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A Madagascar, le candidat à la présidentielle Rajoelina vend du rêve


Un homme suspendu à un poteau d'électricité alors qu'il observe les partisans du candidat à la présidentielle malgache Andry Rajoelina, qui se dirige vers un rassemblement à Tuléar, le 4 novembre 2018.
Un homme suspendu à un poteau d'électricité alors qu'il observe les partisans du candidat à la présidentielle malgache Andry Rajoelina, qui se dirige vers un rassemblement à Tuléar, le 4 novembre 2018.

Feux d'artifice, écran géant, stars de la chanson, orchestre live, profusion de promesses: Andry Rajoelina, l'un des favoris à la présidentielle de mercredi à Madagascar, pays extrêmement pauvre, a fait rêver dimanche soir ses partisans lors d'un show politique à grand spectacle dans la ville de Toliara (sud-ouest).

"On vit dans les ténèbres actuellement. Je suis là pour ramener la lumière", explique à l'AFP Andry Rajoelina, à l'aéroport de Toliara, où il est arrivé en jet gris métallisé qu'il a affrété.

Sur la route poussiéreuse de 20 kilomètres qui mène au stade, le candidat debout à l'arrière d'un quatre-quatre peine à se frayer un passage entre les cyclo-pousses - taxis-vélos - les camionnettes et les vieilles Peugeot bondées de ses partisans.

Une véritable marée orange, la couleur d'Andry Rajoelina, après la récente distribution de tee-shirts à l'effigie du candidat.

L'ex-président (2009-2014) figure parmi les favoris du premier tour de la présidentielle mercredi, où il affrontera notamment deux autres anciens chefs de l'Etat, Marc Ravalomanana (2002-2009) et Hery Rajaonarimampianina (2014-septembre 2018).

"Rajoelina n'est pas un profiteur, ce n'est pas un menteur", assure Rosine Manasoa, 30 ans, entassée dans un pick up qui suit le cortège jusqu'au stade de Toliara.

Là, le candidat, électrifié par la foule, multiplie les promesses: "On va construire une piscine olympique dans la ville".

Roulements de batteries, puis coups de cymbales, typiques des numéros de cirque. Place à la présentation en images de synthèse, sur écran géant, de la future piscine.

Dans les rues sombres de Toliara, pendant ce temps, on s'éclaire à la lampe à pétrole.

"Il nous faut aussi un stade aux normes. On va restructurer les tribunes centrales (....) et mettre du gazon synthétique", poursuit le candidat devant un terrain noir de monde.

Et Andry Rajoelina de lancer, d'un tir assuré, un ballon de football flambant neuf à la foule.

Drones contre voleurs de zébus

Après chaque promesse, des artistes populaires enflamment le stade, transformant le meeting électoral d'Andry Rajoelina en concert. Au pied de la scène, une fan s'évanouit.

En chemisette blanche et pantalon orange, la star du jour enchaîne les engagements lors d'un show bien rodé.

Ici à Toliara, "on va construire la plus grosse centrale électrique" du pays, "on va construire une usine de ciment (...) et des maisons moins cher", assure-t-il.

Pour lutter contre les vols de zébus, le bétail sera équipé de puces électroniques et des "drones suivront les voleurs".

Une promesse également de son rival Ravalomanana qui n'échappe pas non plus à "l'américanisation de la campagne", constatent les observateurs.

"Il n'y a pas de débat idéologique" pendant cette campagne, estime le chef de la mission des observateurs de l'Union européenne, Cristian Preda.

"On est beaucoup dans les promesses. Avec certaines propositions, des candidats prennent vraiment la population pour des débiles profonds", s'indigne la directrice de Transparency International Initiative Madagascar (TIMM), Ketakandriana Rafitoson.

Toilettes parfumées

En octobre, Andry Rajoelina s'est engagé à construire des toilettes publiques parfumées.

En meeting à Toamasina (est), il a promis de transformer la ville portuaire en "Miami" ou "Côte d'Azur" malgache.

"On va développer Madagascar", assure à Toliara Andry Rajoelina, alors que les trois-quarts de la population de l'île vit dans l'extrême pauvreté.

"Le petit garçon (son surnom) va remonter sur le trône", prédit le quadra au visage poupin, qui s'était vu confier par l'armée en 2009 les rênes du pouvoir, avant d'être interdit d'élection en 2013.

"Lorsque je vous dis quelque chose, je l'accomplis. Pour nous, les promesses sont sacrées", assure-t-il encore avant un bouquet final de feu d'artifice.

"On pense qu'il va réaliser tout ça", confie une électrice de 60 ans sous le charme, Codelette (pas de nom de famille), qui survit de petits boulots.

Pour preuve: "Quand il était au pouvoir, il a construit des maisons à Toliara", se rappelle-t-elle.

"La piscine, c'est une bonne idée. Si on ne peut pas faire de sport, les gens volent", ajoute Ernette Raony, une femme de ménage de 40 ans.

Dans la rue, un enseignant de 35 ans, Ibrahim Raharinahary, est pourtant perplexe. "La piscine n'est pas une priorité, les maisons si", explique-t-il.

"Je crois que son programme est difficile à appliquer. Et il est sans doute très cher", avance-t-il, alors que le candidat n'a pas évoqué une seule fois à Toliara comment il entendait financer son ambitieux programme.

Avec AFP

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