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RDC

A Goma, les motos-taxis entre le coeur et la raison


Des chauffeurs de taxi motocyclistes sont dans la circulation sur une route très fréquentée du quartier du marché de Goma, à l'est de la République démocratique du Congo, le 18 juillet 2012.
Des chauffeurs de taxi motocyclistes sont dans la circulation sur une route très fréquentée du quartier du marché de Goma, à l'est de la République démocratique du Congo, le 18 juillet 2012.

La 125 cc de Fiston trace dans la nuit de Goma. A droite, la fumée rougeoyante du volcan Nyiragongo, dont les éruptions successives ont sculpté la ville, à gauche le paisible et profond lac Kivu.

Fiston travaille du petit matin au grand soir. Comme les 10.000 autres jeunes conducteurs de moto-taxis de la capitale du Nord-Kivu, dans l'est de la République démocratique du Congo.

Fiston et ses collègues attendent avec anxiété, comme tous les Congolais, les résultats provisoires annoncés pour dimanche des scrutins par trois fois reportés.

Dépouillement des voix à Goma
Attendez s'il vous plaît

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Pour le jeune homme, nul doute, "c'est Fayulu à 100 %", l'opposant que personne n'a vu venir "qui va remporter la présidentielle".

Pour étayer ses affirmations, Fiston ne s'embarrasse pas d'indications éventuelles de sondages après le vote (ce qui n'existe pas en RD Congo) ni d'une objectivité quelconque. "Le vainqueur, c'est celui qui nous fera du bien! Qui nous apportera le changement. On souffre trop!"

Cinq dollars par jour

Comme la plupart des conducteurs de moto-taxis, Fiston n'est pas propriétaire de la machine. Elle appartient à un "patron", auquel Fiston reverse 10.000 francs congolais par jour, soit 6 dollars.

Et, comme en moyenne il récolte en courses 20.000 francs, il lui reste 10.000 francs. Un salaire quotidien auquel il doit soustraire 2.000 à 3.000 francs pour l'essence. Ce qui lui laisse net 4 à 5 dollars.

Fiston est originaire de Kibumba, localité rurale située en zone volcanique à une heure de mauvaise route de Goma. Il aide financièrement ses parents restés là bas et est fier de la production locale. "On y fait des légumes sains, pas comme au Rwanda avec leurs produits chimiques".

Fiston porte un casque, obligatoire pour la chauffeur, mais pas pour le passager. Avant, c'était obligatoire pour les deux mais, depuis le déclenchement en août de l'épidémie d'Ebola, plus au nord dans le territoire de Béni, le casque, qui était fourni par le conducteur, est interdit pour le passager. Afin d'éviter toute contamination par Ebola car la fièvre se transmet par tous les fluides corporels, dont la transpiration.

Parfois, les motos-taxis ont deux emplois, comme Johnson "qui fait aussi du gardiennage" et qui, en ce début d'année 2019, demande "une prime pour les fêtes" en plus de la course et se contente, ravi, d'un bonus de 100 francs congolais.

Tous les moto-taxis n'ont cependant pas voté en faveur de l'opposition. Ainsi Frédéric, fataliste, déclare que son choix a été le numéro 13, Emmanuel Ramazani Shadary, le candidat du pouvoir à la présidentielle, parce que "de toute façon , c'est lui qui sera déclaré vainqueur, alors autant voter pour le gagnant". Frédéric n'aime pas perdre.

Innocent, lui, ne parle pas de politique mais rend constamment "grâce à Dieu". Il est déjà nettement un cran au dessus de ses confrères car il est propriétaire de sa moto. Son prix, neuve : 1.500 dollars, un montant inabordable pour la plupart des conducteurs de motos-taxis. Et qu'il a pu payer cash. "Grâce à Dieu".

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