Le docteur Mukwege dédie son Nobel aux femmes "meurtries par les conflits et la violence de tous les jours"

Denis Mukwege lors d'une conférence de presse à Panzi, RDC, le 5 octobre 2018

Le gynécologue congolais Denis Mukwege, co-lauréat du prix Nobel de la paix, a dédié vendredi sa récompense "aux femmes de tous les pays meurtries par les conflits et confrontées à la violence de tous les jours".

"Ce prix Nobel traduit la reconnaissance de la souffrance et le défaut d'une réparation juste en faveur des femmes victimes de viols et de violences sexuelles dans tous les pays du monde et sur tous les continents", a-t-il déclaré dans une courte déclaration devant la presse dans sa clinique de Panzi à Bukavu, dans l'est de la République démocratique du Congo.

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Dr. Denis Mukwege, Nobel de la Paix, joint par Nathalie Barge

"C'est un pas important vers cette réparation tant attendue que nous devons tous à ces femmes qui ont tant souffert", a-t-il poursuivi, espérant que ce prix pourra aider les victimes en zones de conflit.

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Le co-lauréat s'est déclaré "honoré" de partager son prix avec la Yazidie Nadia Murad "avec qui je partage ce combat".

"Pendant près de 20 ans j'ai été témoin des crimes de guerre commis contre les femmes, des jeunes filles, des fillettes, des bébés", a rappelé le docteur Mugwege qui affirme avoir opéré quelque 50.000 femmes victimes des violences sexuelles au cours des conflits du Kivu dans l'est de la RDC.

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L'hôpital Panzi célèbre le prix Nobel de la paix Mukwege

"Je voudrais vous dire qu'à travers ce prix, le monde vous écoute et refuse l'indifférence. Le monde refuse de rester les bras croisés face à votre souffrance", a-t-il lancé à l'intention des femmes victimes.

Le gynécologue congolais a appris qu'il était co-lauréat du prix Nobel de la paix 2018 dans la salle d'opération de sa clinique de Panzi. Denis Mukwege a dédié sa récompense "aux femmes de tous les pays meurtries par les conflits et confrontées à la violence de tous les jours".

"Soudain, des gens sont entrés et m'ont appris la nouvelle", a confié le docteur Mukwege au journal norvégien VG, dans l'attente d'une possible réaction publique plus tard dans la journée à Bukavu (est) où les journalistes ont commencé à affluer.

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"Le docteur Mukwege était en pleine opération lorsqu'il a appris la nouvelle. Mais il est sorti et il est très heureux. Les gens célèbrent et crient de joie", a confirmé une pneumologue suédoise présente sur place, Ellinor Ädelroth, jointe par l'agence de presse suédoise TT à l'hôpital de Panzi.

"C'était la sixième fois qu'il était nominé. Mais il était convaincu lui-même qu'il n'aurait pas le prix. Il a été quand même formidablement heureux parce que ça signifie que ses efforts et son travail sont reconnus par la communauté internationale", a-t-elle ajouté.

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Le docteur Denis Mukwege, gynécologue congolais

Ce premier prix Nobel jamais décerné à un Congolais a suscité une onde de joie et de fierté nationale dans le plus grand pays d'Afrique sub-saharienne aux potentiels immenses minés par différentes crises.

"Là je peux le dire: je suis fier d'être Congolais", a réagi sur Twitter Félix Tshisekedi, possible candidat unique de l'opposition à l'élection présidentielle prévue le 23 décembre.

"Cette distinction est un honneur pour la RDC et pour l'Afrique entière", a ajouté un autre candidat Vital Kamerhe, originaire de Bukavu lui aussi.

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Par la voix de son porte-parole Lambert Mende, le gouvernement congolais a également félicité le Dr. Mukwege, malgré ses prises de position radicale contre le président Joseph Kabila.

"Ce n'est pas sur ce chapitre là qu'on lui a donné le prix Nobel, mais sur l'aide qu'il apporte à nos pauvres femmes martyrisées", a déclaré M. Mende.

"L'Afrique a besoin de voix de cette envergure face au désastre causé par les dictatures du Bassin du Congo et à leur obstination à prendre le continent en otage. BRAVO !" a réagi sur Twitter l'écrivain Alain Mabanckou, originaire du Congo-Brazzaville voisin.

Avec AFP