Buhari suspend le président de la Cour Suprême

Le président du Nigeria, Muhammadu Buhari, arrive au musée d'Orsay, à Paris, le 10 novembre 2018.

Le président du Nigeria Muhammadu Buhari, en lice pour un second mandat en février prochain, a suspendu vendredi le président de la Cour Suprême, après une longue polémique sur son procès pour corruption jugé inconstitutionnel par l'opposition.

"Le président @MBuhari suspend Walter Samuel Nkanu Onnoghen de son poste de plus haut magistrat du pays et nomme Ibrahim Tanko Muhammad" comme président de la Cour suprême "par intérim", a annoncé Bashir Ahmad, l'un des porte-parole de la présidence, sur Twitter.

Ibrahim Tanko Muhammad est un homme du Nord, tout comme le président Buhari, accusé par ses détracteurs de favoriser les musulmans issus de sa région aux postes clé dans le pays et de mener une chasse aux sorcières contre ses opposants politiques au nom de sa lutte contre la corruption.

Son porte-parole a souligné que le président avait agi "sur ordre du Tribunal du code de conduite (CCT)", un tribunal créé spécialement pour juger les questions éthiques, où M. Onnoghen était poursuivi depuis une dizaine de jours pour ne pas avoir déclaré plusieurs comptes bancaires en dollars, euros et livres sterling.

Cette affaire fait grand bruit au Nigeria, à moins d'un mois des élections générales dans le pays le plus peuplé d'Afrique.

L'opposition a accusé le gouvernement de vouloir se débarrasser du juge suprême - notoirement critique du pouvoir actuel - alors que la Cour suprême est compétente pour régler les éventuels litiges liés au scrutin.

En début de semaine, son principal adversaire à la présidentielle, l'ancien vice-président Atiku Abubakar, avait déjà accusé l'administration Buhari de "faire pression sur une institution gouvernementale indépendante et autonome pour faire démissionner (Onnoghen) ou le mettre à l'écart".

Selon la Constitution nigériane, le président ne peut renvoyer le plus haut magistrat qu'avec l'approbation des 2/3 du Sénat. Dans ce cas, M. Onnoghen n'a pas été renvoyé, mais "suspendu" par le chef de l'Etat.

Pour le politologue nigérian Cheta Nwanze, du cabinet SBM Intelligence à Lagos, ce coup de force est "l'indication claire que l'APC (Congrès des Progressistes, parti au pouvoir) est en train de paniquer" au sujet des résultats des élections.

"Atiku (son adversaire) a le soutien du secteur privé et son récent voyage aux Etats-Unis a été un tournant majeur dans la campagne", note l'analyste.

Les Nigérians voteront le 16 février prochain pour choisir leurs président et parlementaires.

Muhammadu Buhari, candidat à un second mandat, est fortement critiqué pour son bilan sécuritaire et économique.