup d'autres.

Comme Juliet Isi Ikhayere, une avocate de 28 ans qui se présente comme députée. Lors d'un événement le mois dernier, elle a été traitée de "bambin" par un homme dans la foule. La dernière des remarques désobligeantes qu'elle a essuyées durant toute sa campagne. Mais si "les défis sont nombreux" et "si ce n'est pas pour maintenant", dit-elle, "il s'agit surtout de poser des fondations pour l'avenir".

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