Carton jaune pour les fédérations de foot en Afrique centrale

Un garçon circule avec un ballon dans une rue à Bata, Guinée équatoriale, 7 février 2015.

Mises en garde des instances internationales, accusations de corruption et de mal-gouvernance, mise sous tutelle... Les fédérations de football broient du noir en Afrique centrale où des élections pour élire leurs présidents ont eu lieu samedi au Gabon et en Guinée équatoriale.

"Mes priorités pour l'instant sont les compétitions nationales et internationales, la réorganisation de la fédération viendra après", a déclaré, à peine élu samedi, Gustavo Ndong Edu, nouveau président de la Feguifut, la fédération de football de Guinée équatoriale.

Réorganiser la fédération, M. Ndong Edu devra pourtant le faire tant le football équato-guinéen est mal en point: la Guinée n'a pas participé à la dernière Coupe d'Afrique des Nations en 2017, les polémiques ne cessent d'enfler autour d'accusations d'ingérence des autorités dans l'administration du foot, et le championnat a été suspendu en janvier après la démission du président de la fédération.

Celui-ci, Andres Jorge Mbomio, qui était aussi ministre des sports à l'époque, ne s'était pas représenté à sa réélection, pour selon lui "sauver l'image du football" de Guinée, après de multiples critiques du fait de sa double casquette.

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Parallèlement, la Fédération internationale de football (Fifa) a demandé fin mars à Malabo de "débloquer" le compte bancaire de la fédération, sur lequel la Fifa verse des subventions diverses, menaçant le pays de "sanction pouvant aller jusqu'à la suspension". Le compte a été débloqué vendredi, la veille du scrutin, selon M. Mbomio.

"Les intérêts économiques et personnels sont venus mettre à mal le football de Guinée équatoriale", observe pour l'AFP une ancienne star du ballon rond en Guinée, sous couvert d'anonymat.

'Détournements d'un million de dollars'

Au Gabon, la fédération de football gabonaise (Fegafoot) a aussi été mise en garde par la Fifa en mars sur l'élection du nouveau président. La "non-conformité (de l'élection aux statuts de la Fegafoot) pourrait contribuer à une déstabilisation institutionnelle de la Fegafoot", disait le courrier obtenu par l'AFP.

Reportée, l'élection s'est finalement tenue samedi, avec comme issue la réélection du président sortant, Pierre-Alain Mounguengui. Il aura la lourde tache de remettre d'aplomb sa fédération, qui est dans un "réel coma" et en "déliquescence", selon le journal pro-gouvernemental, L'Union.

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"L'issue de cette élection donne un sentiment de gâchis, c'était une occasion de repartir à zéro... Mais les intérêts personnels ont pris le dessus sur l'intérêt collectif", note Freddhy Koula, journaliste sportif gabonais, qui estime que "la corruption et les compromis sont les maîtres mots de ce type d'élection au Gabon".

En République Démocratique du Congo (RDC), le monde du foot a vu la semaine dernière plusieurs de ses dirigeants être placés en garde à vue, dont le président de la fédération Constant Omari - qui a été remis en liberté provisoire le lendemain.

M. Omari, par ailleurs vice-président de la CAF, et trois autres dirigeants du foot congolais ont été "entendus sur des présumés détournements d'un million de dollars destiné à l'organisation de quatre matches de football", a déclaré à l'AFP Me Alain Makengo, un défenseur des sportifs congolais, alors que la ligue congolaise de football a suspendu ses activités en solidarité avec Omari et ses hommes.

Ancien chef antibalaka

En RCA voisine, où une grande majorité du territoire est contrôlée par des groupes armés qui combattent pour le contrôle des ressources, la fédération est entre les mains d'un ancien chef antibalaka, Patrice-Edouard Ngaissona.

Plusieurs fois par le passé dans le viseur de la justice, son nom est régulièrement cité dans les rapports de l'ONU et dans les notes d'enquête de la justice centrafricaine comme l'une des têtes de pont des milices antibalaka qui ont semé la terreur dans le pays à partir de 2013.

Début février, il avait défrayé la chronique en étant élu au comité exécutif de la Confédération africaine de football (CAF), suscitant les critiques d'ONG de défense des droits de l'homme. Aujourd'hui, il siège à l'instance africaine, et l'équipe nationale centrafricaine essaie de se qualifier pour la prochaine CAN, qui se jouera en 2019 au Cameroun.

Le champion d'Afrique y remettra à domicile son titre de 2017 en jeu, mais des doutes planent sur la capacité du pays à organiser la compétition, et la fédération camerounaise de football (Fecafoot) a été placée sous tutelle d'un comité de normalisation après la dissolution par la Fifa en août de son comité exécutif.

Conséquences de ces déboires de fédérations: mis à part le Cameroun, les sélections nationales de la sous-région peinent à sortir du lot, et si les joueurs vedettes jouent majoritairement en Europe, leurs coéquipiers locaux évoluant dans les championnats d'Afrique centrale, RDC, Gabon et Centrafrique en tête, n'ont souvent ni contrat, ni salaire.

Avec AFP