La zone euro, menacée par la stagnation

(Reuters)

Les ventes au détail, baromètre fiable de l'évolution de la consommation des ménages, ont moins progressé qu'attendu le mois dernier, de 0,4%, montrent des statistiques publiées par Eurostat.

LONDRES (Reuters) - Le risque d'une contraction de l'économie dans la zone euro est de retour, l'activité dans le secteur privé ayant augmenté moins qu'attendu en novembre en dépit d'une baisse marquée des prix, montrent mercredi les enquêtes mensuelles auprès des directeurs d'achat.

Cette situation devrait nourrir le débat au sein de la Banque centrale européenne (BCE), qui réunit jeudi son Conseil des gouverneurs, sur l'opportunité de nouvelles mesures de soutien à l'activité et de lutte contre la faiblesse "dangereuse" de l'inflation.

Parallèlement, les enquêtes auprès des entreprises chinoises du secteur des services traduisent une légère accélération de la croissance, même si celles menées dans le secteur manufacturier, publiées lundi, suggèrent un ralentissement de l'activité industrielle.

"Il y a des risques baissiers évidents dans différentes régions du monde, y compris la zone euro et, dans une certaine mesure, la Chine", résume Philip Shaw, économiste d'Investec. "Les chiffres de la zone euro indiquent que l'économie avance, mais à la vitesse d'un escargot; la BCE reste sous pression."

L'indice PMI composite définitif des directeurs d'achats de Markit est ressorti à 51,1 pour l'ensemble de la zone euro, contre 52,1 en octobre, 52,0 en septembre et une estimation "flash" de 51,4.

Ce baromètre de l'activité du secteur privé reste pour le 17e mois consécutif au-dessus du seuil de 50 séparant contraction et expansion, mais le sous-indice des nouvelles commandes est passé sous cette barre pour la première fois depuis la mi-2013, augurant d'un nouvel accès de faiblesse en décembre.

"La zone euro file tout droit vers une maigre hausse de 0,1% du produit intérieur brut (PIB) au quatrième trimestre, avec une forte probabilité de quasi-stagnation voire de nouvelle contraction au début de l'année prochaine à moins de signes de frémissement de la demande", a déclaré Chris Williamson, chef économiste chez Markit.

Une enquête de Reuters menée le mois dernier prédit une croissance de 0,2% du PIB de la zone euro au quatrième trimestre et de 0,3% sur les trois premiers mois de 2015.

L'indice du seul secteur des services est revenu à 51,1 contre 52,3 en octobre et une estimation "flash" de 51,3, au plus bas depuis 11 mois.

L'enquête de Markit montre en outre que les entreprises ont encore réduit leur prix en novembre, comme elles le font depuis maintenant trois ans.

Les ventes au détail, baromètre fiable de l'évolution de la consommation des ménages, ont moins progressé qu'attendu le mois dernier, de 0,4%, montrent par ailleurs les statistiques publiées par Eurostat.

L'inflation dans la zone euro, elle, a reculé à 0,3% en rythme annuel le mois dernier selon l'estimation préliminaire d'Eurostat, s'enfonçant un peu plus dans ce que la BCE appelle la "zone dangereuse", c'est à dire sous 1%.

Pour autant, la banque centrale ne devrait pas annoncer jeudi de nouvelles mesures d'assouplissement de sa politique, déjà extrêmement accommodante.

Après avoir mis en oeuvre ces dernières semaines un plan d'achats d'obligations sécurisées puis de titres adossés à des actifs (ABS), l'institution de Francfort allouera la semaine prochaine aux banques une nouvelle enveloppe de prêts à quatre ans à taux très faible.

Mais les divergences au sein du Conseil l'empêchent pour l'instant de franchir le pas des achats de dette souveraine, considérés comme une prochaine étape logique par nombre d'observateurs.

La zone euro fait pourtant figure de mouton noir en terme de croissance à l'échelle mondiale: outre le petit mieux constaté en Chine, le Royaume-Uni bénéficie d'une accélération de sa croissance et les enquêtes attendues mercredi aux Etats-Unis devraient refléter une accélération de la croissance des services.

En Chine, l'indice PMI officiel des services a atteint 53,9 en novembre après 53,8 le mois précédent et l'indice HSBC-Markit s'est inscrit à 53,0 contre 52,9, le sous-indice des nouveaux contrats traduisant même la plus forte hausse depuis deux ans et demi.

Les enquêtes chinoises dressent cependant un tableau plus mitigé du marché du travail, élément déterminant des décisions économiques prises à Pékin. Certains économistes s'attendent donc à un nouvel assouplissement de la politique monétaire de la Banque populaire de Chine au cours des prochains mois, après la baisse des taux annoncée le 21 novembre.

Parmi les autres grands pays émergents, l'Inde affiche la croissance la plus élevée des services depuis cinq mois alors qu'en Russie, le secteur affiche sa contraction la plus marquée depuis mi-2009, l'indice PMI ayant chuté à 44,5 avec la dépréciation du rouble et les sanctions occidentales liées à la crise ukrainienne.