Happy Brothers, l’orchestre togolais des handicapés visuels qui voient loin

Emmanuel Yao Aziakéssé, 1er vice-président de l’AHVCD et membre fondateur de l’orchestre Lomé, 14 août 2020. (VOA/Kayi Lawson)

Au Togo, les Happy Brothers est un orchestre composé de personnes en situation de handicap visuel. Ce groupe musical, créé en 1997 par l’Association des personnes handicapées visuelles pour la contribution au développement (AHVCD), a voulu passer par la musique pour mettre fin à la discrimination dont sont victimes les personnes qui ont une déficience visuelle.

Mis en place il y a 23 ans, l’orchestre Happy Brothers ne déroge pas aux idéaux qui ont conduit à sa création. Les membres de ce groupe musical se retrouvent périodiquement au siège de l’association pour des séances de répétition, qui attirent des curieux.

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Les Happy Brothers, un orchestre togolais composé d'handicapés visuels


"Nous avons réalisé qu’il y a des potentialités parmi les personnes souffrant de handicap visuel", a confié à VOA Afrique Emmanuel Yao Aziakéssé, 1er vice-président de l’AHVCD et membre fondateur de l’orchestre. L’objectif de l’orchestre est de permettre à cette frange de la population de jouir de leur citoyenneté pleine et entière sur la base de l’égalité avec les autres.

"Quand je parle de la citoyenneté pleine et entière, c’est-à-dire faire également valoir leur potentialité, entre autre en musique. Et nous avons constaté qu’en matière de musique, il y a des guitaristes, des pianistes, des batteurs et puis il y a des chanteurs compositeurs et beaucoup de vocalistes. C’est pourquoi nous nous sommes mis ensemble pour mettre en place cet orchestre Happy Brothers", a indiqué M. Aziakéssé.

Même si la discrimination à l’égard des personnes vivant avec une déficience visuelle n’a pas totalement disparu, la musique contribue à changer la perception du public sur ces personnes en situation de handicap. C’est ce qu’estime Marie Ohunu, membre de l’orchestre Happy Brothers.

"On entend des mots de discrimination, des fois qui font mal. Mais avec la musique, les gens nous découvrent autrement puisqu’ils ne savent pas que les personnes en situation de handicap visuel peuvent aussi chanter et comme eux et plus qu’eux même", a laissé entendre cette étudiante en 3e année de droit.

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L’association AHVCD s’investit dans l’épanouissement des jeunes qui ont un handicap visuel grâce à un accompagnement pour une meilleure insertion dans un 21ème siècle marqué par les nouvelles technologies.

Des cours d’informatique adaptée sont dispensés aux membres de l’association qui le désirent. Grâce à ces cours, les personnes en situation de handicap utilisent l’ordinateur et les smartphones comme tout autre être humain. Il suffisait juste d’installer sur ces terminaux des lecteurs d’écran, comme l'explique à VOA Afrique le chargé de cours, qui n’est autre que le 1er vice-président de l’AHVCD.

"Grâce à ce lecteur d’écran, la personne ayant un handicap visuel aussi peut écrire, par exemple, dans Microsoft Word, Excel, ainsi aussi bien que utiliser un androïde quel que soit la version de l’androïde. C’est ce que nous sommes en train d’enseigner régulièrement à nos frères pour pouvoir les rendre beaucoup plus autonomes", a détaillé Emmanuel Yao Aziakéssé.

Ces cours d’informatique adaptée ont changé la vie de Martial Blewoussi.
"L’informatique me permet d’exécuter des tâches que beaucoup d’autres font et cela lève un peu cette situation d’handicap vis-à-vis de la personne. Ces temps où à l’université les cours sont passés des cours présentiels aux cours en ligne, il est important que le handicapé déficient visuel arrive à s’adapter aux nouvelles technologies afin d’être au même niveau que les autres", a confirmé cet étudiant.

Avec des formations obtenues dans des centres spécialisés, nombreux sont les membres de cette association qui s’illustrent dans divers domaines.

C’est le cas de Séna Koudjawo qui maitrise l’art d’habiller les chaises avec de l’osier ou du fil nylon. Malheureusement les articles ont du mal à couler faute de marché, regrette cet artisan.

"Notre plus grande difficulté est l’accès au marché. Après avoir fini la production, c’est à nous même d’aller chercher les débouchés pour pouvoir vendre. Avec notre handicap ce n’est pas évident", a relevé celui qui fabrique aussi le tam-tam Djembé. "Si nous avions un partenaire qui nous prend les articles dès la fin de la production pour se charger de la vente, nous ne pourrons qu’être heureux", a souhaité M. Koudjawo.

Le groupe Happy Brothers a déjà produit trois albums. Ses morceaux ont le mérite d’appeler à une prise de conscience. L’orchestre a récemment composé une chanson sur les gestes barrières contre la pandémie de Covid-19, dont le titre est "Midjéhayé", en mina, langue parlée au sud du Togo.

Le groupe exhorte ainsi la population à rester vigilante.

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Un orchestre togolais composé de personnes avec un handicap visuel fait sensation