Dans un entretien vidéo accordé mercredi à l'AFP, M. Chakwera a estimé que la reconnaissance par la justice des fraudes survenues en mai 2019 avait confirmé qu'aucune élection n'avait été véritablement libre au Malawi.
"Cette fois, nous avons l'espoir que l'élection sera traitée avec l'intégrité qu'elle mérite", a-t-il dit depuis son QG de campagne à Lilongwe. "Les Malawites méritent le respect, leurs droits aussi (...). Il ne s'agit pas de savoir qui va compter les bulletins, mais que tous soient effectivement comptés".
En février, la Cour constitutionnelle a annulé la réélection de Peter Mutharika pour cause d'irrégularités "graves" et "généralisées".
Au pouvoir depuis 2014, le chef de l'Etat sortant avait été proclamé vainqueur dès le premier tour de scrutin avec 38,5% des suffrages.
Arrivé en deuxième position avec 35,4% des voix, M. Chakwera, 65 ans, avait aussitôt contesté les résultats en pointant du doigt, entre autres, un nombre anormalement élevé de procès-verbaux de dépouillement qui étaient barbouillés de blanc à corriger.
Et à la surprise générale, la justice lui a donné raison et a annulé le scrutin présidentiel, deux ans après la première historique survenue au Kenya.
"C'était pour moi une question de justice", commente aujourd'hui Lazarus Chakwera.
"L'indépendance de la justice a imposé une obligation d'intégrité et de crédibilité aux élections africaines, c'est une leçon adressée au monde entier, qui stipule que les droits du peuple doivent être respectés".
- "Aspiration au changement" -
Depuis l'entrée du pays dans l'ère démocratique en 1994, le parti du Congrès du Malawi (MCP) de Lazarus Chakwera a systématiquement perdu toutes les confrontations électorales auxquelles il s'était présenté.
Son chef est persuadé qu'il en sera autrement le 23 juin.
"Le peuple veut le changement", estime le patron de l'opposition. "Il nous considère comme le visage d'un nouveau Malawi dont la construction serait ouverte à tous", ajoute-t-il, à opposer à celui du président Mutharika qui "va dans la mauvaise direction".
La réélection du président sortant en mai 2019 a plongé le pays sous haute tension politique. Pendant des mois, de violents incidents ont opposé la police et les partisans de l'opposition qui dénonçaient, dans la rue, la fraude électorale.
L'une des principales cibles de l'opposition, la présidente de la Commission électorale Jane Ansah, a fini par démissionner au début du mois.
Le Malawi se rend aux urnes malgré la pandémie de coronavirus. Un total de 564 cas, dont six mortels, y ont été recensés à ce jour.
M. Mutharika avait annoncé l'instauration d'un confinement, mais la justice l'a suspendu sine die au motif qu'il ne s'accompagnait d'aucune mesure d'aide aux populations les plus pauvres.
La campagne électorale s'y est donc déroulée comme si de rien n'était ou presque. Le président sortant et son rival ont tenu des réunions publiques de masse, au mépris de toutes les règles de distanciation sociale.
Lazarus Chakwera veut y voir un nouveau signe du discrédit de la population envers son président.
"Les gens ne croient plus en ce gouvernement, même les fonds alloués à la lutte contre la maladie ont été détournés", assure-t-il. "Ils se sont dit qu'il fallait d'abord régler la question politique avant de se pencher sur la façon de lutter contre la pandémie".