Ces manifestations, qui ont commencé mardi soir, sont parmi les premières depuis l'arrivée au pouvoir des militaires dans un contexte de mécontentement grandissant et de détention de plusieurs ex-responsables par une cour spéciale anti-corruption.
La junte dirigée par le colonel Mamady Condé, qui a renversé le président Alpha Condé le 5 septembre 2021, a proclamé le 13 mai l'interdiction "jusqu'aux périodes de campagne électorale" de toute manifestation sur la voie publique "de nature à compromettre la quiétude sociale et l'exécution correcte des activités" pendant les trois ans censés précéder un retour des civils à la tête du pays.
Mais depuis mardi soir, des heurts ont secoué Conakry, et après une accalmie en début de matinée jeudi, des manifestants munis de cailloux et de bâtons se sont à nouveaux confrontés aux forces de l'ordre dans des quartiers de la banlieue comme Bambéto, Hamdallaye et Wanidara, selon un journaliste de l'AFP.
Les protestataires ont caillassé les véhicules des forces de l'ordre, renversé les poubelles, érigé des barricades avec des troncs d'arbres et de vieilles tables. Les commerces dans ces zones étaient fermés.
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Ils protestaient contre l'arrestation mardi de trois membres du Front national pour la défense de la Constitution (FNDC), une coalition de partis, de syndicats et d'organisations de la société civile qui avait orchestré des mois de mobilisation de 2019 à 2021 contre le président Condé (2010-2021).
Ces trois membres du FNDC sont le coordonnateur national, Oumar Sylla – dit Foniké Mengué –, Mamadou Billo Bah et le rappeur Alpha Midiaou Bah – alias Djanii Alfa.
Ils ont été jeudi "inculpés d'outrage à magistrat et injures publiques" et écroués à Conakry, a déclaré à l'AFP une de leurs avocats, Halimatou Camara. Leur procès est prévu vendredi matin, a dit Me Camara. Ils étaient en garde en vue depuis mardi.
MM. Oumar Sylla et Mamadou Billo Bah sont poursuivis pour avoir "produit et diffusé par le biais d'un système informatique des propos injurieux contre le Conseil national de transition (CNT)", le Parlement de transition mis en place par la junte, a expliqué mardi le procureur de la cour d'appel de Conakry, Alphonse Richard Wright, sur la radio privée Fim FM.
Le rappeur Djanii Alfa avait, lui, récemment critiqué des propos du président du CNT, avant d'être menacé d'arrestation par le procureur, selon sa défense. M. Sylla avait critiqué ces menaces présumées du procureur sur sa page Facebook.
17 policiers blessés
Dix-sept policiers ont été blessés dont un grièvement ces trois derniers jours dans les heurts à Conakry, a déclaré la police guinéenne mercredi dans un communiqué. Le FNDC avait appelé à manifester le 23 juin, passant outre l'interdiction édictée par la junte. Il avait suspendu son appel la veille de la manifestation, pour "donner une chance" au dialogue proposé par le gouvernement de transition.
Mais après la dernière réunion avec celui-ci, le FNDC a dénoncé "une parodie de rencontre", ainsi que "la conduite solitaire et autoritaire de la transition" et "les atteintes graves portées aux droits et libertés fondamentaux".
Les trois hommes écroués jeudi avaient été violemment interpellés mardi par la police au siège de leur coalition à Conakry, où ils tenaient une conférence de presse. MM. Sylla et Billon Bah ont été battus et leurs vêtements déchirés par des policiers, selon un journaliste de l'AFP. Une grande partie de la classe politique a condamné leur arrestation et s'est indignée de la méthode.
Le chef de la junte, le colonel Doumbouya, s'est engagé à remettre le pouvoir à des civils élus dans un délai de trois ans. La Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest (Cédéao) a rejeté le 3 juillet ce délai, lors d'une réunion à Accra, sans annoncer de nouvelles sanctions contre la Guinée, déjà suspendue des organes de l'organisation.