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Légalisation des avortements au Bénin


Sensibilisation dans les centres de santé sur l'avortement clandestin, à Cotonou, le 21 octobre 2021. (VOA/Ginette Fleure Adandé)
Sensibilisation dans les centres de santé sur l'avortement clandestin, à Cotonou, le 21 octobre 2021. (VOA/Ginette Fleure Adandé)

L'Assemblée nationale du Bénin a voté la légalisation de l'avortement. Le pays autorise désormais de mettre fin à une grossesse lors des trois premiers mois. Un soulagement pour les médecins, qui disent avoir vu des centaines de femmes mourir lors d'avortements clandestins.

Chaque année, au moins 200 femmes décèdent lors d'un avortement clandestin, selon le Dr Raphaël Totongnon, coordonnateur du projet de plaidoyer pour un avortement légal.

C'est dorénavant fait. La nouvelle loi votée mercredi soir prévoit que les femmes peuvent interrompre une grossesse dans les trois premiers mois si cela est susceptible "d'aggraver ou de provoquer une détresse matérielle, éducative, professionnelle ou morale, incompatible avec l'intérêt de la femme ou de l'enfant à naître".

Au Bénin, si la loi autorisait l'IVG dans certaines circonstances, nombreuses étaient encore les femmes qui perdaient la vie suite à un avortement clandestin. Le débat est houleux au Bénin où l'avortement n'est pas accepté par tous.

Inès est âgée de 36 ans. Mère d'un jeune homme de 20 ans, elle est tombée enceinte alors qu’elle était au secondaire. Née dans une famille conservatrice, elle n'avait que le choix de garder la grossesse au risque d'être reniée.

"C'est un sujet très délicat. Quand on choisit de ne pas avorter, cela a ses implications. Quand on choisit d'avorter, les conséquences sont là. Peut être pas dans l'immédiat. Avec le recul, je me rends compte que mes parents ont eu raison de me pousser à choisir de garder la grossesse", estime-t-elle.

D’après le docteur Salifou Nassiara, médecin généraliste, les grossesses en milieu scolaire deviennent de plus en plus "choses courantes" et sont à l'origine de la plupart des "avortements qui tuent les jeunes filles dans le silence". Il se rappelle de ces nombreuses jeunes filles reçues dans son cabinet après un avortement clandestin qui a mal tourné.

"Les conséquences immédiates sont surtout liées aux hémorragies, surtout lorsqu'il y a eu rétention de débris placentaires. Ce qui est resté va engendrer une hémorragie résiduelle qui va aller jusqu'à l'anémie. Il nous est déjà arrivé de constater de voir des femmes qui sont venues, suite à un avortement, avec l'intestin qui trainait à même le sol. On a eu vraiment du mal à pouvoir les rattraper sur le plan vital".

Bricette et Joanie ont avorté une fois et explique n'avoir pas eu le choix. "Je l'ai fait une fois parce que les conditions ne me permettaient pas de garder la grossesse. Je ne pouvais pas dire à mes parents qu'ils ont investi pour rien. Donc j'ai fait ce qu'il fallait même si aujourd'hui avec le recul, je regrette beaucoup ce geste".

Selon l'OMS, les femmes, y compris les adolescentes, dont la grossesse n’est pas désirée, ont fréquemment recours à l’avortement. La légalisation de l'avortement est un changement pour la société béninoise.

L'ancienne loi punissait les avortement."Lorsque la grossesse comporte un risque pour la femme enceinte, lorsque nous sommes dans des cas de viol ou les cas d'une grossesse issue d'une relation incestueuse ou lorsque le foetus a une malformation. Hormis ces trois conditions là, le législateur a prévu que celui qui sera reconnu coupable sera puni d'une peine d'emprisonnement allant de cinq ans à vingt ans et d'une amende allant de 500.000 à 2 millions. Et lorsque l'avortement se passe dans des conditions non indiquées, la peine sera doublée", rappelle Aubin Attindegla, juriste.​

Les pro-avortement militaient pour que la loi soit moins restrictive afin que des vies soient sauvées. Au Bénin, qu'il soit clandestin ou non, l'avortement est la troisième cause de mortalité chez les femmes.

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